Belgique

Belgique - Rapport de monitoring

Date de la visite de monitoring : du 8 au 11 mars 2022 et du 9 au 12 mai 2022
Date d'adoption du rapport: 27 octobre 2022

 

Le présent rapport sur la situation de la démocratie locale et régionale en Belgique fait suite à la visite de suivi effectuée du 2 au 4 mars 2022. Il s'agit du 2ème rapport évaluant la mise en œuvre de la Charte en Belgique depuis sa ratification en 2004. Globalement, les rapporteurs ont observé un respect général des dispositions de la Charte qui ont été ratifiées et concluent que le système belge d'autonomie locale fonctionne bien. Toutefois, ils ont mis en évidence plusieurs façons d'améliorer le respect de la Charte. Par exemple, le rapport note que la consultation et le dialogue entre les différents niveaux de gouvernance sont parfois insuffisants. Ce problème est particulièrement aigu entre le niveau fédéral et le niveau local ainsi qu’entre le gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale et les autorités locales. Ce dernier point est en partie dû à l'absence d'un système de consultation officiel. En outre, des préoccupations ont été exprimées concernant le statut incertain des provinces, les restrictions imposées aux autorités locales qui souhaitent reconnaître et payer leurs employés et le système actuel de nomination des bourgmestres en Flandre, qui contrevient à l'article 8.3 de la Charte.

 

Ainsi, le rapport émet un certain nombre de recommandations. Il s'agit notamment de rendre le principe de l'autonomie locale plus explicite dans la constitution et/ou la législation régionale et d'améliorer les processus de consultation entre les différents niveaux de gouvernement par le biais d'un organe bilatéral fédéral. Les autorités régionales sont invitées à clarifier le statut des provinces, à organiser des référendums avant les fusions municipales et à donner aux autorités locales un plus grand contrôle sur la gestion des ressources humaines. En outre, plusieurs recommandations spécifiques sont adressées à chaque région et à la communauté germanophone. Le rapport encourage la Belgique à ratifier le protocole additionnel à la Charte et l'article 9.7, qui est actuellement appliqué en pratique.

 

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Article ratifié Ratifié avec réserve(s) Non ratifié
Conformité Conformité partielle Non conformité A déterminer
Tout déplier
Tout replier
Article 2
Fondement constitutionnel et légal de l'autonomie locale - Article ratifié

Le principe de l'autonomie locale doit être reconnu dans la législation interne et, autant que possible, dans la Constitution.


L’analyse du respect de cette disposition devrait porter sur la situation au niveau constitutionnel et législatif, en tenant dûment compte du système juridique décentralisé du pays. Une lecture attentive de la Constitution fédérale permet de conclure qu’elle ne proclame pas ou ne consacre pas expressément le « principe de l’autonomie locale » en employant ce terme ou d’autres termes semblables.

 

Toutefois, la Constitution belge comprend des dispositions succinctes sur les communes et les provinces, qui ont dûment été interprétées au fil des années par la Cour constitutionnelle (articles 41 et 162). Ainsi, l’article 41 de la Constitution dispose que « les intérêts exclusivement communaux ou provinciaux sont régis par les conseils communaux ou provinciaux selon les principes définis par la Constitution ».

 

Selon l’article 162, qui constitue une autre disposition constitutionnelle pertinente, « Les institutions provinciales et communales sont réglées par la loi. La loi consacre l’application des principes suivants : […] l’attribution aux conseils provinciaux et communaux de tout ce qui est d’intérêt provincial et communal, sans préjudice de l’approbation de leurs actes, dans les cas et suivant le mode que la loi détermine ».

 

Ces deux dispositions constitutionnelles ont été unanimement reconnues par les juristes belges et par les juridictions supérieures belges (le Conseil d’État et la Cour constitutionnelle) comme consacrant implicitement le principe de l’autonomie locale, selon lequel les collectivités locales peuvent intervenir dans toute matière qui relève selon elles de leur intérêt et la réglementer comme elles l’entendent[11]. Ce fait a été reconnu de manière constante par la Cour constitutionnelle dans plusieurs arrêts, dont l’arrêt no 47/2012 du 22 mars 2012 et l’arrêt no 28/2019 du 14 février 2019.

 

Cette interprétation est également très répandue parmi les principaux acteurs politiques et, en particulier aux fins de ce rapport, parmi les acteurs politiques régionaux.

 

En ce qui concerne les détenteurs ou bénéficiaires de cette autonomie locale, les communes ainsi que les provinces bénéficient de ce principe. En outre, en 2014, l’article 41.1 de la Constitution a été modifié pour ouvrir la possibilité de supprimer les provinces, et de les remplacer par des entités supracommunales. Si elles venaient à être créées, ces entités supracommunales bénéficieraient également du principe de l’autonomie locale.

 

Par conséquent, un consensus se dégage dans les milieux universitaires, dans les juridictions et parmi les juristes selon lequel les communes et les provinces sont des entités entièrement autonomes, ce qui dérive directement du droit constitutionnel et fédéral.

 

Un autre niveau d’enquête devrait analyser les trois différentes législations sur les collectivités locales qui existent au niveau régional, et déterminer si le principe de l’autonomie locale y est reconnu de manière appropriée.

 

  •  Législation dans la Région flamande : il convient d’analyser le décret du Parlement flamand du 22 décembre 2017 sur l’administration locale. Cette législation régionale ne consacre pas expressément le principe de l’autonomie locale, mais elle fait une référence générale à l’article 41 de la Constitution.

 

  •  Législation dans la Région de Bruxelles-Capitale : dans cette région, la loi applicable est la nouvelle loi communale du 24 juin 1988 telle que modifiée. Comme pour la Flandre, cette législation régionale ne proclame pas expressément le principe de l’autonomie locale.

 

  •  Législation dans la Région wallonne : le Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation du 22 avril 2004 s’applique. Comme pour les deux autres législations régionales, ce principe n’est pas expressément reconnu.

 

Au vu des constatations qui précèdent, nous estimons qu’à l’évidence, a) la Constitution fédérale ne reconnaît pas expressément (ou ne mentionne pas ouvertement) le principe de l’autonomie locale, en employant ce terme ou un terme équivalent ; b) les experts juridiques, les spécialistes reconnus et les principaux responsables politiques estiment que le principe de l’autonomie locale est implicitement reconnu par la Constitution ; c) aucun des trois textes législatifs sur les collectivités locales qui existent au niveau régional ne reconnaît non plus ce principe ; par conséquent, le principe de l’autonomie locale n’est pas non plus proclamé dans la législation ; d) la jurisprudence de la Cour constitutionnelle et du Conseil d’État reconnaît que ce principe est consacré dans les articles 41 et 162 de la Constitution fédérale.

 

Les rapporteurs estiment par conséquent que l’article 2 de la Charte est respecté en Belgique.

 

Article 3.1
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques.


L’interprétation selon laquelle par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques, est pleinement reconnue en Belgique.

 

Il convient de mentionner ici une disposition constitutionnelle : selon l’article 162, « la loi consacre l’application des principes suivants : […] l’attribution aux conseils provinciaux et communaux de tout ce qui est d’intérêt provincial et communal ». Comme nous l’avons vu, on retrouve les dispositions de l’article 3.1 de la Charte, formulées de manière similaire, à l’article 162 de la Constitution belge : « l’attribution aux conseils provinciaux et communaux de tout ce qui est d’intérêt provincial et communal ».

 

D’autre part, l’article 41 de la Constitution belge dispose que « les intérêts exclusivement communaux ou provinciaux sont régis par les conseils communaux ou provinciaux selon les principes définis par la Constitution », ce qui est une autre manière de proclamer et de reconnaître les obligations énoncées à l’article 3.1 de la Charte.

 

En outre, et comme nous l’exposerons plus en détail ci-après, les communes et (dans une moindre mesure) les provinces disposent d’un domaine de compétences considérable, qui peut sans aucun doute être qualifié de « part importante des affaires publiques ». Selon nos interlocuteurs, les régions ont renforcé l’autonomie locale (au moins en ce qui concerne les communes). Il semble que les régions aient octroyé davantage de compétences aux communes (par exemple, des compétences en matière de sport et de politique de la jeunesse, dans le cas de la Flandre).

 

Il n’en va pas de même pour les provinces. Comme indiqué plus haut, le profil institutionnel et politique des provinces est beaucoup plus restreint et moins important que celui des communes. En outre, ces dernières années, la tendance dans les deux régions qui comprennent des provinces (la Flandre et la Wallonie) a été de réduire ou de supprimer les compétences des provinces. Cette évolution a été particulièrement prononcée en Flandre, où la région, par des lois régionales, a transféré certaines compétences des provinces à la région. Il est clair que les provinces ont perdu de l’importance par rapport aux communes sur le plan institutionnel et social, et leur existence même est remise en question.

 

Par conséquent, la délégation est convaincue que l’article 3.1 de la Charte est pleinement respecté dans le Royaume de Belgique.

 

Article 3.2
Concept de l'autonomie locale - Non ratifié

Ce droit est exercé par des conseils ou assemblées composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel et pouvant disposer d'organes exécutifs responsables devant eux. Cette disposition ne porte pas préjudice au recours aux assemblées de citoyens, au référendum ou à toute autre forme de participation directe des citoyens là ou elle est permise par la loi.


Tout d'abord, il convient de rappeler que le Royaume de Belgique n’a pas inclus l’article 3.2 dans les dispositions de la Charte qu’il a ratifiées. Par conséquent, cette disposition n’est pas contraignante pour la Belgique. Cependant, et dans un souci d’exhaustivité, nous examinerons ici les constructions juridiques relatives à cette disposition. Nous étudierons séparément les deux parties de l’article 3.2.

 

Conseils et organes exécutifs

 

La source démocratique et la légitimité des organes des collectivités locales sont proclamées et garanties par la Constitution belge, selon laquelle « La loi consacre l’application des principes suivants :1 l’élection directe des membres des conseils provinciaux et communaux » (article 162). Cette caractéristique devrait donc être observée dans les communes et dans les provinces.

 

Conseils et organes exécutifs locaux. Mention particulière du bourgmestre

 

Comme indiqué ci-dessus, chaque région a le pouvoir de promulguer la législation qui s’applique dans les communes situées sur son territoire. Pour cette raison, la réglementation effective des assemblées ou des conseils locaux, ainsi que celle des organes exécutifs locaux, relève de la compétence exclusive des régions. Cette caractéristique fondamentale est susceptible d’engendrer des divergences normatives et des différences importantes entre les communes belges.

 

Elles partagent toutefois certaines caractéristiques :

 

  • Toutes les communes sont des entités autonomes et démocratiques.

 

  • Dans tout le pays, les principaux organes sont le conseil communal et le maire ou « bourgmestre » (« Burgemeester » en néerlandais) ; les résidents de la commune élisent les membres du conseil, et le conseil élit le bourgmestre et l’organe exécutif. Le collège des bourgmestre et échevins (« college van burgemeester en schepenen » en néerlandais) est l’organe exécutif. Le nombre de membres de l’« exécutif » dépend du nombre d’habitants de la commune, et de ses règlements internes (par exemple, à Genk, l’organe exécutif comprend huit échevins plus le bourgmestre).

 

  • Le conseil communal est élu tous les six ans au suffrage direct, secret et universel, et le nombre de conseillers communaux dépend de la population de la commune ; la proportion entre le nombre de conseillers et la population de la commune varie suivant les régions. Par exemple, en Flandre, et conformément à l’article 4 du décret régional sur l’administration locale, le nombre de membres du conseil communal (y compris le bourgmestre et les échevins) est fixé comme suit :

 

7 membres dans les communes de moins de 1 000 habitants ;

9 membres dans les communes de 1 000 à 1 999 habitants ;

11 membres dans les communes de 2 000 à 2 999 habitants ;

13 membres dans les communes de 3 000 à 3 999 habitants.

Le nombre de membres du conseil augmente en conséquence, et il y a 55 membres dans les communes qui comptent plus de 300 000 habitants. Comme indiqué plus haut, le bourgmestre et les échevins sont des membres naturels du conseil.

 

  • Il est obligatoire de voter aux élections locales. Cependant, un nouveau texte de loi a été adopté en Flandre, et à l’avenir le vote aux élections locales sera volontaire dans cette région.

 

  • Le mandat des membres du conseil communal est de six ans, étant donné que les élections locales ont lieu tous les six ans (le même jour dans tout le pays, le deuxième dimanche d’octobre). Les dernières élections locales ont eu lieu le 14 octobre 2018. Les conseillers communaux peuvent être réélus.

 

  • Le conseil communal élit le bourgmestre parmi ses membres. Le bourgmestre est le principal responsable politique de la commune, il dirige les différents services et divisions locaux et préside les séances plénières du conseil communal. Ces caractéristiques sont les mêmes dans les trois régions. Cependant, les régions diffèrent du point de vue de la procédure précise par laquelle un conseiller communal, élu en tant que maire par le conseil communal, devient formellement maire et peut exercer les fonctions inhérentes à ce rôle varie considérablement.

           

Traditionnellement, les maires (une fois élus par les conseils) devaient être nommés par le ministre régional compétent (généralement le ministre de l’Intérieur). De nos jours, il y a des différences entre les régions.

 

En ce qui concerne la Région wallonne, un conseiller communal est proposé par le conseil communal en vue de devenir bourgmestre (à condition qu’il soit belge) et le gouvernement régional le nomme (article L 1123-2 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation). En vertu de la législation, ce processus semble être automatique.

 

En Région flamande, le système est traditionnellement différent. En effet, le conseil communal fait une proposition au ministre régional, et ce représentant du gouvernement a la possibilité d’examiner la situation personnelle du candidat proposé et peut en fin de compte refuser sa nomination, s’il estime que le bourgmestre proposé ne remplit pas les conditions morales et personnelles pour exercer cette fonction. Dans ce cas, le gouvernement régional peut demander au conseil de présenter une nouvelle proposition, avec un candidat différent, et le candidat proposé la première fois ne peut pas être proposé une deuxième ou une troisième fois. Une fois nommé pour une période de six ans, le nouveau bourgmestre prête serment devant le gouverneur provincial (article 59 du décret flamand sur l’administration locale).

 

Cet aspect traditionnel du paysage politique belge a fait l’objet de nombreuses analyses et critiques du Congrès, qui a mené plusieurs missions de suivi et d’enquête sur ce sujet (voir le point 2.4 ci-dessus). Le Congrès a constamment recommandé aux autorités belges (flamandes) de supprimer le système traditionnel de nomination par le ministre flamand de l’Intérieur.

 

À l’occasion de cette visite, la délégation a été informée que certaines modifications juridiques ont été apportées dans ce domaine, qui ont modifié le dispositif traditionnel. En effet, des modifications juridiques ont été approuvées par le Parlement flamand en juillet 2021, et entreront en vigueur à l’automne 2024, à l’occasion des prochaines élections locales (modification de l’article 58 du décret flamand de 2017 sur l’administration locale).

 

À la fin de la procédure, le bourgmestre doit être nommé par le gouvernement régional (article 58), et le bourgmestre proposé prête serment devant le président du conseil, et non pas devant le ministre régional.

 

En vertu de cette nouvelle loi, qui devrait renforcer la démocratie locale et le vote populaire, le nouveau système fonctionnera comme suit : 1) il ne sera plus obligatoire de voter aux élections locales ; 2) le nombre de voix obtenu par les listes ne sera plus pris en compte pour déterminer les candidats élus et seul le nombre de voix obtenu individuellement comptera ; 3) après les élections locales, si un parti obtient une victoire claire et remporte plus de la moitié des sièges de conseillers communaux, le candidat ayant obtenu le plus grand nombre de voix nominatives dans cette liste électorale devrait être proposé comme bourgmestre par le conseil communal.

