Par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques.
La question principale est ici de déterminer si, dans la situation actuelle, les communes et comtés de Hongrie règlent et gèrent, « dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques ». Pour juger du respect ou du non-respect de cette disposition, il convient de tenir compte du caractère plutôt « subjectif » et relatif de concepts tels que « la capacité »», « une part importante des affaires publiques », « sous leur propre responsabilité » et « au profit de leurs populations », puisqu’il n’existe aucune méthode officielle ou universelle pour mesurer l’importance de cette part des affaires publiques. Il faut donc prendre en considération l’évolution historique, la culture et les traditions constitutionnelles du pays concerné. Cette question est aussi étroitement liée à l’évaluation de la conformité avec d’autres parties de la Charte, comme ses articles 4, 8 et 9.
Pour évaluer le respect de cette disposition, on prendra en considération à la fois des aspects législatifs et des éléments factuels.
Les autorités locales hongroises sont dotées de compétences réglementaires. Conformément à l’article T de la Loi fondamentale, les décrets des autorités locales sont des actes juridiques qui peuvent fixer des règles générales de conduite contraignantes. Les compétences normatives des collectivités locales sont réglementées en détail par la loi organique sur l’autonomie locale.
Néanmoins, la part des affaires publiques que peuvent réglementer et gérer les autorités locales est nettement limitée. En effet, cette part a très sensiblement diminué. L’autonomie financière des collectivités locales s’est trouvée fortement réduite, ce qui a eu pour effet de renforcer le contrôle du pouvoir central sur les finances des collectivités locales. Par ailleurs, de nombreuses compétences jusqu’à présent exercées par les collectivités locales sont décrites comme étant « naturellement » recentralisées. En particulier, les soins de santé et les services sociaux, tout comme l’éducation, ont été presque entièrement centralisés. Ces trois secteurs, représentant 86 % des dépenses locales, et qui relevaient auparavant des communes et des comtés, ont été transférés au niveau central. Dans le nouveau système de compétences, les comtés n’en conservent que les compétences sur le développement rural, régional, la planification régionale et la coordination.
Un autre indicateur de « l’importance » ou du rôle politique et social des collectivités locales dans un pays est la part des dépenses des collectivités locales au sein du budget public national consolidé, notamment en comparaison avec les autres pays de l’Union européenne. Comme indiqué précédemment, les autorités locales hongroises ne gèrent que 12,9 % des dépenses publiques totales, ce qui équivaut à 6 % du PIB.
La Recommandation 341 (2013) appelait le Gouvernement hongrois à « réviser la législation concernant les tâches et les fonctions obligatoires des collectivités locales, de manière à élargir le champ des compétences qui leur sont normalement allouées sur la base des principes de décentralisation et de subsidiarité ».
Le processus de recentralisation, qui a affecté plusieurs compétences déjà transférées aux autorités locales et déjà décrites dans le rapport de 2013, n’a pas été inversé au cours de la période suivante et la Recommandation 341 (2013) n’a pas été mise en oeuvre.
Il convient de souligner en particulier le transfert de nombreuses compétences des collectivités locales vers les nouveaux districts, constitués depuis le 1er janvier 2013 et servant de divisions à l’administration déconcentrée de l’État.
Au cours du processus de consultation, le gouvernement s'est opposé aux points de vue exprimés par les rapporteurs, notamment en ce qui concerne l'accent mis sur la recentralisation de certaines compétences liées aux services publics. Il a expliqué que cette recentralisation devrait être considérée comme la construction d'"un État fort, actif et efficace". A cet égard, le gouvernement a indiqué qu'avant 2010, une part importante des services publics avait été fournie par les collectivités locales, ce qui avait entraîné des différences inacceptables dans le niveau de qualité de service en raison des écarts économiques entre les collectivités locales et, essentiellement, le transfert des tensions sociales croissantes aux autorités locales et la diminution constante des ressources".
Les rapporteurs ne partagent pas cette approche. Pour qu'un État signataire se conforme à l'article 3.1 de la Charte, l'objectif d'assurer un niveau égal de services publics doit être atteint par d'autres moyens que le transfert des compétences les plus basiques des collectivités locales aux institutions de l'État : en premier lieu, en accordant aux collectivités locales des ressources financières suffisantes et en appliquant un instrument équitable et efficace en la matière, comme indiqué dans l'article 9 de la Charte.
À la lumière des considérations qui précèdent, il convient de rappeler que les exigences de l’article 3.1 de la Charte ne sont pas respectées en Hongrie.