 

Cependant, cette situation est extrêmement rare lors des élections locales belges, en raison du grand nombre de partis et de la fragmentation de l’électorat. Généralement, une alliance entre plusieurs partis est nécessaire pour obtenir la majorité dans un conseil communal. Par conséquent, la procédure habituelle est celle décrite ci-après : 4) le parti qui a obtenu le plus de voix sera chargé de constituer un gouvernement local, c’est-à-dire que la nouvelle loi donne l’initiative ou la préférence légale, pendant 14 jours, au responsable du parti ayant obtenu le plus de voix pour tenter de former un gouvernement local. Ainsi, pendant deux semaines, ce parti aura l’initiative « légale » pour constituer un gouvernement, en cherchant à former une alliance avec les autres partis ayant obtenu des sièges au conseil communal ; 5) le candidat que obtient le plus de votes « personnels » sur la liste électorale de son parti et qui appartient au parti dont la liste a obtenu le plus grand nombre de voix devrait devenir bourgmestre ; 6) le conseil communal élit parmi ses membres le candidat qui devrait être nommé bourgmestre, et soumet la proposition correspondante au gouvernement flamand ; dernier point, mais non des moindres, les différents partis doivent informer les électeurs (avant les élections) des types de coalitions qu’ils constitueront après le jour de l’élection. L’objectif est d’éviter la fraude ou les surprises pour les électeurs.

 

Dans ce nouveau dispositif juridique, il convient d’examiner plus particulièrement l’intervention du gouvernement flamand, qui représentait jusqu’ici l’aspect le plus controversé de cette loi. Dans le même esprit, une analyse du nouvel article 58 montre que l’intervention du gouvernement régional reste décisive lors de la nomination des bourgmestres.

 

Il est vrai que la nouvelle loi dispose que le candidat qui obtient le plus grand nombre de voix nominatives dans la liste ayant remporté le plus de voix « est nommé bourgmestre par le gouvernement flamand » (premier alinéa), ce qui semble être une décision assez automatique.

 

Cependant, un examen plus attentif aboutit à une conclusion différente : après les élections et l’installation effective des membres du conseil, le candidat qui a obtenu le plus grand nombre de voix nominatives dans la liste électorale ayant remporté le plus de voix sera considéré comme étant le « bourgmestre désigné » et exercera les fonctions attribuées au bourgmestre (article 59.1, deuxième paragraphe) ; avant de commencer son mandat, le « bourgmestre désigné » prête serment devant le président du conseil communal, et s’il est lui-même président du conseil communal, il prête serment devant le conseiller communal le plus âgé (article 58.1, paragraphe 3). Cependant, immédiatement après qu’il a prêté serment, il est indiqué que le gouvernement flamand « prend une décision concernant la nomination [ou non] en tant que bourgmestre après que le bourgmestre désigné a prêté serment et après avoir été informé par le conseil communal » (article 58.1, paragraphe 4, caractères gras ajoutés).

 

S’il est nommé par le gouvernement régional, il devient un « bourgmestre nommé » et doit prêter un autre serment à ce titre (article 58.1, paragraphe 5). Par conséquent, l’intervention du gouvernement flamand n’est pas automatique, ni une simple formalité, car il peut nommer (ou ne pas nommer) le « bourgmestre désigné ». En outre, la nouvelle loi ne précise pas les motifs pour lesquels le gouvernement pourrait décider de ne pas nommer le bourgmestre. De hauts responsables politiques flamands ont indiqué à la délégation que cela ne se produirait que dans des circonstances précises et exceptionnelles (par exemple, si le candidat proposé a un casier judiciaire). À noter que, cette interprétation a été fournie oralement par les interlocuteurs des rapporteurs, et le nouveau texte de loi ne dit rien à ce sujet.

 

En outre, selon la nouvelle formulation de la loi, la décision du gouvernement flamand de ne pas nommer le bourgmestre (ou le refus d’accepter son serment) « a pour effet que la personne concernée ne peut plus être nommée bourgmestre pendant la même législature ». En cas de refus de nomination du bourgmestre, la nouvelle loi dispose que si le gouvernement flamand décide de refuser de nommer un bourgmestre, « le conseiller du même groupe qui, après ce conseiller, a obtenu le plus de voix nominales, devient le bourgmestre désigné et est nommé bourgmestre par le gouvernement flamand ». La même procédure doit donc être suivie.

 

Compte tenu de ce qui précède, la délégation a eu l’impression que, en effet, le statut juridique du candidat à la fonction de bourgmestre a évolué, et que les procédures ont été rationalisées. Cependant, les rapporteurs ne sont pas convaincus qu’il y ait eu d’amélioration majeure concernant la question centrale : la nécessité qu’un conseiller communal soit « nommé » par le gouvernement flamand pour devenir bourgmestre. Il s’agissait de l’aspect le moins satisfaisant de l’ensemble de l’« ancienne » législation, qui a fait l’objet de différentes recommandations du Conseil.

 

Par conséquent, les rapporteurs regrettent de constater que peu de progrès ont été accomplis dans la mise en œuvre concrète des résolutions du Congrès à ce sujet et que la situation reste fondamentalement inchangée (en ce qui concerne la nomination du bourgmestre par le gouvernement flamand). Le nouveau dispositif juridique semble laisser une latitude considérable lors de la décision de nommer ou non un bourgmestre, étant donné que les motifs de refus ne sont pas précisés dans la loi.

 

Les six communes flamandes dotées de « facilités » linguistiques et situées autour de Bruxelles seront spécifiquement mentionnées ci-dessous (voir la section 4.3).

 

La législation régionale de Bruxelles-Capitale est celle qui simplifie le plus la nomination des bourgmestres, car aucune intervention ou approbation du gouvernement régional n’est prévue (article 13 de la nouvelle loi communale). Il en est ainsi depuis la réforme législative de la législation régionale, qui a eu lieu en 2020. La délégation a été informée que, dans cette région, il existe un nouveau texte législatif régional (ordonnance) selon lequel les listes électorales qui se présentent aux élections locales doivent respecter la parité hommes-femmes (cette nouvelle loi entrera en vigueur pour les prochaines élections locales, prévues en 2024).

 

Enfin, dans la Communauté germanophone, le bourgmestre est élu par le conseil, sans autre formalité ou procédure.

 

Chaque commune dispose également d’un « collège des bourgmestre et échevins », qui est l’organe exécutif de la commune. Les échevins sont élus parmi les membres du conseil communal. Le collège des bourgmestre et échevins est un organe collégial qui prend des décisions à la majorité.

 

Responsabilité des organes exécutifs devant le conseil communal

 

Comme indiqué plus haut selon les spécialistes, la Belgique avait émis une « réserve » indue à l’article 3.2, car, au moment de la ratification, les organes exécutifs des collectivités locales n’étaient pas responsables devant les conseils communaux, comme le demande la Charte.

 

De l’avis des rapporteurs, ce postulat n’est plus fondé, du moins partiellement. Actuellement, les législations régionales sur les collectivités locales (du moins celles des Régions wallonne et flamande) prévoient clairement la responsabilité politique des organes exécutifs (bourgmestre, collège) vis-à-vis du conseil communal.

 

Ainsi, dans le cas de la législation flamande, depuis 2021, le conseil peut proposer, discuter et approuver une « motion de méfiance constructive » collective (article 46 du décret flamand sur l’administration locale), adressée à l’ensemble de l’exécutif, à savoir le collège des bourgmestre et échevins. Une motion de méfiance constructive peut être déposée à titre individuel contre un ou plusieurs échevins. Cette motion doit être signée par la majorité des conseillers communaux.

 

Si le conseil communal adopte la motion de méfiance, le ou les membres faisant l’objet de la motion sont révoqués et les candidats présentés sont déclarés élus.À partir de l’adoption de la motion collective, le conseiller mentionné à l’article 58 du décret porte le titre de « bourgmestre désigné » et exerce toutes les fonctions dévolues au bourgmestre.Avant d’accepter son mandat, le bourgmestre désigné doit prêter serment. Enfin, « le gouvernement flamand nomme le bourgmestre conformément à la procédure visée à l’article 58 », décrite plus haut. Là encore, la nomination formelle par le gouvernement flamand est donc requise.

 

Il convient de souligner que la motion de méfiance ne s’applique pas aux six communes à facilités (voir la section 4.3 ci-après).

 

Dans le cas de la Région wallonne, d’importantes modifications du Code régional de la décentralisation, adoptées en 2005 et 2012, ont donné lieu à d’importantes évolutions sur ce sujet. En effet, la création d’un mécanisme de responsabilité du collège et de ses membres devant le conseil communal a constitué l’une des principales nouveautés de la réforme du 8 décembre 2005.

 

L’article L1123-3, troisième alinéa, du Code de la démocratie locale et de la décentralisation établit le principe selon lequel le collège est responsable devant le conseil. La motion de méfiance collective est régie par l’article L1123-14, paragraphe 1 : « Le conseil peut adopter une motion de méfiance à l’égard du collège ou de l’un ou de plusieurs de ses membres. Cette motion n’est recevable que si elle présente un successeur au collège, à l’un ou à plusieurs de ses membres, selon le cas. […] ». Étant donné qu’elle suppose la présentation d’un ou de plusieurs successeurs (en cas de motion de méfiance individuelle) ou d’une nouvelle équipe (en cas de motion de méfiance collective), cette motion de méfiance est qualifiée de constructive.

 

Le mécanisme de motion de méfiance a suscité de nombreuses réactions, qui ont amené le gouvernement wallon à approuver des lignes directrices supplémentaires pour le dépôt d’une telle motion, afin d’éviter qu’elle ne déstabilise l’institution collégiale. Cette réforme a été achevée le 26 avril 2012. Ainsi, la motion de méfiance collective n’est recevable que si elle est déposée par la moitié au moins des conseillers de chaque groupe politique participant au pacte de majorité. La présentation d’un successeur au collège constitue un nouveau pacte de majorité. La motion doit être adoptée par la majorité des membres du conseil ; son adoption suppose la démission du collège ainsi que l’élection du nouveau collège, bien que les membres du collège restent en poste jusqu’à ce que leurs remplaçants aient prêté serment. Lorsqu’une motion de méfiance collective a été adoptée par le conseil et qu’une autre majorité s’est installée, aucune nouvelle motion de méfiance ne peut être déposée avant l’expiration d’un délai d’un an et demi, et au cours d’une même législature communale, il ne peut pas être voté plus de deux motions de méfiance collective.

 

En ce qui concerne les provinces, leur structure institutionnelle de base copie dans une certaine mesure celle des communes. Bien que les caractéristiques et les termes employés puissent varier selon la région où se trouvent les provinces (la Flandre ou la Wallonie), elles partagent toutes les points fondamentaux suivants :

 

  •  Toutes les provinces sont des entités autonomes et démocratiques.

 

  •  Les principaux organes sont le conseil provincial et les organes exécutifs. Le conseil provincial est élu démocratiquement tous les six ans au suffrage direct et secret, le jour des élections locales. Le nombre de membres des conseils provinciaux va de 47 pour les provinces comptant moins de 250 000 habitants à 84 pour les provinces comptant plus d’un million d’habitants (il s’élève par exemple à 56 dans la province de Hainaut).

 

  •  Les organes exécutifs sont le président du conseil, le collège ou la députation permanente et le gouverneur. Le conseil élit son président pour un mandat de six ans, et il préside et dirige les affaires du conseil. Il y a également un « collège » ou une « députation permanente », élu par le conseil parmi ses membres, qui est l’organe exécutif le plus élevé. Cet organe est appelé différemment en Flandre et en Wallonie. En Flandre, la région a gardé l’appellation traditionnelle de « députation permanente », tandis qu’en Wallonie, ce nom a été remplacé par celui de « collège provincial ».

 

La députation permanente exécute les résolutions du conseil provincial et assure la gestion quotidienne. Elle est présidée par le gouverneur. Toutefois, le gouverneur n’est pas élu ; il est nommé ou congédié par le Roi, sous la responsabilité du ministre de l’Intérieur. Traditionnellement, le gouverneur représentait le gouvernement national, mais à présent il représente uniquement le gouvernement régional.

 

Participation des habitants. Statut de la ratification du Protocole additionnel à la Charte

 

Le dernier alinéa de l’article 3.2 de la Charte porte sur la participation « directe » des habitants.
Nous examinerons tout d’abord la vitalité de la participation directe au niveau local, puis nous nous intéresserons au statut de la ratification du Protocole additionnel à la Charte.

 

En ce qui concerne le premier point, tous les interlocuteurs rencontrés indiquent que dans la plupart des villes belges, il existe différents moyens, techniques et mécanismes pour canaliser la participation des habitants aux affaires publiques et obtenir leur avis concernant la gestion des affaires et des décisions locales. Les questions pour lesquelles la participation des habitants est la plus répandue sont l’approbation des plans d’investissement, l’urbanisme et les budgets participatifs. Dans le cas de l’urbanisme, il existe des organes spécifiques qui comprennent des représentants des habitants en tant que membres naturels (tels que la commission consultative pour l’aménagement du territoire). D’autre part, les élus locaux reconnaissent que la pandémie de covid-19 a eu des répercussions considérables sur la participation des habitants, mais affirment qu’elle revient peu à peu, doucement et progressivement.

 

Les différents formats et modalités de participation des habitants sont principalement régis au niveau régional. Dans certaines régions, il existe des règles régionales spécifiques qui régissent les référendums locaux (comme en Flandre). En Région wallonne, par exemple, les habitants peuvent aussi participer fréquemment aux « programmes communaux de développement rural ».

 

Dans la Région de Bruxelles-Capitale, la participation des habitants est particulièrement développée, et la nouvelle loi communale régit cette caractéristique de la démocratie locale dans ses articles 318-328 et son article 89bis portant sur l’interpellation par les citoyens. Différentes techniques et possibilités sont mises à la disposition des habitants, telles que les pétitions, les propositions des habitants ou la participation aux commissions délibératives. Les habitants peuvent s’exprimer sur un certain nombre de sujets, comme l’emploi, la santé, la culture, l’environnement, la mobilité, le handicap, le logement, etc.

 

Compte tenu de la vitalité de la participation des habitants au niveau local, on peut se demander pourquoi la Belgique n’a pas ratifié le Protocole additionnel à la Charte.

 

Conformément à la loi, la Belgique ne peut ratifier un traité international qu’avec l’accord des parlements régionaux, si le traité porte sur une question relevant de la compétence des régions (comme dans le cas du Protocole additionnel).

 

Cela tient à l’organisation institutionnelle de la Belgique. Pour ratifier le Protocole additionnel, il est nécessaire de suivre une procédure longue, complexe et lente. En substance, les quatre parlements infranationaux compétents doivent donner leur accord au préalable. Il s’agit des parlements régionaux de Flandre, de Wallonie et de Bruxelles-Capitale et du Parlement de la Communauté germanophone. L’ensemble du processus est coordonné par un organe fédéral, la Conférence interministérielle sur la politique étrangère (CIPE).

 

Ainsi, la question de la ratification du Protocole doit être introduite dans chaque parlement régional par le gouvernement régional correspondant, et une fois que le parlement concerné a donné son accord, le gouvernement correspondant communique cet accord aux autorités fédérales ; c’est uniquement lorsque les autorités fédérales s’assurent que tous les accords nécessaires ont été obtenus que le gouvernement fédéral peut déposer l’instrument de ratification.

 

De manière générale, le Protocole ne pose pas de problème aux régions, et il n’y a pas de question sensible qu’elles souhaitent éviter.

 

Ainsi, en Flandre, la ratification du Protocole additionnel a été approuvée ou a reçu l’accord de son parlement, le 15 juillet 2011.

 

En ce qui concerne la Région de Bruxelles-Capitale, la délégation a appris avec satisfaction les informations suivantes : a) le 22 avril 2022, le parlement régional a adopté l’Ordonnance portant approbation du Protocole additionnel à la Charte ; b) le 30 avril, peu avant la seconde partie de la visite de la délégation, le gouvernement régional a ratifié cette Ordonnance et l’a notifiée au gouvernement fédéral.

 

En ce qui concerne la Communauté germanophone, le Protocole additionnel a été ratifié en 2021 par le gouvernement, puis transféré au parlement. Le président de ce parlement a assuré que ce sujet sera discuté prochainement au parlement, et que celui-ci donnera certainement son accord.

 

Dans le cas de la Région wallonne, toutefois, l’approbation du Protocole semble être au point mort, étant donné que la proposition n’a pas encore été envoyée au parlement régional. Cependant, personne ne semble savoir exactement pourquoi cela n’a pas encore été fait, et il s’agit probablement d’une question de priorités politiques ou de manque d’intérêt.

 

Compte tenu de ce qui précède, les rapporteurs estiment que l’article 3.2 de la Charte n’est que partiellement respecté, étant donné que le mécanisme de motion de confiance ou de méfiance n’est pas reconnu dans toutes les collectivités locales et dans toutes les régions.

 

Article 4.1
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences de base des collectivités locales sont fixées par la Constitution ou par la loi. Toutefois, cette disposition n'empêche pas l'attribution aux collectivités locales de compétences à des fins spécifiques, conformément à la loi


 

Les communes

 

Au niveau constitutionnel, l’article 41, qui dispose que « Les intérêts exclusivement communaux […] sont réglés par les conseils communaux […] » est particulièrement important. Cette disposition constitutionnelle énonce le principe général selon lequel tout ce qui se passe sur le territoire de la commune, ou qui a une dimension purement locale, relève du champ d’action des communes. En général, et en particulier au niveau législatif régional, cette disposition constitutionnelle a été interprétée de manière assez large. Par exemple, le décret flamand de 2017 sur l’administration locale prévoit à son article 2 que, en vertu de cette disposition constitutionnelle et à cette fin, les communes « peuvent prendre toutes les initiatives ».

 

Les compétences précises des communes se trouvent dans les lois régionales régissant leurs collectivités locales respectives, tandis que d’autres législations sectorielles sont également susceptibles de définir les domaines de compétence des collectivités locales, comme dans le cas de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire, de l’octroi de licences et d’autorisations aux entreprises, des projets environnementaux, etc.

 

Les communes jouissent du statut juridique d’« autorités de droit public » et possèdent un large éventail de compétences et de privilèges juridiques. Par exemple, elles peuvent approuver des réglementations locales prescrivant des règles de comportements sociaux dans le domaine de la police administrative générale ou « spéciale », comme la circulation. Elles disposent d’un large éventail de compétences décisionnelles (octroi de licences) ; elles peuvent également imposer des amendes et des sanctions aux contrevenants, et, enfin, elles ont d’importantes compétences fiscales (voir ci-après). Tous les élus locaux rencontrés par la délégation ont indiqué qu’ils étaient satisfaits du niveau actuel de compétences des communes. Le niveau de compétences est élevé, et nous n’avons eu connaissance d’aucune plainte à ce sujet dans aucune partie du pays.

 

Dans le cas de la Flandre, le principal texte législatif est le décret régional sur l’administration locale de 2017. Bien que ce décret régisse en détail les compétences des différents organes internes de l’administration communale, il ne comprend pas de liste exhaustive des compétences attribuées aux communes. Néanmoins, ce texte législatif prévoit que « les communes et les centres publics d’aide sociale visent à apporter au niveau local une contribution durable au bien-être des citoyens et assurent en proximité étroite avec ceux-ci un exercice démocratique, transparent et efficace de leurs pouvoirs. […] Elles visent à contribuer au développement durable du domaine communal » (article 2). En outre, conformément à la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980, ainsi qu’à l’article 46 de la loi ordinaire de réformes institutionnelles du 9 août 1980, « et en application du principe de subsidiarité », les communes exercent également les compétences qui leur sont conférées par ou en vertu de la loi ou du décret.

 

Les communes sont donc compétentes pour toutes les questions qui n’ont pas été exclues de leurs compétences par les autorités supérieures. En outre, depuis les années 1970, différentes lois parlementaires sectorielles ont explicitement attribué des tâches toujours plus vastes aux communes, par exemple dans les domaines de l’aménagement du territoire, de l’approvisionnement en gaz, en eau et en électricité, de la collecte et du traitement des déchets domestiques, de l’expansion économique et de la politique culturelle et sociale. Les compétences transférées aux régions et aux communautés à la suite des réformes de l’État ont été partagées avec les collectivités locales.

 

Dans le cas de la Région wallonne, l’article L 1113-1 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation de 2004 prévoie que « les attributions des communes sont notamment : de régir les biens et revenus de la commune ; de régler et d’acquitter celles des dépenses locales qui doivent être payées des deniers communs ; de diriger et faire exécuter les travaux publics qui sont à charge de la commune ; d’administrer les établissements qui appartiennent à la commune, qui sont entretenus de ses deniers, ou qui sont particulièrement destinés à l’usage de ses habitants ».

 

Compte tenu du contexte juridique mentionné, il est possible d’affirmer que, en général, les communes sont compétentes dans les domaines suivants :

 

-   l’urbanisme et la gestion de la croissance urbaine ; l’octroi de permis pour les bâtiments et les projets de construction ;

-   la régulation et le contrôle de la circulation de véhicules ;

-   le pouvoir d’accorder des permis et licences ;

-   l’entretien et l’amélioration du patrimoine local, notamment des routes et chemins locaux ;

-   la capacité d’imposer et de percevoir des taxes ou redevances (sur des activités de rue polluantes ou des installations commerciales bruyantes) ;

-   la protection de l’environnement, comprenant toutes sortes de services locaux, tels que la fourniture d’eau potable, le traitement des eaux usées urbaines, la collecte et le traitement des déchets, le suivi et l’amélioration de la qualité de l’air, etc. ;

-   la gestion des situations d’urgence et la prévention des incendies ;

-   le nettoyage et l’entretien des rues, des jardins publics et des espaces de loisirs ;

-   la construction et la gestion de toutes sortes d’équipements communaux tels que les équipements sportifs et récréatifs, les lieux culturels, les places de stationnement public, etc. ;

-   la construction et l’entretien d’espaces verts, de jardins et de parcs publics, etc. ;

-   l’exécution des lois, des décrets et de la réglementation administrative de la police sur le territoire de la commune et en matière d’ordonnances de police urgentes.

 

Les provinces

    

Faisant écho aux dispositions constitutionnelles concernant les communes, les provinces sont chargées de régler tout ce qui est d’intérêt provincial sur leur territoire. Dans cet esprit, l’article 41 de la Constitution dispose que « les intérêts exclusivement […] provinciaux sont régis par les conseils […] provinciaux selon les principes définis par la Constitution ».

 

La province est le niveau intermédiaire de gouvernement, entre le niveau régional et communal. Par conséquent, tout ce qui dépasse le territoire d’une commune, mais qui n’a pas d’impact régional relève du domaine d’action des provinces, et elles sont compétentes pour régler les intérêts provinciaux.

 

Comme indiqué plus haut, le rôle, le profil institutionnel et les compétences des provinces relèvent actuellement des compétences et intérêts régionaux. Par conséquent, les compétences effectives des provinces sont définies dans la législation sectorielle ou dans la législation des régions sur les collectivités locales (bien que la plupart de cette législation vise à réglementer dans le détail les collectivités locales et fasse peu de référence aux provinces).

 

Traditionnellement, les provinces avaient de larges compétences dans plusieurs domaines, tels que l’enseignement, les infrastructures sociales et culturelles, la médecine préventive et la politique sociale, la protection de l’environnement, les routes et les voies navigables, le développement économique, le transport, les travaux publics, le logement, l’aménagement du territoire, l’autorisation d’installations industrielles et de locaux commerciaux et agricoles, etc.

 

Cependant, depuis la régionalisation du domaine des collectivités locales, les compétences effectives des provinces dépendent principalement de la situation et de la législation dans chacune des deux régions où elles existent, la Flandre et la Wallonie, car celles-ci peuvent attribuer des compétences aux provinces ou leur en retirer. Selon nos interlocuteurs, les provinces ont perdu beaucoup de compétences ces dernières années, en particulier en Flandre, et dans une moindre mesure en Wallonie.

 

Par exemple, en Flandre, les seules compétences que les provinces conservent actuellement sont celles liées à la gestion ou à l’aménagement des sols, ou celles relatives au territoire, comme la mobilité. Le reste des compétences provinciales traditionnelles ont été transférées à la région.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte l’article 4.1 de la Charte.

 

Article 4.2
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n'est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité


À la suite de la visite et des réunions tenues avec ses interlocuteurs, la délégation a également conclu queles collectivités locales (les communes) ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n’est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité.

 

Ce fait résulte de la manière dont l’article 41 de la Constitution a été généralement interprété et mis en œuvre dans la législation. En outre, cette interprétation est explicitement consacrée dans certaines dispositions des lois régionales sur les collectivités locales. Par exemple, le décret flamand sur l’administration locale dispose que « En vertu de l’article 41 de la Constitution, les communes sont compétentes pour les questions d’intérêt communal. À cette fin, elles peuvent prendre toutes les initiatives ».

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte l’article 4.2 de la Charte.

 

Article 4.3
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

L'exercice des responsabilités publiques doit, de façon générale, incomber, de préférence, aux autorités les plus proches des citoyens. L'attribution d'une responsabilité à une autre autorité doit tenir compte de l'ampleur et de la nature de la tâche et des exigences d'efficacité et d'économie.

 


Cet article de la Charte a souvent été interprété comme consacrant le principe de subsidiarité.

 

Le principe de subsidiarité n’est pas explicitement reconnu dans la Constitution, mais il est reconnu par la jurisprudence de la Cour constitutionnelle. En outre, le principe de subsidiarité a été explicitement consacré dans certaines lois régionales sur les collectivités locales. Par exemple, dans le cas de la Région flamande, le décret régional de 2017 prévoit qu’« en application du principe de subsidiarité, les communes exercent également les compétences qui leur sont conférées par ou en vertu de la loi ou du décret ».

 

Par ailleurs, on observe une tendance claire à la décentralisation du niveau régional vers le niveau local, en particulier dans certains domaines. Par conséquent, il est communément accepté que le principe de subsidiarité existe et qu’il est réellement mis en œuvre.

 

Il est admis, par exemple, que le principe de subsidiarité « explique » ou justifie le transfert de compétences du niveau des régions ou des communautés vers les communes. Hormis leurs compétences constitutionnelles, les communes ont également des compétences qui leur ont été conférées, en application du principe de subsidiarité, par ou en vertu de la loi ou du décret du Parlement flamand.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte l’article 4.3 de la Charte.

 

Article 4.4
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences confiées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et entières. Elles ne peuvent être mises en cause ou limitées par une autre autorité, centrale ou régionale, que dans le cadre de la loi.

 


Les compétences conférées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et entières. Le système belge repose sur des compétences « exclusives ». Les compétences « locales » sont clairement celles qui ont été conférées aux communes ou aux provinces par une loi, un décret ou une ordonnance régionale, ou que les communes ont décidé d’exercer en vertu de l’article 41 de la Constitution.

 

Cependant, ce principe général n’empêche pas que certaines compétences soient exercées de manière « coopérative » avec les autres niveaux d’administration publique « plus élevés », comme la région, la communauté, voire l’État fédéral, étant donné que les compétences peuvent être complexes et impliquer différentes entités ou niveaux de gouvernement, ou parce que l’ampleur des intérêts en jeu le demande.

 

Par exemple, les communautés constituent le principal collaborateur des communes dans tous les domaines culturels (bibliothèques, centres culturels, activités d’éducation permanente/continue, etc.). Dans ces domaines, les communes entretiennent des contacts fréquents avec les communautés. Dans la Communauté française, par exemple, cette coopération est formalisée par la signature d’une charte de collaboration, qui définit le rôle, les responsabilités et les obligations de chaque partie.

 

Le domaine de l’aménagement du territoire et du développement économique constitue un autre exemple de mise en œuvre commune de compétences concomitantes. À un moment donné, les communes doivent coopérer avec les régions et ces deux niveaux de gouvernement doivent exercer leurs compétences de manière coordonnée.

 

En outre, cette coopération et cette coordination peuvent être consacrées dans des instruments formels spécifiques, qui sont régis au niveau régional. Par exemple, dans la Région flamande, les autorités régionales ont conclu des accords politiques avec les communes, dans les domaines de la mobilité, de l’environnement, de la jeunesse, de la culture, de l’accueil extra-scolaire et de la politique urbaine, entre autres.

 

Un autre exemple est l’application des lois et règlements de police, par laquelle les communes veillent au respect des lois et règlements nationaux et régionaux. En général, il incombe au bourgmestre d’exercer ces compétences, mais il peut appliquer les lois et règlements émis par les niveaux supérieurs de gouvernement. En ce sens, l’article 63 du décret flamand de 2017 prévoit que « En dehors de ses compétences en matière d’exécution des lois […] de police, […] le bourgmestre est compétent pour l’exécution des lois, décrets et arrêtés d’exécution de l’autorité fédérale, de la Région ou de la Communauté, sauf si ladite compétence est confiée explicitement à un autre organe de la commune ».

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que les exigences de l’article 4.4 de la Charte sont respectées.

 

Article 4.5
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

En cas de délégation des pouvoirs par une autorité centrale ou régionale, les collectivités locales doivent jouir, autant qu'il est possible, de la liberté d'adapter leur exercice aux conditions locales.


Selon cette disposition, en cas de délégation des pouvoirs aux communes ou aux provinces par une autorité centrale ou régionale, les collectivités locales doivent jouir, autant qu’il est possible, de la liberté d’adapter leur exercice aux conditions locales. Il convient d’indiquer d’emblée qu’en pratique, cette disposition s’applique uniquement aux communes, étant donné que les régions transfèrent ou délèguent rarement des compétences ou pouvoirs aux provinces (c’est généralement l’inverse).

 

La délégation n’a eu connaissance d’aucune plainte spécifique concernant le respect de cette disposition en Belgique. Cependant, certains élus locaux ont formulé une plainte liée à ce sujet, dans le sens où, au fil des années, ils ont observé que les autorités supérieures géraient souvent les affaires publiques en légiférant beaucoup et en détail, privant ainsi les communes de la marge de manœuvre nécessaire lors de la mise en œuvre des politiques régionales et fédérales et de la possibilité de les adapter aux besoins des réalités locales. De même, l’association des communes de la Région wallonne (UVCW) a régulièrement demandé aux autorités régionales d’approuver une législation-cadre, plutôt qu’une législation trop détaillée.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que l’article 4.5 de la Charte est respecté.

 

Article 4.6
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, autant qu'il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décision pour toutes les questions qui les concernent directement.

 


L’analyse de l’article 4.6 mérite une analyse minutieuse, portant sur différents domaines et examinant la situation dans les trois régions (ainsi que dans la Communauté germanophone) et au niveau fédéral. Pour commencer, nous analyserons la situation au niveau national, puis au niveau régional.

 

Consultation des collectivités locales par le gouvernement fédéral

 

Il convient de souligner qu’il n’existe pas de dispositions constitutionnelles à ce sujet ni de lois fédérales spécifiques régissant cette question. Par conséquent, cet aspect de l’autonomie locale est géré exclusivement au niveau régional.

 

En ce qui concerne la consultation des collectivités locales par le gouvernement fédéral, les élus locaux ont formulé une plainte claire : il n’existe pas de mécanisme formel de consultation des collectivités locales par le gouvernement fédéral. En outre, il n’y a pas de concertation systématique. Selon les interlocuteurs locaux, il s’agit d’une lacune sérieuse, car il n’est pas rare que le gouvernement fédéral prenne des décisions ou initiatives qui ont un impact direct ou indirect dans le domaine des collectivités locales, telles que les négociations avec les syndicats de policiers et de pompiers, une question qui sera examinée plus en détail ci-après en lien avec l’article 9.2.

 

Consultation des collectivités locales par les régions

 

Cet aspect de l’autonomie locale est régi exclusivement au niveau régional, par des lois et règlements régionaux.

 

Situation dans la Région de Bruxelles-Capitale

 

Selon les élus locaux rencontrés par la délégation, dans la Région de Bruxelles-Capitale, il n’existe pas de procédure de consultation officielle et structurée entre le gouvernement régional et les collectivités locales (les communes et les centres publics d’aide sociale (CPAS)). La consultation (qui consiste souvent uniquement à communiquer des informations) est donc à la discrétion du gouvernement régional (dont dépendent la plupart des compétences qui concernent les communes). Cette consultation a parfois lieu, mais parfois non, et il semble ne pas y avoir de logique.

 

Les élus locaux de cette région ont indiqué qu’il existait également d’autres associations ou instances représentatives dans la région, telles que la Conférence des bourgmestres, la Fédération des secrétaires communaux et la Fédération des receveurs communaux. Cependant, la Conférence des bourgmestres n’est pas un forum de consultation efficace, selon certains interlocuteurs. Cet organe ne fonctionne pas correctement et devrait être remanié.

 

Cette situation est d’autant plus étrange que certains membres du parlement régional sont bourgmestres ou échevins. Il est donc d’autant plus important et nécessaire que le gouvernement régional rencontre et consulte régulièrement l’association « Brulocalis », qui représente les 19 communes de la Région de Bruxelles-Capitale.

 

Lors de la procédure de consultation, le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale a souligné que l’accord de gouvernement pour 2019-2024 prévoit la création d’une plateforme de consultation entre les Région et les communes sur toutes les questions ayant une incidence sur les intérêts ou la stratégie des communes. 

 

Situation dans la Région wallonne

 

La Région wallonne présente un tableau quelque peu différent. Selon le représentant des associations de collectivités locales (l’Union de villes et communes de Wallonie (ci-après « UVCW ») et la Fédération des centres publics d’aide sociale (CPAS)), ces associations sont reconnues comme des instances ayant une fonction consultative depuis l’adoption du décret régional du 15 février 2017. En conséquence, la Région wallonne soumet à ces associations différents documents juridiques et initiatives pour examen, lorsque ces documents et initiatives ont trait aux collectivités locales, à leur fonctionnement, à leur financement ou (plus important encore) à toute question ou domaine géré par les collectivités locales, tel que la protection de l’environnement, le logement ou les contrats publics.

 

Ces documents comprennent les projets de décrets régionaux (textes législatifs régionaux), les projets d’arrêtés du gouvernement régional et les projets de circulaires (règlements internes). Lorsque le gouvernement soumet ces documents, il demande l’avis de l’UVCW, qui doit présenter un rapport. Les associations susmentionnées analysent les projets de documents envoyés par le gouvernement et doivent émettre un avis raisonné dans un délai de 45 jours. Le rapport de l’UVCW est obligatoire. Par conséquent, il existe un mécanisme institutionnel positif de consultation obligatoire des collectivités locales, par l’intermédiaire de leurs associations représentatives, et l’article 4.6 est pleinement respecté dans cette région.

 

Les propositions législatives (émanant directement d’un groupe parlementaire) ne sont en principe pas couvertes par les dispositifs présentés ci-dessus. Cependant, il est fréquent que le Parlement wallon demande également l’avis de l’UVCW et de la Fédération des CPAS (notamment au moyen d’audiences spécifiques). Bien que cette forme de consultation ne soit pas systématique, les élus locaux ont indiqué à la délégation que cette pratique s’est développée ces dernières années.

 

Dans la Communauté française (Fédération Wallonie-Bruxelles), il n’existe pas de mécanisme semblable à celui présenté ci-dessus.

 

Situation dans la Région flamande

 

En Flandre, l’Association des villes et communes flamandes (VUVS) est largement consultée par le gouvernement régional lorsque celui-ci prévoit d’adopter des lois et règlements ayant des incidences sur les collectivités locales.

 

Les élus régionaux ont confirmé que, lorsqu’il élabore de nouveaux règlements sur des questions qui concernent les communes, le gouvernement flamand demande l’avis des collectivités locales sur ces sujets, souvent de manière formelle. Bien que cet avis ne soit pas obligatoire, en pratique, il fait généralement partie du processus de décision. Par exemple, lors de l’élaboration de règlements sur l’organisation et le fonctionnement des collectivités locales, l’Association des villes et communes flamandes (VVSG en néerlandais), Excello.net et les directeurs financiers locaux flamands (VLOFIN en néerlandais) sont consultés.

 

Communauté germanophone

 

La Communauté germanophone présente une situation assez particulière en ce qui concerne le respect de l’article 4.6 de la Charte. En effet, cette Communauté est assez petite sur le plan territorial, et le nombre de communes, neuf seulement, est très faible (Eupen étant la capitale et le siège des institutions de la Communauté, à savoir le parlement et le gouvernement). Par conséquent, il existe une très forte proximité, à la fois « physique » et institutionnelle, entre les niveaux d’administration locale et « supérieur ».

 

En pratique, les contacts et consultations avec les collectivités locales sont très denses et permanents (par exemple dans le cas de l’urbanisme), au point que les élus locaux de cette communauté ont indiqué à la délégation qu’ils étaient parfois consternés par le nombre de questions sur lesquelles les institutions de la communauté sollicitaient leur avis et par le grand nombre de réponses ou d’avis qu’ils devaient préparer, ce qui demandait du temps.

 

Les communes sont donc fréquemment consultées par la Communauté germanophone pour toutes les questions qui les concernent directement ou indirectement (par exemple, les plans d’investissement de la communauté ou la gestion de crise). Ce point a été confirmé par les représentants du gouvernement et du parlement de cette communauté, qui ont fourni quelques chiffres. Ils ont par exemple indiqué que pendant la pandémie de covid-19, les institutions de la communauté ont organisé 63 conférences, et que tous les bourgmestres y ont assisté. Il en va de même pour la gestion de la crise ukrainienne : le gouvernement discute les mesures à prendre et les procédures à adopter avec les collectivités locales.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs estiment que l’article 4.6 de la Charte est respecté en Flandre, dans la Région wallonne et dans la Communauté germanophone, mais pas dans la Région de Bruxelles-Capitale.

 

 

Article 5
Protection des limites territoriales des collectivités locales - Article ratifié

Pour toute modification des limites territoriales locales, les collectivités locales concernées doivent être consultées préalablement, éventuellement par voie de référendum là où la loi le permet.


Cet article soulève la question du nombre (et de la taille) des communes dans le pays, et des différents plans et stratégies gouvernementaux visant à modifier certaines caractéristiques de répartition territoriale. Pour commencer, l’article 7 de la Constitution belge dispose que « les limites de l’État, des provinces et des communes ne peuvent être changées ou rectifiées qu’en vertu d’une loi ». Du point de vue du droit constitutionnel comparatif, la Constitution belge est l’une des rares constitutions qui aborde explicitement ce sujet (la Constitution espagnole en est une autre).

 

Le nombre de communes a été considérablement réduit en Belgique depuis les années 70, à une époque où l’autonomie locale était encore une question d’intérêt fédéral. Ainsi, on comptait en 1977 2 359 communes, contre seulement 581 aujourd’hui. Actuellement, le domaine de l’autonomie locale est une responsabilité entièrement régionale (à l’exception notable de la Communauté germanophone), et chaque région a son propre avis sur la question et ses propres priorités.

 

Bien qu’il incombe à la région de décider ou d’approuver la fusion de deux communes ou plus sur son territoire, il n’en va pas de même pour les provinces. Les provinces ne peuvent pas être supprimées par une décision ou une loi des régions, étant donné qu’elles sont protégées par la Constitution.

 

En général, la grande tendance à la fusion des communes est désormais terminée, mais les régions souhaitent encore encourager les collectivités locales à fusionner. Bien sûr, leurs politiques sont conditionnées par leur taille et par leur nombre de communes. Par exemple, la Communauté germanophone compte seulement neuf communes, et il n’y a donc pas de nécessité, d’intention ou de plan visant à promouvoir la fusion de ces collectivités. La Région de Bruxelles-Capitale compte 19 communes très proches les unes des autres et qui occupent densément le territoire. Par conséquent, cette région n’a pas de plan ou de programme non plus concernant la fusion des communes. La fusion des communes est donc encore un sujet d’intérêt politique, et reste une possibilité réaliste uniquement dans les Régions flamande et wallonne.

 

En ce qui concerne la Flandre, elle comptait 500 communes à la fin des années 1970, mais en 2014 ce nombre avait chuté à seulement 308. Quoi qu’il en soit, le gouvernement régional est convaincu depuis longtemps que d’autres fusions des communes sont non seulement possibles, mais nécessaires. Le gouvernement régional souhaite avoir des communes moins nombreuses, mais plus grandes, plus fortes et plus efficaces. Dans le même esprit, les représentants du gouvernement régional ont indiqué que certaines communes (notamment les plus petites) rencontraient des difficultés pour fournir des services de qualité. D’autres ont du mal à recruter des employés spécialisés.

 

Pour ces raisons, entre autres, il existe depuis longtemps un programme visant à réduire le nombre de communes et à encourager leur fusion volontaire. Les chiffres sont éloquents sur le succès de ce programme, étant donné qu’en 2014, on comptait 360 communes en Flandre, contre seulement 300 actuellement. Lors de la procédure de consultation, le gouvernement flamand a souligné que la Région flamande soutient les fusions de communes au moyen de mesures d’incitation. Lorsque des communes souhaitent fusionner, le gouvernement flamand accorde une subvention globale de 500 euros par habitant, avec un maximum de 50 millions d’euros au total par processus de fusion. Le gouvernement flamand assume en outre une part de l’endettement des communes concernées. Ce chiffre ne semble toutefois pas satisfaire le gouvernement régional, dont les hauts représentants font état du nombre élevé de communes comptant peu d’habitants. C’est pourquoi le gouvernement flamand continue de promouvoir la fusion volontaire des communes (il reconnaît que les modèles à suivre sont le Danemark et les Pays-Bas). Des dizaines d’autres fusions seraient en cours d’examen. Selon les interlocuteurs de la délégation, 15 communes ont fait part de leur intérêt pour fusionner. Anvers et une commune voisine en font partie.

 

Le nombre, la taille et les caractéristiques territoriales des communes sont également un sujet de préoccupation dans la Région wallonne, et les hauts représentants du gouvernement ont indiqué que les communes de moins de 12 000 habitants rencontraient des difficultés pour fournir des services locaux de bonne qualité. La région a tenté d’alléger une partie de leur charge en procédant à une simplification administrative générale du système, mais la meilleure solution est un programme de fusions. Le gouvernement régional encourage donc la fusion volontaire des petites communes, afin d’obtenir des unités territoriales plus grandes.

 

Il existe en particulier une loi régionale (décret) qui prévoit des incitations pour les communes intéressées. Par exemple, lorsque deux communes voisines souhaitent fusionner, le gouvernement régional octroie une subvention globale de 500 euros par habitant aux deux communes qui fusionnent (avec un montant global maximum de 20 millions d’euros). En outre, le gouvernement régional assume également une partie de la dette des communes concernées. Cependant, il semble que très peu de communes aient décidé d’engager un processus de fusion, et très peu de fusions sont attendues, du moins dans un avenir proche.

 

Eu égard à l’article 5 de la Charte, il convient de souligner qu’en Flandre comme en Wallonie, les décisions concernant les fusions sont prises par les conseils communaux des deux collectivités locales concernées. Cependant, aucun référendum local n’est prévu ou organisé, ni en Flandre ni en Wallonie.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs estiment que la Belgique respecte pleinement l’article 5 de la Charte dans le sens où les fusions sont toujours réalisées avec l’accord des conseils communaux (et, surtout, à leur initiative), ce qui équivaut clairement à bien plus qu’une simple « consultation ». Cependant, il reste une marge d’amélioration potentielle, par l’organisation de référendums locaux dans les communes concernées.

 

Article 6.1
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Sans préjudice de dispositions plus générales créées par la loi, les collectivités locales doivent pouvoir définir elles mêmes les structures administratives internes dont elles entendent se doter, en vue de les adapter à leurs besoins spécifiques et afin de permettre une gestion efficace.


Comme indiqué plus haut, le domaine des collectivités locales a été complètement transféré aux régions, à la suite des différentes réformes de l’État. Cet aspect de l’autonomie locale est donc sous l’entière responsabilité des régions, et est exclusivement régi par les lois et règlements des trois régions (plus la Communauté germanophone pour ses neuf communes). Par conséquent, il peut y avoir certaines divergences dans les choix législatifs opérés par chaque région.

 

Au-delà de ce scénario constitutionnel, toutes les législations régionales sur les collectivités locales définissent un cadre ou une structure organisationnelle de base (présentés plus haut). Dans ce contexte, les différentes législations régionales permettent aux communes de définir elles-mêmes les structures administratives internes dont elles entendent se doter, en vue de les adapter à leurs besoins spécifiques et afin de permettre une gestion efficace. En règle générale, ces décisions organisationnelles doivent être adoptées par le conseil.

 

En Flandre, le décret de 2017 sur l’administration locale définit les compétences du conseil. Ces compétences comprennent la capacité à créer des conseils consultatifs et des structures de concertation (article 41.13), ainsi que la possibilité de créer des agences ou régies autonomes au sein de la structure communale, chargées de l’exécution d’activités spécifiques. Dans le même esprit, l’article 231 du décret régional prévoit qu’« une régie communale autonome est constituée par décision du conseil communal sur la base d’un rapport établi par le collège des bourgmestre et échevins. […] Le conseil communal fixe le statut de la régie communale autonome ».

 

Cependant, la délégation estime que ce texte législatif est extrêmement long (610 articles !) et très détaillé. Il régit de manière pratiquement exhaustive tous les aspects et éléments de la vie des communes et, en réalité, laisse peu de marge de manœuvre aux communes pour leur permettre d’adopter des décisions vraiment innovantes en matière d’organisation.

 

En Wallonie, des règles analogues s’appliquent. Par exemple, le conseil communal a le pouvoir d’adopter son règlement interne, conformément à l’article L1122-18 du Code de la démocratie locale et de la décentralisation, et en vertu de l’article L1122-34, il peut créer, en son sein, des commissions spécifiques qui ont pour mission de préparer les discussions du conseil. Enfin, le conseil peut également, en vertu de l’article L1122-35, instituer des conseils consultatifs (par « conseils consultatifs », il convient d’entendre « toute assemblée de personnes, quel que soit leur âge, chargée par le conseil communal de rendre un avis sur une ou plusieurs questions déterminées »).

 

Dans la Région de Bruxelles-Capitale, le conseil communal dispose d’un pouvoir organisationnel analogue. La loi régionale sur les collectivités locales (nouvelle loi communale) fournit différents exemples de ce pouvoir. Par exemple, en vertu de l’article 331 de cette loi, le conseil communal peut créer des « organes territoriaux intracommunaux » dans les communes de plus de 100 000 habitants.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte pleinement l’article 6.1 de la Charte.

 

Article 6.2
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Le statut du personnel des collectivités locales doit permettre un recrutement de qualité, fondé sur les principes du mérite et de la compétence; à cette fin, il doit réunir des conditions adéquates de formation, de rémunération et de perspectives de carrière.


Tout d’abord, il convient de décrire brièvement la structure des ressources humaines dans les collectivités locales belges. Cela permettra de mieux comprendre l’application de l’article 6.2 de la Charte, ainsi que certains éléments qui seront décrits plus loin, en connexion avec l’article 9.

 

Les collectivités locales disposent de différents types de personnel ; les principaux sont les « agents statutaires » ou fonctionnaires locaux, et les travailleurs ordinaires ou « agents contractuels », embauchés dans le cadre d’un contrat de travail. Ces deux types de personnel sont recrutés selon les règles administratives en vigueur, que les collectivités locales peuvent approuver elles-mêmes, sous le contrôle de l’autorité de tutelle (voir l’article 8 ci-après).

 

Bien que la règle générale dans l’administration publique belge soit que le personnel devrait être du « personnel statutaire » (ou des « fonctionnaires »), le fait est que, pour différentes raisons, les collectivités locales embauchent de plus en plus fréquemment des contractuels, au point que la règle générale est devenue l’exception. Actuellement, environ 70 % des employés des collectivités locales sont des agents contractuels, tandis que 30 % seulement sont des fonctionnaires. Ces pourcentages varient d’une région à l’autre. Ainsi, l’association wallonne UVCW a également indiqué que dans les collectivités locales de cette région, 75 % des membres du personnel étaient des contractuels, et que 25 % seulement étaient des fonctionnaires (personnel statutaire).

 

Par ailleurs, la législation sur les collectivités locales en vigueur demande aux communes d’assumer certaines fonctions, et de pourvoir des postes spécifiques. Dans les provinces, ces postes sont traditionnellement ceux de secrétaire (du conseil provincial) et de receveur. Dans le cas des communes, ces postes spéciaux sont ceux de secrétaire (du conseil communal) et de receveur. Cette obligation existe encore aujourd’hui et, en tout état de cause, les collectivités locales ont toujours plus de liberté pour assurer l’exercice de ces fonctions dans le cadre de leur mandat (en particulier dans la Région flamande et dans la Région de Bruxelles-Capitale).

 

En ce qui concerne la gestion quotidienne du personnel, les compétences des collectivités locales restent très vastes, à condition qu’elles respectent les limites imposées par la législation. Les collectivités locales recrutent librement les membres de leur personnel, gèrent leur carrière et peuvent également mettre fin à leurs fonctions. En l’occurrence, en Flandre, les communes et provinces peuvent nommer et congédier librement leur propre personnel. Elles disposent d’une autorité entière en tant qu’employeurs.

 

Les échelles de traitement sont déterminées par une décision du gouvernement flamand (2007) et les collectivités locales doivent s’y conformer. En outre, en tant qu’employeur, chaque commune peut assurer la formation et l’éducation de ses employés.

 

Lors du recrutement de nouveaux employés, la région peut imposer certains critères ou exigences, tels que l’obligation d’embaucher un certain pourcentage de personnes handicapées (comme dans la Région de Bruxelles-Capitale).

 

Malgré cette liberté générale, la délégation a entendu quelques plaintes à ce sujet. Ainsi, certains responsables locaux se sont plaints de ne pas avoir assez de liberté pour reconnaître et rémunérer les employés en cas de bonnes performances, en raison de la rigidité des règlements. Ils souhaiteraient avoir plus de latitude pour créer des incitations pour leurs employés et récompenser les bonnes performances.

 

D’autres élus locaux ont indiqué rencontrer des difficultés à embaucher du personnel local. Cela est parfois dû au profil spécialisé ou technique du poste. Dans d’autres cas, cela semble lié au fait que les candidats doivent avoir une bonne maîtrise de différentes langues pour travailler dans les collectivités locales.

 

Enfin, l’association wallonne (UVCW) a formulé la plainte selon laquelle actuellement, il est de plus en plus difficile d’attirer et (surtout) de retenir les talents parmi le personnel des collectivités locales. Elle a également indiqué que, en vertu des règlements régionaux actuels, les collectivités locales ne disposaient pas de l’autonomie nécessaire pour mettre en place un système d’incitations et de récompenses, afin de stimuler et récompenser les bonnes performances de leurs employés. 

 

Ces faiblesses du système actuel ont également été reconnues par de hauts responsables du gouvernement flamand. Ils ont assuré à la délégation qu’ils prévoyaient de modifier les règlements sur les collectivités locales afin de donner plus de liberté et de capacités aux communes pour gérer leur propre personnel.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte l’article 6.2 de la Charte, bien que des améliorations puissent être apportées (voir les recommandations).

 

 

Article 7.1
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Le statut des élus locaux doit assurer le libre exercice de leur mandat.


En vertu de cette disposition, le statut des élus locaux doit assurer le libre exercice de leur mandat. La délégation n’a eu connaissance d’aucune plainte spécifique concernant le respect de cette disposition en Belgique. Les élus locaux que la délégation a rencontrés ont affirmé qu’ils étaient libres d’exercer leur mandat, et qu’ils ne subissaient pas de pressions politiques ou d’influence indue des gouvernements des régions ou des communautés.

 

La seule plainte qu’ils ont formulée avait trait au fait que les bourgmestres sont de plus en plus la cible de discours de haine sur les réseaux sociaux ; à certains endroits, ils observent de l’intolérance ouverte, des expressions radicales, voir du harcèlement de la part des électeurs locaux. Cela découragerait apparemment certaines personnes de s’engager dans la vie politique locale. En tout état de cause, il s’agit d’une évolution sociologique qui dépasse le cadre de la Charte, bien que cette tendance soit regrettable.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que l’article 7.1 de la Charte est respecté.

 

Article 7.3
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Les fonctions et activités incompatibles avec le mandat d'élu local ne peuvent être fixées que par la loi ou par des principes juridiques fondamentaux.


En Belgique, les fonctions et activités incompatibles avec le mandat d’élu local ne peuvent être fixées que par la loi ou par des principes juridiques fondamentaux. Dans un souci de clarté, cette question sera présentée en distinguant plusieurs points :

 

Il est en principe possible pour un représentant local d’être en même temps membre de la Chambre des représentants du Parlement fédéral, car ce point ne figure pas parmi les conditions d’éligibilité à la Chambre des représentants, en vertu de l’article 64 de la Constitution.

 

La possibilité d’être en même temps membre d’une collectivité locale et membre des parlements ou institutions régionales est exclusivement déterminée par les lois et règlements régionaux, étant donné que, comme indiqué plus haut, il n’existe pas de législation fédérale nationale sur le statut des élus locaux. Dans le même esprit : a) en Flandre, un responsable politique local peut être bourgmestre ou échevin et membre du parlement régional ; b) dans la Région de Bruxelles-Capitale, une nouvelle loi empêchera de cumuler simultanément les mandats d’élu local et de membre du parlement régional, fédéral ou européen. Certains interlocuteurs ont estimé qu’il s’agissait d’une mauvaise nouvelle ; c) dans la Communauté germanophone, il est incompatible d’être en même temps bourgmestre et membre du parlement de la communauté.

 

Dans toute la Belgique, un conseiller communal peut être en même temps membre du conseil provincial, mais pas membre de l’organe exécutif (collège provincial, députation permanente).

 

Les élus locaux ont fait part d’une tendance nationale claire : il y a de moins en moins de bourgmestres siégeant aux parlements national/régionaux/communautaires.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que l’article 7.3 de la Charte est pleinement respecté en Belgique.

 

Article 7.2
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Il doit permettre la compensation financière adéquate des frais entraînés par l'exercice du mandat ainsi que, le cas échéant, la compensation financière des gains perdus ou une rémunération du travail accompli et une couverture sociale correspondante.


En vertu de cette disposition, les lois et règlements régissant le statut et l’exercice du mandat des élus locaux devraient permettre la compensation financière adéquate des frais entraînés par l’exercice du mandat ainsi que la compensation financière des gains perdus ou une rémunération du travail accompli et une couverture sociale correspondante.

 

Comme beaucoup d’autres aspects de l’autonomie locale belge, cette question n’est pas régie par des règles fédérales, mais par des lois et règlements régionaux, ainsi que par les règlements, les règlements internes et les décisions adoptés par les collectivités locales concernées. Comme d’habitude, il est pertinent de présenter les informations selon la région concernée :

 

  1.  Dans la Région wallonne, l’article L1122-7 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation prévoit que les conseillers communaux ne perçoivent aucun salaire, mais ils perçoivent un jeton de présence lorsqu’ils assistent aux réunions du conseil communal, des commissions et des sections. Le montant des jetons de présence est fixé par le conseil communal. Actuellement, ce montant est compris entre un minimum de 37,18 euros et un montant maximum égal au montant du jeton de présence perçu par les conseillers provinciaux. La commune peut majorer les jetons de présence du conseiller communal qui bénéficie d’autres traitements, pensions, indemnités ou allocations légaux ou réglementaires, d’un montant compensant la perte de revenus subie par l’intéressé. Le montant des jetons de présence, majoré du montant compensant la perte de revenus, ne peut jamais excéder le traitement d’un échevin d’une commune de 50 000 habitants.

 

  1. En Flandre, des règles analogues s’appliquent aux membres « ordinaires » du conseil communal : ils ne perçoivent pas de rémunération, mais uniquement des jetons de présence. En vertu du décret flamand sur l’administration locale, « dans les limites et conformément aux conditions d’attribution déterminées par le Gouvernement flamand, le conseil communal détermine le montant des jetons de présence et des autres rémunérations accordées dans le cadre du fonctionnement administratif de l’agence ». Par conséquent, les membres du conseil communal perçoivent une indemnité s’ils assistent à la séance plénière du conseil communal ou d’une de ses commissions.

 

Le bourgmestre et les échevins, en revanche, perçoivent un salaire ou une rémunération, qui dépend du nombre d’habitants de la commune. En général, la délégation n’a pas entendu de plaintes spécifiques concernant le niveau de rémunération des bourgmestres ou des membres à plein temps du collège, mais certains élus locaux ont indiqué qu’il était difficile de vivre uniquement du salaire de bourgmestre dans les communes de moins de 50 000 habitants.

 

Il convient également de mentionner la situation des membres des différentes structures de coopération intercommunale qui ont été créées par les collectivités locales (par exemple, les agences intercommunales chargées de la collecte et du traitement des déchets). En vertu d’une modification récente de la législation régionale, les membres des organes exécutifs de ces structures ne seront pas rémunérés pour leur travail à l’avenir, ce qui, selon l’Association des Villes et Communes flamandes (VUVS en néerlandais), a créé beaucoup d’agitation parmi les élus locaux. Par ailleurs, cette modification sera au détriment de la professionnalisation de la gestion locale.

 

Dans la Région de Bruxelles-Capitale, les mêmes règles générales s’appliquent (voir l’article 12 de la nouvelle loi communale). Au parlement de cette région, la délégation a été informée qu’une initiative juridique visant à augmenter les rémunérations des bourgmestres ainsi que les indemnités journalières était en cours. Concernant l’adéquation de la rémunération des bourgmestres, certains élus locaux ont indiqué qu’il était difficile de vivre uniquement du salaire de bourgmestre dans les communes de moins de 50 000 habitants, et que la plupart des membres des collèges locaux avaient un autre emploi à temps partiel.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte l’article 7.2 de la Charte.

 

 

Article 8.1
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif sur les collectivités locales ne peut être exercé que selon les formes et dans les cas prévus par la Constitution ou par la loi.


L’analyse du respect de l’article 8 de la Charte en Belgique repose sur la Constitution fédérale. En effet, elle contient une disposition fondamentale qui doit être soulignée à nouveau pour mieux comprendre la situation. Cette disposition est l’article 162, qui mentionne le sujet couvert par l’article 8 dans deux paragraphes différents :

 

Comme nous l’avons vu, la Constitution elle-même énonce des dispositions et principes pertinents sur le contrôle ou « contrôle administratif » des collectivités locales. Il ne s’agit pas ici du contrôle judiciaire des activités (réalisé par les juridictions ordinaires et administratives), mais du contrôle « administratif », à savoir le contrôle exercé par les niveaux « supérieurs » de gouvernement, à savoir l’État fédéral, les régions ou les communautés.

 

Ces deux dispositions fondamentales autorisent donc l’approbation des actes des collectivités locales (par une « administration supérieure ») et l’intervention de l’autorité de tutelle (ou du pouvoir législatif fédéral) pour exercer ce contrôle. Traditionnellement, l’autorité de tutelle était l’État, mais à la suite du transfert du domaine des collectivités locales aux régions, l’autorité de tutelle pour les communes et les provinces est désormais la région, et la Communauté germanophone pour les neuf communes qui se trouvent sur son territoire.

 

Le contenu et les limites précises de ces dispositions de l’article 162 de la Constitution ont été interprétés par la Cour constitutionnelle et par le Conseil d’État. La jurisprudence de ces deux juridictions supérieures complète la formulation de ces deux dispositions. Par conséquent, l’article 162 doit être analysé à la lumière de cette jurisprudence.

 

Outre cette disposition constitutionnelle, ce sont les différentes lois régionales sur les collectivités locales qui régissent les types de contrôle, ainsi que les mécanismes et procédures de mise en œuvre de ce contrôle. L’article 8.1 de la Charte n’aborde pas l’étendue et l’ampleur des contrôles sur les collectivités locales ou leur type, mais se concentre plutôt sur leur aspect formel, en précisant que ce contrôle ne peut être exercé que selon les formes et procédures et dans les cas prévus par la loi.

 

De ce point de vue, les rapporteurs estiment que l’article 8.1 de la Charte est respecté en Belgique.

 

Article 8.2
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Ratifié avec réserve(s)

Tout contrôle administratif des actes des collectivités locales ne doit normalement viser qu’à assurer le respect de la légalité et des principes constitutionnels. Le contrôle administratif peut, toutefois, comprendre un contrôle de l’opportunité exercé par des autorités de niveau supérieur en ce qui concerne les tâches dont l’exécution est déléguée aux collectivités locales.


 

Approche générale

 

Il importe tout d’abord de préciser que le Royaume de Belgique n’a pas inclus cette disposition parmi celles qu’il a acceptées au moment de la ratification. Par conséquent, il existe une réserve indue concernant l’article 8.2, qui n’est donc pas contraignant pour la Belgique. Cependant, dans un souci d’exhaustivité, il sera également analysé dans ce rapport.

 

Il est reconnu que, généralement, selon l’article 8.2. de la Charte, seul le contrôle de la légalité des activités et décisions adoptées par les collectivités locales est accepté. Selon le rapport explicatif de la Charte, « Le contrôle doit normalement se limiter à la question de la légalité des actes des collectivités locales et non de leur opportunité ».

 

Le contrôle de la légalité est bien entendu admis et proclamé dans le droit national, même au niveau constitutionnel (voir l’article 162 ci-dessus). Il peut s’agir d’un contrôle a priori (article 162, paragraphe 2), à savoir que la collectivité locale a besoin de l’approbation d’un niveau d’administration supérieur (l’autorité de tutelle, généralement la région) avant d’adopter une décision, un plan ou un règlement donné.

 

Il peut également s’agir d’un contrôleex post, ce qui signifie que, après que la collectivité locale a adopté un plan, décision ou règlement, l’autorité de tutelle peut le réviser, le modifier ou l’annuler, pour des motifs juridiques, de sa propre initiative (contrôleex officio) ou à la demande d’une tierce partie (un autre organe gouvernemental ou une personne intéressée).

 

Cette forme de contrôle est appelée « tutelle ordinaire » et est exercée par la région. 

 

Le contrôle de la légalité est admis par la Charte, et cet aspect de l’autonomie locale belge respecte pleinement les exigences de la Charte. En outre, lorsque la façon dont l’autorité de tutelle exerce le contrôle administratif ne satisfait pas la collectivité locale, celle-ci peut faire appel devant le Conseil d’État, et il appartiendra à cette assemblée supérieure de déterminer si la région, dans l’exercice de son pouvoir de contrôle, a respecté le contenu et les limites définis dans la Constitution et dans les lois et règlements en vigueur.

 

D’autre part, les élus locaux que la délégation a rencontrés ont indiqué que ce contrôle était très peu fréquent, que leurs plans et règlements étaient rarement modifiés ou rejetés par les régions, et que lorsque cela arrivait, c’était uniquement pour des motifs juridiques. Dans le cas de la Flandre, la délégation a été informée que ce contrôle administratif avait uniquement lieu lorsqu’une plainte était déposée par une personne ou une société concernée. En outre, un contrôle ex officio peut cependant être effectué, bien que dans la pratique la mesure ne soit habituellement prise qu’après une plainte. Dans le cas de la Région de Bruxelles-Capitale, la délégation a été informée qu’il y avait eu un seul cas de contrôle administratif aboutissant à la suspension d’une décision locale ces dix dernières années.

 

Toutefois, il convient d’analyser un autre aspect du système belge, le contrôle de l’opportunité.

 

Contrôle administratif « spécifique » concernant les tâches déléguées

 

La deuxième partie de l’article 8.2. de la Charte prévoie que « le contrôle administratif peut, toutefois, comprendre un contrôle de l’opportunité exercé par des autorités de niveau supérieur en ce qui concerne les tâches dont l’exécution est déléguée aux collectivités locales ».Cette forme de contrôle est donc admise par la Charte. La différence avec le type de contrôle précédent est qu’il ne porte pas sur les « compétences propres » des collectivités locales, mais sur les missions ou compétences qui sont « déléguées » par d’autres niveaux d’administration. En Belgique, cette situation existe également, et est généralement appelée « tutelle spécifique ».

 

Contrairement à la tutelle ordinaire, cette forme de tutelle peut être exercée par l’État fédéral, les communautés ou les régions, en fonction du niveau de gouvernement local qui a délégué les compétences aux collectivités locales. Cette tutelle est strictement limitée au contrôle de la manière dont les organes locaux mettent en œuvre les compétences qui leur ont été attribuées par lesdits gouvernements territoriaux « supérieurs ».

 

Nous citerons ici un spécialiste local, qui fournit différents exemples de ce contrôle :

 

a. En vertu de la loi, les régions sont les organes compétents en matière de politiques urbaines et de protection de l’environnement. Une région donnée peut décider d’octroyer des compétences spécifiques dans ce domaine aux communes qui se trouvent dans la région. En cette capacité, la région peut superviser ou contrôler la façon dont les communes exercent les compétences reçues du gouvernement régional.

 

b. Les communautés, qui sont compétentes dans le domaine de l’éducation, peuvent exercer un certain contrôle sur la façon dont les collectivités locales exercent leurs compétences dans ce domaine, indépendamment du fait que les communautés sont les principaux subventionneurs des programmes éducatifs.

 

c. Enfin, les autorités fédérales peuvent contrôler la façon dont les collectivités locales exercent leurs compétences dans le domaine de la sécurité, de la délinquance sur la voie publique, etc.

 

Contrôle de l’opportunité

 

Comme nous l’avons vu plus haut, l’article 162 de la Constitution belge n’interdit pas le contrôle de l’opportunité en ce qui concerne les décisions et activités des collectivités locales, mais le reconnaît clairement lorsque ce contrôle prévoit l’intervention de l’autorité de tutelle « pour empêcher que la loi ne soit violée ou l’intérêt général blessé ». En effet, le fait que le système belge de collectivités locales continue encore à admettre le contrôle de l’opportunité et que le contrôle administratif vise à vérifier que l’activité des collectivités locales est en conformité non seulement avec la loi, mais aussi avec l’intérêt général, est une caractéristique bien connue de ce système. Il s’agit d’un principe fondamental, consacré dans la Constitution depuis 1831, et cette caractéristique explique pourquoi la Belgique a formulé une réserve à ce sujet concernant l’article 8.2 de la Charte.

 

Toutefois, le contrôle de conformité avec « l’intérêt général » ne permet pas pour autant un contrôle sans discernement de l’opportunité pure. D’une part, ce contrôle est en pratique très rare, et d’autre part, les collectivités locales disposent de moyens juridiques pour défendre leur autonomie en déposant un appel devant la juridiction administrative, afin de vérifier que la région a bien respecté les éléments constitutionnels fondamentaux. Dans le même esprit, et comme l’a écrit un spécialiste local, « le Conseil d’État a déclaré que l’intérêt général était en concept objectif qui ne saurait être confondu avec le simple “bon vouloir” de l’autorité de tutelle. Pour ces raisons, lorsque l’autorité de tutelle régionale, fédérale ou communautaire intervient sur une action ou une décision d’une collectivité locale donnée, elle doit motiver ces interventions de manière minutieuse et exhaustive, selon les critères de l’intérêt général ».

 

En tout état de cause, il semble que la tutelle administrative sur les collectivités locales ne donne pas lieu à des débats substantiels ou particuliers concernant la compatibilité de la tutelle et de l’autonomie locale en Belgique. On peut affirmer que le principe de tutelle sur les collectivités locales n’a pratiquement pas évolué depuis 1831 et qu’il est largement accepté dans les coutumes institutionnelles de la Belgique.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique ne respecte pas encore les exigences de l’article 8.2 de la Charte, bien que cette disposition ne soit pas contraignante pour la Belgique.

 

Article 8.3
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Le contrôle administratif des collectivités locales doit être exercé dans le respect d’une proportionnalité entre l’ampleur de l’intervention de l’autorité de contrôle et l’importance des intérêts qu’elle entend préserver.


Comme indiqué plus haut, l’exercice du contrôle administratif sur les collectivités locales n’est pas une compétence sans limites. Il doit respecter des règles, procédures et principes, dont certains relèvent de la Constitution (à savoir les concepts d’autonomie locale et de proportionnalité).

 

D’autre part, dans le cadre du contrôle administratif, les collectivités locales disposent de moyens juridiques pour défendre leur autonomie en déposant un appel devant la juridiction administrative, afin de vérifier que ce contrôle a bien respecté les éléments constitutionnels fondamentaux. Le Conseil d’État contrôle le respect de cette disposition et est l’organe qui garantit que le principe de proportionnalité est respecté. Quelques exemples de cette fonction du Conseil d’État seront présentés plus loin, lors de l’examen de l’article 9.

 

Cependant, il convient de formuler ici une remarque importante concernant le système de nomination des bourgmestres en vigueur en Flandre, qui a été présenté en détail plus haut. Dans sa Recommandation 409 (2017), le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux a exprimé sa préoccupation au sujet de la législation flamande, en vertu de laquelle le bourgmestre proposé par le conseil communal doit être validé par le gouvernement flamand, alors que le bourgmestre proposé est membre du conseil communal, qui a été préalablement élu au suffrage direct par les citoyens. Le Congrès a ajouté que cette forme de validation pourrait constituer un contrôle disproportionné des collectivités locales par le gouvernement régional flamand et une violation de l’esprit du préambule et de l’article 8.3 de la Charte. En outre, le Congrès a recommandé que les autorités belges compétentes suppriment le système de nomination par le ministre flamand de l’Intérieur. Comme nous l’avons vu plus haut, au moment de cette visite de suivi, la législation restait la même, et, même si de nouvelles dispositions juridiques entreront en vigueur en 2024 lors des prochaines élections locales, l’élément principal de la loi reste inchangé. Le gouvernement régional gardera le pouvoir d’accepter ou de refuser la nomination du bourgmestre proposé par le conseil. Par conséquent, pour des raisons de cohérence, les rapporteurs considèrent que cette situation est contraire à l’article 8.3 de la Charte.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte les exigences de l’article 8.3 de la Charte, mais qu’il existe une violation de cette disposition en Flandre.

 

Article 9.8
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Afin de financer leurs dépenses d'investissement, les collectivités locales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché national des capitaux.


Les communes peuvent avoir accès à l’emprunt comme source supplémentaire de revenus lorsque leurs parts des dotations régionales et leurs propres revenus sont insuffisants. Les investissements dans les infrastructures locales peuvent notamment être financés par l’emprunt. La règle d’or est que toutes ces opérations doivent être décidées par le conseil local, au niveau communal ou provincial.

 

Les communes peuvent s’adresser au secteur privé ou demander un crédit à une organisation publique ou quasi-publique. Par exemple, dans la Région wallonne, il existe une autorité publique spécifique, le Centre régional d’aide aux communes (CRAC). Les communes ou provinces confrontées à un déficit structurel peuvent obtenir en crédit extraordinaire d’aide à long terme par l’intermédiaire du compte CRAC sous certaines conditions. En fonction du type d’aide, les conditions du crédit peuvent varier.

 

La législation régionale définit les différents critères, conditions et limites éventuelles que les opérations d’emprunt locales doivent respecter, ainsi que les types de collectivités locales pouvant recourir à l’emprunt (par exemple, la Région wallonne reconnaît également la possibilité de contracter des emprunts aux autorités et organes créés en vue de la coopération intercommunale).

 

Les gouvernements régionaux surveillent de près la dette des collectivités locales et leurs opérations d’emprunt, en veillant à ce qu’elles respectent les lois et règlements régionaux en la matière. La législation régionale peut prévoir que la décision d’emprunt de la commune soit soumise à l’approbation du ministre régional, lorsque l’opération dépasse certaines limites légales.

 

Les régions peuvent aussi créer des mécanismes financiers spécifiques pour aider les communes ayant des besoins particuliers à remplir leurs devoirs et obligations, comprenant éventuellement la possibilité de contracter un emprunt. Par exemple, fin 2021, la Région wallonne a approuvé un plan spécifique appelé « Plan Oxygène ». Concrètement, à partir de l’exercice 2022, et afin d’équilibrer leur budget, les communes pourront emprunter pendant cinq ans pour faire face à l’augmentation des dépenses relatives au coût des pensions ou aux domaines de la police et des services d’urgence. La région, par l’intermédiaire du CRAC, prend en charge le paiement des intérêts ainsi que, pour certaines communes, 15 % du montant emprunté. Les communes vont donc s’endetter afin de financer les pensions du personnel, la police et les services d’urgence ainsi que le revenu d’intégration sociale (RIS). On estime que ces dépenses sont toutes dues à des motifs structurels, et qu’elles ne devraient qu’augmenter avec le temps.

 

Outre ce tableau général, la délégation n’a eu connaissance d’aucune plainte des élus locaux ou de leurs associations concernant cette source de revenus des communes.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte l’article 9.8 de la Charte.

 

Article 9.7
Les ressources financières des collectivités locales - Non ratifié

Dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L'octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence.


Il convient tout d’abord de rappeler que la Belgique a également introduit une réserve « indue » à l’article 9.7 et que, par conséquent, cette disposition n’est pas contraignante pour la Belgique. Cependant, dans un souci d’exhaustivité, nous analyserons la situation relative à cette disposition.

 

Dotations globales

 

En Belgique, la dotation la plus importante dont bénéficient les communes est une dotation globale, octroyée par la région correspondante. Comme indiqué plus haut, le financement des collectivités locales est une responsabilité régionale. Cela signifie que les régions sont responsables de la plupart des questions relatives aux finances locales, et sont également chargées de veiller à ce que les finances des collectivités locales soient suffisantes, proportionnelles aux tâches et aux compétences qui leur sont attribuées et suffisamment diverses et saines, etc.

 

Le nombre, le type et les caractéristiques des transferts que les régions octroient à leurs collectivités locales dépendent de chaque région, et il n’existe pas de loi fédérale sur cette question. En général, chaque région dispose d’un « fonds local », c’est-à-dire d’une dotation globale qui est distribuée et transférée chaque année depuis le budget de la région vers les budgets des différentes collectivités locales présentes sur son territoire. Les élus régionaux que la délégation a rencontrés ont assuré que les collectivités locales étaient libres de dépenser ces sommes comme elles le souhaitaient, bien qu’elles les utilisent généralement pour couvrir leurs dépenses opérationnelles. Les fonds des communes sont essentiels pour stabiliser les finances locales et assurer l’autonomie locale.

 

Le montant de ce fond principal est actualisé et augmenté chaque année en fonction de l’inflation. En plus de cette mise à jour générale, une région peut décider d’ajouter un certain pourcentage sous forme de « bonus » ou d’amélioration.

 

Dans la Région flamande, les élus régionaux ont indiqué que le fonds des communes disposait d’un montant d’environ 3 milliards d’euros et qu’il avait été augmenté de 3,5 % chaque année, soit un taux le plus souvent bien supérieur à celui de l’inflation. Hormis ce fonds « principal », le gouvernement flamand a créé de nouvelles dotations générales, dont une dotation versée en fonction des contributions que les collectivités locales doivent payer pour honorer les coûts des pensions (qui passera de 130 millions d’euros en 2020 à 367 millions d’euros en 2026) et une dotation versée en fonction du nombre d’hectares d’espaces verts dont disposent les communes (qui passera de 63 millions d’euros en 2021 à 127 millions d’euros en 2025).

 

Au total, les représentants du gouvernement régional ont indiqué que les contributions financières de la région en faveur des communes s’élèveraient à environ 20 milliards d’euros pour le mandat 2019-2024 (contre 15 milliards d’euros pour le mandat 2014-2019, selon leurs chiffres).

 

Dans la Région de Bruxelles-Capitale, le financement régional général s’élève à environ 27 % des revenus totaux des communes. Les élus locaux ont affirmé que le fonds local régional avait été augmenté de 12 % en 2017 et qu’il avait depuis été réévalué de 2 % par an.

 

Dans le cas de la Région wallonne, la dotation régionale de base (appelée « fonds des communes ») constitue une source de revenus majeure pour les 253 communes se trouvant dans la région. En 2021, le montant global de ce fonds s’élevait à environ 1,3 milliard d’euros. En général, cette dotation représente environ 25 % des recettes ordinaires des communes. Le montant global de ce fonds est actualisé chaque année en fonction du taux d’inflation, majoré de 1 % (il est indexé), et ce dernier aspect est très apprécié de l’association locale. Par ailleurs, la Région wallonne inclut également dans le fonds régional un montant global d’environ 11,2 millions d’euros. Ce montant est lié à la taxe que les collectivités locales pouvaient imposer auparavant sur les antennes de téléphonie mobile (supprimée en 2014). Par conséquent, le gouvernement régional compense en quelque sorte les collectivités locales pour la perte de ce revenu grâce à ce montant supplémentaire.

 

Toujours dans cette région, il existe un fonds distinct et spécifique attribué aux communes germanophones (fonds des communes germanophones). En 2021, ce fonds était doté d’environ 22,7 millions d’euros.

 

Une plainte générale formulée par les élus locaux est que le montant de la part du fonds régional qu’une commune donnée reçoit à la fin de l’année ne correspond pas toujours au montant calculé par cette collectivité locale au début de l’année, car la région octroie parfois une somme équivalente à 11 mois, et d’autres fois à 13 mois.

 

Hormis cette dotation principale, chaque région peut disposer de fonds plus restreints et sectoriels. Par exemple, jusqu’en 2014, la Région flamande comptait à un moment jusqu’à huit fonds différents (fonds sectoriels), qui ont aujourd’hui été fusionnés en un seul fonds local (bien qu’il existe encore un fonds « rural »).

 

La structure de ces finances locales est plus ou moins la même dans les trois régions : par exemple, dans les collectivités locales flamandes, environ 40 % des recettes proviennent des recettes fiscales, et 60 % proviennent des recettes non fiscales, principalement les fonds et dotations attribués par les régions.

 

Subventions

 

Les collectivités locales peuvent également recevoir des « subventions », qui sont attribuées par les administrations « supérieures » (États, régions ou communautés). Les autres niveaux de pouvoir peuvent certainement prendre l’initiative de financer directement, dans certaines circonstances, des travaux d’investissement dont les collectivités locales profiteront et qu’elles géreront à l’avenir.

 

Contrairement aux dotations globales, que les communes peuvent dépenser comme elles le souhaitent (à condition que les dépenses correspondent au budget local ordinaire), les subventions sont octroyées à des fins spécifiques, qui supposent généralement un investissement dans la communauté locale (par exemple, construction, entretien ou amélioration de la voirie locale). Cependant, il ne s’agit pas d’une règle absolue, car la région peut décider d’instaurer une subvention pour aider les communes à financer des dépenses opérationnelles exceptionnelles liées à des situations de crise.

 

Ce type de subvention peut être assuré par chacun des différents niveaux de pouvoir (niveau fédéral, État, régions, communautés) selon leurs compétences et pouvoirs respectifs. Les subventions sont généralement octroyées par les régions, bien qu’en pratique elles puissent provenir d’autres administrations, en fonction du projet concerné. Par exemple, la Communauté française peut subventionner la construction d’une bibliothèque située dans la Région wallonne ou dans la Région de Bruxelles-Capitale, et la Communauté germanophone peut faire de même dans les neuf communes germanophones.

 

L’État peut également subventionner des initiatives locales. Certains fonds fédéraux investis dans les communes de la Région de Bruxelles-Capitale pour soutenir le rôle de capitale du pays que cette région est amenée à assumer sont un bon exemple de ce type de financement.

 

Les neuf communes situées dans la Communauté germanophone constituent un cas à part : elles peuvent demander des subventions à la Région wallonne ou à la Communauté germanophone. Par exemple, cette Communauté dispose d’un fonds spécifique pour la construction et l’amélioration d’écoles. Parfois, la construction d’un projet donné nécessite des subventions de la Région wallonne et de la Communauté germanophone : c’est le cas pour une piste cyclable, car ce projet relève de la compétence des deux gouvernements : les routes (Région wallonne) et la mobilité (Communauté germanophone).

 

L’aide financière apportée par la région aux communes peut également prendre la forme de subventions dans le cas de situations d’urgence. Par exemple, à la suite des inondations qui se sont produites dans le pays en septembre 2021, la Communauté germanophone a apporté une aide aux neuf communes sous la forme d’une dotation budgétaire dédiée d’un montant de 30 millions d’euros. En Flandre, le gouvernement régional a créé plusieurs subventions ad hoc destinées aux collectivités locales pour les aider à couvrir les coûts supplémentaires engendrés par la crise de la covid-19 et la crise ukrainienne.

 

Les différents fonds structurels de l’UE peuvent représenter une autre source potentiellement importante de subventions, octroyées dans le cadre de la politique régionale de l’UE.

 

En ce qui concerne l’analyse de l’article 9.7, la délégation n’a en général pas eu connaissance de plaintes notables. Il semble que les communes disposent d’une grande liberté pour dépenser les sommes qu’elles reçoivent des dotations globales régionales.

 

Par conséquent, les rapporteurs estiment que la Belgique respecte les exigences de l’article 9.7 de la Charte, bien que cette disposition ne soit pas contraignante pour le pays.

 

Article 9.6
Les ressources financières des collectivités locales - Non ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, d'une manière appropriée, sur les modalités de l'attribution à celles ci des ressources redistribuées.


Il convient tout d’abord de rappeler que la Belgique a introduit une réserve « indue » à l’article 9.6 également et que, par conséquent, cette disposition n’est pas contraignante pour la Belgique. Cependant, dans un souci d’exhaustivité, nous analyserons également la situation relative à cette disposition.

 

Il est généralement reconnu que cette disposition de la Charte n’est pas respectée en Belgique et qu’il n’existe pas de plans ou d’initiatives pour changer la situation. En général, les collectivités ne sont pas consultées, d’une manière appropriée, sur les modalités de l’attribution à celles-ci des ressources redistribuées. Ce point est ressorti de manière très claire pendant les différentes réunions organisées par la délégation. Cette situation prévalait au moment de la ratification de la Charte, et l’article 9.6 ne pouvait donc pas être ratifié par la Belgique. Malheureusement, la situation reste plus ou moins la même.

 

Les élus locaux se sont plaints d’exemples fréquents dans lesquels le niveau fédéral discute ou adopte des décisions et des lois sur des questions qui concernent directement ou indirectement les finances des collectivités locales, sans que celles-ci soient consultées au préalable. Ces cas ont été présentés plus haut.

 

Hormis la question de la négociation des salaires de plusieurs fonctionnaires qui travaillent au niveau local et sont payés par les collectivités locales (décrite plus haut), les élus locaux ont souligné que lorsque le gouvernement réalise une réforme fiscale (par exemple, un programme de réduction des impôts), cette réforme a en fin de compte une incidence significative sur les finances des collectivités locales, étant donné qu’une part importante de leurs recettes provient de taxes additionnelles aux taxes nationales, telles que le précompte immobilier. Non seulement les collectivités locales ne sont pas consultées, mais elles ne reçoivent pas de compensation pour ces réductions.

 

Par conséquent, les rapporteurs estiment que la Belgique ne respecte pas les exigences de l’article 9.6 de la Charte, bien que cette disposition ne soit pas contraignante pour le pays.

 

Article 9.5
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

La protection des collectivités locales financièrement plus faibles appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou des mesures équivalentes destinées à corriger les effets de la répartition inégale des sources potentielles de financement ainsi que des charges qui leur incombent. De telles procédures ou mesures ne doivent pas réduire la liberté d'option des collectivités locales dans leur propre domaine de responsabilité.


La péréquation fiscale entre les collectivités locales, au sens de l’article 9.5 de la Charte, n’est pas inconnue du système belge. Là encore, cet aspect est assuré et géré par les régions elles-mêmes, et non par l’État. Par conséquent, des instruments de péréquation financière sont établis et mis en œuvre dans les trois régions.

 

Ainsi, dans la Région de Bruxelles-Capitale, il existe un fonds spécifique appelé « Dotation aux communes », au moyen duquel la région s’efforce de compenser et de redistribuer les moyens financiers entre les communes les plus pauvres. Ce mécanisme de péréquation est réparti entre les communes selon de multiples critères, tels que le nombre de crèches, le taux de chômage ou la densité de population. Selon les dirigeants régionaux, le système actuel utilise des critères trop nombreux et trop complexes. Ils ont informé la délégation qu’ils travaillaient actuellement à la simplification du système actuel et au renforcement du système de péréquation budgétaire.

 

Dans le cas de la Région flamande, il existe un fonds spécifique doté de 3,8 milliards d’euros, qui est spécifiquement utilisé pour réaliser la péréquation budgétaire entre les communes flamandes. Les sommes provenant de ce fonds sont distribuées aux différentes communes selon une douzaine de critères techniques. Les communes pauvres et rurales reçoivent en conséquence plus d’argent que les autres.

 

Dans la Région wallonne, il existe une dotation spécifique appelée « dotation Péréquation fiscale ». Elle introduit une certaine solidarité dans le fonds régional général en permettant d’accorder des dotations supplémentaires aux communes dont le potentiel fiscal est faible.Cette dotation est constituée de deux tranches, l’une de 22 % liée à la taxe additionnelle à l’impôt des personnes physiques et l’autre de 8 % liée aux centimes additionnels au précompte immobilier. Ce fonds supplémentaire redistribue les sommes parmi les communes dont le potentiel fiscal est inférieur au potentiel fiscal général de la région pour un exercice donné. Le poids de chaque commune dans la répartition de ce fonds supplémentaire est établi selon une formule qui prend en compte plusieurs critères. En ce qui concerne la tranche de péréquation liée au précompte immobilier, elle est répartie parmi les communes dont le potentiel fiscal est inférieur au potentiel fiscal moyen de la région pour un exercice donné. Le montant spécifique octroyé à chaque commune est également établi selon une formule qui prend en compte plusieurs critères.

 

Toujours dans cette région, il existe une dotation supplémentaire destinée aux communes et visant la péréquation. Il s’agit de la dotation « Densité de population ». Cette dotation spécifique vise à compenser les dépenses encourues par certaines communes en raison de leur faible densité de population, par exemple pour l’entretien d’un vaste réseau routier. Cette dotation est uniquement accessible aux communes dont la densité de population est inférieure à la densité de population de la Région wallonne (calculée selon le nombre d’habitants au kilomètre carré et la superficie de la commune en hectares). La part que chaque commune reçoit est déterminée selon une formule qui prend en compte plusieurs critères.

 

Enfin, dans la Communauté germanophone, le nombre moins important de communes et la proximité avec l’administration « supérieure » permettent à la communauté de corriger directement les déséquilibres fiscaux parmi les neuf communes présentes sur ce territoire.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte l’article 9.5 de la Charte.

 

Article 9.3
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d’impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.


Comme indiqué plus haut, la fiscalité locale est une source de revenus importante pour les communes belges. Il existe deux types de fiscalité locale : a) les taxes additionnelles locales sur les impôts levés par l’État ou les régions. Dans ce cas, un pourcentage est ajouté à celui de l’État ou de la région. La taxe foncière en est un exemple ; b) les impôts « locaux » autonomes, définis et mis en œuvre par les communes de leur propre initiative. Ces deux types d’impôts doivent être examinés séparément. Outre ces deux types d’impôts locaux, les collectivités locales perçoivent aussi des redevances pour des services spécifiques aux citoyens.

 

« Taxes additionnelles » locales sur les impôts

 

Elles constituent de loin la principale source de recettes fiscales des collectivités locales. Il s’agit en réalité de « suppléments » ajoutés à un impôt régional ou national.

 

L’existence de l’impôt de base est indépendante des autorités municipales, qui ne définissent en aucune manière ce type de taxes. Les collectivités locales ne collectent pas non plus ces impôts, car ils sont recouvrés par la région ou l’État, qui verse ensuite la « part du gâteau » qui revient à chaque commune. Les collectivités locales disposent toutefois d’une marge de décision, étant donné qu’elles sont libres de déterminer le montant ou le pourcentage de ces taxes additionnelles. Il existe deux principaux types de taxes additionnelles locales, que nous présenterons l’une après l’autre. 

 

Les centimes additionnels au Précompte immobilier (Onroerende Voorheffing). Tous les propriétaires de biens immobiliers doivent payer une taxe annuelle. Le montant de cette taxe est calculé en fonction de la valeur locative annuelle présumée (revenu cadastral/kadastraal inkomen) attribuée au bien par les collectivités locales. Il varie selon la région et la commune où se trouve le bien. Dans la Région flamande, la taxe s’élève généralement à 3,97 % de la valeur locative annuelle ; dans la Région de Bruxelles-Capitale, elle s’élève à 2,25 %, et dans la Région wallonne, à environ 1,25 %. En sus de ce pourcentage, les centimes additionnels communaux augmentent le taux effectif, qui s’élève entre 18 % et 50 % ou plus, en fonction de la commune où se situe le bien.

 

Les centimes additionnels au précompte immobilier constituent de loin la plus importante source de recettes budgétaires des communes (en Flandre, ils représentent presque 45 % de l’ensemble des recettes budgétaires locales).

 

Les communes (ainsi que les régions) peuvent imposer des taxes additionnelles à l’impôt des personnes physiques national. La commune est libre de déterminer le taux de la taxe additionnelle, dans les limites d’une fourchette définissant un minimum et un maximum. Les taux varient de 0 % à 8,5 %, et le taux moyen se situe entre 4 % et 7 % (7,5 % en Flandre). En général, les recettes issues de ces deux taxes additionnelles représentent environ 85 % de l’ensemble des recettes fiscales des communes.

 

Les associations de collectivités locales ont formulé différentes plaintes concernant le système actuel de taxes additionnelles locales aux impôts nationaux ou régionaux : premièrement, les recettes varient d’une année à l’autre, ce qui les rend instables ; deuxièmement, les administrations « supérieures » peuvent prendre des décisions de politique économique générale telles que des allègements fiscaux modifiant les taux d’imposition ou décident de réductions ou d’exemptions d’impôts. Ces décisions ont un impact ultérieur clair sur les recettes locales, étant donné que la part des impôts revenant aux collectivités locales est réduite. Cependant, les collectivités locales ne sont pas impliquées lors de l’adoption de ces décisions, et ne sont même pas consultées à ce sujet. Troisièmement, elles ont enregistré une baisse considérable des recettes due à la pandémie de covid-19 et à la crise qui s’est ensuivie.

 

Impôts locaux « propres » ou véritables

 

En Belgique, les communes disposent d’un large pouvoir d’imposition. Elles peuvent percevoir des taxes sur tout acte ou événement local, à condition que les autorités supérieures n’aient imposé aucune restriction les concernant. La décision de lever un impôt est prise par le conseil municipal. Ces dispositions sont contenues dans la Constitution belge, selon laquelle : « aucune charge, aucune imposition ne peut être établie par l’agglomération, par la fédération de communes et par la commune que par une décision de leur conseil ». La compétence relative à ces décisions d’imposition appartient au conseil.

 

Parmi les impôts locaux les plus fréquents perçus par les communes, figure la taxe sur les résidences secondaires. De nombreuses communes ont décidé de prélever cette taxe, qui concerne les maisons qui ne constituent pas la résidence principale ou permanente de personnes physiques. En général, les personnes qui possèdent une résidence secondaire (en plus de leur propre résidence principale ou permanente) doivent payer une taxe annuelle. La taxe payée varie selon la commune et la région, en fonction de l’importance touristique de l’endroit où se situe la résidence secondaire.

 

En outre, les communes peuvent percevoir des taxes environnementales, telles que des taxes sur la collecte des déchets (taxe directe ou indirecte sur l’achat de sacs poubelle) ou sur les activités nuisibles à l’environnement.

 

Les communes peuvent également percevoir des taxes sur les commerces de nuit, ou sur les bâtiments abandonnés. Par exemple, dans le cas de la taxe sur les commerces de nuit, le montant de la taxe (au moins en Flandre) va de 2 000 à 3 000 euros, en fonction de la superficie occupée par l’entreprise.

 

Comme on l’a vu, le pouvoir fiscal général dont disposent les communes peut être régi ou limité par des lois et règlements fédéraux ou régionaux. La manière dont les régions interfèrent avec l’autonomie budgétaire des communes varie selon les régions. Par exemple, dans la Région wallonne, il existe une nomenclature de domaines ou d’événements taxables, approuvée chaque année par le gouvernement régional (au moyen d’une circulaire). Selon l’association de collectivités locales régionale (UVCW), cela constitue une limitation de la capacité fiscale des communes. Même si la région souhaite homogénéiser la fiscalité locale sur son territoire, elle doit respecter un élément fondamental permettant l’autonomie fiscale locale.

 

Toujours en Wallonie, et en vertu de la législation régionale, la décision du conseil communal de percevoir des impôts locaux spécifiques et l’adoption de la réglementation locale correspondante nécessitent toutes deux l’approbation de l’organe ou du ministère régional compétent. Dans le même esprit, la législation wallonne prévoit que « sont soumis à l’approbation du gouvernement les règlements relatifs aux redevances et aux taxes communales à l’exception des taxes additionnelles à l’impôt des personnes physiques et des centimes additionnels au précompte immobilier ». De plus, « l’approbation peut être refusée pour violation de la loi et lésion de l’intérêt général » (article L3131-1 du Code wallon de la démocratie locale et de la décentralisation).

 

La mise en œuvre des pouvoirs fiscaux propres aux communes (leur pouvoir de lever des taxes dans des domaines taxables) peut parfois entrer en conflit avec les politiques économiques ou fiscales de l’État ou de la région. Dans ce contexte, un État ou une région pourrait vouloir réduire ou restreindre l’autonomie fiscale des communes. Cette tension constitue un très bon exemple de la nature et de l’ampleur de l’autonomie locale en Belgique et a donné lieu à ce jour à des évolutions juridiques très intéressantes.

 

Ainsi, le Conseil d’État, l’une de principales juridictions belges statuant sur l’action des pouvoirs publics, s’est déjà intéressé à cette question plusieurs fois. Lors de la procédure de consultation, le Gouvernement flamand a mentionné la décision du Conseil d’État relative à un litige entre la Région wallonne et la commune de Lessines, qu’il a considéré comme une question de principe. La commune de Lessines souhaitait lever une taxe locale sur les commerces de nuit, mais la région n’était pas d’accord pour deux motifs : premièrement, la région avait approuvé un règlement interne régional (circulaire) définissant les taxes que les communes pouvaient lever ou non, et la décision de la commune enfreignait ce règlement ; deuxièmement, la politique fiscale régionale décourageait les communes de lever des taxes supplémentaires.

 

Le refus de la région (agissant en tant qu’« autorité de tutelle » d’approuver le règlement fiscal communal a été contesté devant le Conseil d’État par la collectivité locale, qui a invoqué, entre autres motifs, son autonomie locale. Dans son arrêt, le Conseil d’État a déclaré que la circulaire ne pouvait pas avoir de nature réglementaire, et qu’il ne s’agissait pas d’une véritable règle juridique. Le Conseil d’État a commencé son raisonnement en rappelant qu’« en vertu des articles 41 et 162, alinéa 2, de la Constitution, les intérêts communaux sont exclusivement réglés par les conseils communaux, dans le respect des principes établis par la Constitution ».

 

Le Conseil d’État a ensuite indiqué que « le contrôle exercé par les autorités de tutelle étant une exception au principe constitutionnel de l’autonomie locale, les pouvoirs de celles-ci doivent s’interpréter restrictivement, d’autant plus lorsqu’il s’agit de la tutelle spéciale d’approbation ».Enfin, le Conseil d’État a déclaré que « l’établissement d’un impôt communal est, en vertu des dispositions précitées de la Constitution, une matière d’intérêt communal qu’il revient au conseil communal de régler, sauf les exceptions déterminées par la loi, dont la nécessité est démontrée, et pour autant que, sous le contrôle de l’autorité de tutelle et des juridictions compétentes, l’établissement d’un tel impôt ne viole pas la loi ou ne blesse pas l’intérêt général. »

 

Par conséquent, le Conseil d’État a annulé la décision de refus du ministre régional. Cet arrêté est très important, car il confirme et réitère la jurisprudence de cette juridiction supérieure en matière d’autonomie locale et, plus précisément, dans le domaine de l’autonomie fiscale locale.

 

Le Conseil d’État a statué sur un litige similaire dans ses arrêts no 251.180 du 30 juin 2021 et no 252.629 du 13 janvier 2022, comme les représentants du Conseil d’État l’ont indiqué à la délégation.

 

Droits et redevances

 

Les collectivités locales peuvent percevoir des redevances (retributies en néerlandais) pour l’utilisation de biens ou d’installations publics ou pour la fourniture de certains services locaux, tels que la délivrance de permis. Le nombre et le type de ces redevances peuvent varier d’une région à l’autre, et d’une commune à une autre. À titre d’exemples de droits et redevances qui sont appliqués à peu près partout, citons la redevance sur les terrasses des bars et restaurants ou la redevance sur les commerçants ambulants et les marchés. En outre, dans la Région wallonne, il existe une redevance sur l’utilisation des routes locales (redevance de voirie), qui doit être acquittée par les distributeurs-fournisseurs de gaz et d’électricité qui utilisent les infrastructures locales telles que les routes, les chemins, etc. Cela s’applique également dans la Région de Bruxelles-Capitale.

 

Au vu de ce qui précède, l’autonomie fiscale des communes est assez importante, et est protégée par les juridictions (notamment le Conseil d’État). La Belgique respecte donc l’article 9.3 de la Charte.

 

Article 9.2
Les ressources financières des collectivités locales - Ratifié avec réserve(s)

Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi.


Il est important de noter que la Belgique a introduit une réserve « indue » à l’article 9.6 et que, par conséquent, cette disposition n’est pas contraignante pour la Belgique. Cependant, dans un souci d’exhaustivité, nous analyserons la situation relative à cette disposition.

 

Tous les élus locaux que la délégation a rencontrés ont formulé la même plainte, qui est sérieuse. Elle porte sur les coûts des pensions de retraite des fonctionnaires locaux. Pour mieux comprendre ce problème, il convient de mentionner que le paiement des pensions de retraite des travailleurs ordinaires (dans les secteurs privé et public) et des pensions des fonctionnaires d’État est assuré par l’État, par l’intermédiaire de la Sécurité sociale. Les pensions sont une compétence fédérale, y compris celles des fonctionnaires d’État.

 

Comme expliqué plus haut, les ressources humaines des collectivités locales sont composées de « travailleurs ordinaires » (agents contractuels) et de « fonctionnaires » (agents statutaires). Récemment, le gouvernement fédéral a décidé que les pensions des fonctionnaires locaux devraient être payées par les communes où ils travaillaient avant leur retraite, tandis que l’État continuerait de verser les pensions de retraite aux travailleurs « ordinaires » des communes.

 

Cette réforme a eu des conséquences très sérieuses sur les budgets des collectivités locales, car elle représente une somme d’argent très importante. De plus, les collectivités locales n’ont pas reçu de financements proportionnels de l’État pour cette dépense et, enfin, elles n’ont pas été consultées par le gouvernement fédéral au moment de l’adoption de cette décision.

 

Apparemment, ce problème a été en partie causé par une pratique selon laquelle, dans de nombreuses communes, certains travailleurs « ordinaires » (agents contractuels) ont été promus ou ont obtenu le statut de « fonctionnaires » à la fin de leur carrière, en guise de récompense. Par conséquent, lorsqu’ils ont atteint l’âge de la retraite, leurs contributions de sécurité sociale n’étaient pas suffisantes pour couvrir les coûts de leurs pensions en tant que fonctionnaires, qui ont dû être assumés par les communes.

 

En raison de cette mesure, les collectivités locales sont aujourd’hui confrontées à une charge financière insoutenable, pour une responsabilité qu’elles n’ont pas eu l’occasion de discuter avec le gouvernement fédéral.

 

Ce problème semble particulièrement préoccupant dans la Région de Bruxelles-Capitale. La délégation a été informée que dans cette région, cette dépense s’était élevée à 80 millions d’euros en 2021. En outre, la charge financière va s’accroître chaque année pour des raisons naturelles, et selon les prévisions de la Cour des comptes, le coût des pensions va continuer d’augmenter plus rapidement que la masse salariale. De même, on estime qu’en 2025, les 19 communes devront payer environ 100 millions d’euros en pensions de retraite à leurs fonctionnaires. Selon l’association régionale des collectivités locales « Brulocalis », l’impact financier de cette situation représentera une menace bien plus grande pour les finances locales que les conséquences de la pandémie.

 

Tous les élus locaux que la délégation a rencontrés ont convenu que le système de pensions des fonctionnaires locaux n’était pas viable. Au moment de la visite, il s’agissait de la plainte la plus importante et la plus sérieuse formulée par les élus locaux dans le domaine des finances locales. En outre, les régions ne prennent apparemment pas en compte l’augmentation des coûts des pensions des fonctionnaires locaux lorsqu’elles calculent le fonds des communes.

 

Les élus locaux ont proposé qu’au moins une partie de cette charge financière soit assumée par l’État, ou par les régions. Cependant, la réponse des régions à ce problème a été inégale et est conditionnée par leur propre richesse financière. Il semble que seule la Région flamande ait pris une mesure, en décidant d’assumer la moitié des coûts que les communes flamandes devront payer à ce sujet l’année prochaine. Les élus régionaux ont indiqué à la délégation que cette mesure supposait un effort financier d’environ 1,3 milliard d’euros pour les prochaines années. La délégation a également appris que toutes les régions n’ont apparemment pas les moyens de prendre cette décision. Par exemple, dans la Région de Bruxelles-Capitale, il n’existe pas d’initiative ou de plan pour aider les communes à faire face à la charge financière constituée par le versement des pensions de retraite ; cette mesure serait trop coûteuse, ont reconnu les élus régionaux. Lors de la procédure de consultation, le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale a informé les rapporteurs que la région a inclus un soutien aux pensions dans son accord sectoriel 2021-2025 et qu’elle accorde aux communes un montant 250 euros par an et par équivalent temps plein afin de financer la pension légale de leurs employés statutaires et la pension complémentaire de leurs personnels contractuels.

 

D’autre part, les associations de collectivités locales ont dénoncé le fait que le principe de la neutralité budgétaire est encore violé par le niveau fédéral, car il impose aux communes des devoirs et des tâches pour lesquels elles ne reçoivent pas les moyens financiers nécessaires. Ces associations ont donné différents exemples de la situation susmentionnée : le financement de la police et des services d’urgence.

 

En général, le gouvernement fédéral (ministère de l’Intérieur) est le niveau qui mène les négociations sociales avec les syndicats et les associations de travailleurs dans le domaine du statut des fonctionnaires, des pensions et des salaires. Ces questions sont négociées au niveau fédéral pour l’ensemble du pays. Par exemple, le gouvernement fédéral mène les négociations collectives et négocie les conditions de travail et les salaires de l’ensemble de la police avec leurs syndicats nationaux ; or, 80 % des policiers sont locaux et travaillent dans les communes. La situation est la même pour les pompiers. Les collectivités locales doivent donc payer une augmentation de salaire pour laquelle elles n’ont pas été consultées.

 

Les élus locaux ont fait remarquer que les représentants des collectivités locales étaient rarement consultés concernant la préparation de ces négociations. Le paradoxe est que le niveau fédéral est celui qui négocie avec les syndicats et qui est susceptible de faire des concessions aux employés locaux, mais qu’en fin de compte, ce sont les collectivités locales qui doivent payer les salaires de ces employés, étant donné qu’ils travaillent pour les collectivités locales et reçoivent leurs rémunérations de celles-ci. Par conséquent, les élus locaux se sont plaints du fait que le gouvernement central faisait des concessions dont il n’assumait pas la charge financière et régissait la structure sociale et salariale de régimes qu’il ne gérait pas.

 

Les associations se sont plaintes du fait que ce comportement du gouvernement fédéral entraînait un transfert de charges du niveau fédéral vers le niveau local, un point qui a été dénoncé ces dernières années. Dans le cas de la Région wallonne, l’UVCW a affirmé que cet état de fait aurait une incidence négative sur les budgets des communes d’environ 295 millions d’euros en 2022. La plainte des associations locales est soutenue par le ministre régional. 

 

Par conséquent, le financement de la police locale représente également une difficulté pour de nombreuses communes.

 

Au niveau régional, le principe de la neutralité budgétaire semble être davantage respecté. C’est le cas dans la Région wallonne, de l’avis des élus locaux. Dans la Région flamande, selon les dirigeants régionaux, les communes doivent recevoir une compensation chaque fois que le gouvernement flamand prend des mesures ou des décisions qui ont un impact financier sur elles. Compte tenu de ces faits, les associations locales concluent raisonnablement que les communes belges se voient confier des tâches et des responsabilités pour lesquelles elles ne disposent pas de fonds adéquats.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs estiment qu’il y a une violation partielle de l’article 9.2 de la Charte, bien que cette disposition ne soit pas contraignante pour le Royaume.

 

Article 9.1
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l’exercice de leurs compétences.


Il convient tout d’abord de formuler certaines remarques générales avant d’analyser la question des finances locales en Belgique. Première remarque : depuis l’origine du Royaume, les collectivités locales sont dotées d’un domaine d’autonomie fiscale. Ainsi, la Constitution belge de 1831 (article 170.4) confirme effectivement que les provinces et les communes disposent d’un réel pouvoir fiscal et que celui-ci ne peut être exercé que par le conseil, provincial ou municipal.

 

Deuxième remarque : comme bien d’autres aspects de l’autonomie locale dans ce royaume, les finances locales relèvent de la compétence régionale, et non pas fédérale (pour les neuf communes de la Communauté germanophone, cette responsabilité incombe à ladite Communauté, et non pas à la Région wallonne). L’État n’a pas de responsabilités explicites dans ce domaine, bien qu’il puisse prendre des décisions qui, de manière directe ou indirecte, ont un impact sur les finances locales, comme nous le verrons plus loin.

 

Troisième remarque : malgré cette potentielle diversité, il existe des caractéristiques structurelles et des sources de revenus communes pour les finances locales, ce qui permet de dresser un tableau d’ensemble. Les principales sources de revenus des communes peuvent être décrites comme suit :

 

Transferts accordés par la région. Cette source de revenus est analysée plus loin, en connexion avec l’article 9.7.

 

Fiscalité locale. On recense trois types de fiscalité locale : les taxes additionnelles locales sur les impôts levés par l’État, à savoir un montant ajouté à certains impôts levés par l’État ou la Région, comme l’impôt sur le revenu des personnes physiques et la taxe foncière ; les impôts réellement « locaux », levés par les communes de leur propre initiative et différents des impôts susmentionnés ; et les droits et redevances locaux. Toutes ces sources sont décrites plus loin, en connexion avec l’article 9.3.

 

Autres sources de revenus : dans cette section, différentes sources de revenus peuvent être recensées, dont le montant et l’importance varient d’un endroit à l’autre, telles que :

 

  •  les amendes et sanctions pour les délits mineurs, tels que le stationnement illicite, conformément aux règlements locaux approuvés par le conseil communal. Les collectivités locales reçoivent également une part des amendes pour infraction au Code de la route perçues par les autorités « supérieures » ;

 

  •  les revenus de droit privé, tels que les revenus provenant de la vente ou de la location de propriétés communales, les bénéfices économiques générés par les entreprises locales, la vente de publications, les revenus du tourisme, etc. ;

 

  •  l’emprunt et l’accès aux marchés des capitaux. Cette source de revenus est présentée plus en détail ci-dessous, en connexion avec l’article 9.8 de la Charte ;

 

  •  d’autres sources diverses et mineures, telles que les dons.

 

Il est difficile de déterminer l’importance respective de chacune de ces trois sources, car leur poids peut varier d’une région à l’autre et, de plus, les montants effectifs provenant de ces sources fluctuent naturellement chaque année (ce point est particulièrement clair dans le cas des subventions aux investissements). En tout état de cause, selon les spécialistes locaux, « on peut affirmer que le système de fiscalité communale reste la source essentielle de financements locaux » et représente plus de 50 % des recettes communales dans les trois régions.

 

L’autonomie locale en matière de finances implique que chaque collectivité locale a la responsabilité d’assurer un contrôle équitable et efficace de ses dépenses. Dans la Région wallonne, certains postes spécifiques dans les collectivités locales sont chargés de cette fonction, notamment le receveur dans les provinces et communes. Chaque commune dispose également d’un service d’audit interne. En outre, les communes peuvent être auditées par les régions.

 

Dans la Région flamande, le contrôle financier interne dans chaque commune est assuré par le directeur financier, qui publie un « état financier » chaque année. Les états financiers des communes doivent être approuvés par le gouvernement flamand, ou par le ministre compétent. En outre, il existe un audit indépendant, réalisé par le gouvernement flamand par l’intermédiaire d’une agence chargée des audits (un contrôle systématique des 300 communes flamandes est assuré). Cette agence ne vérifie pas toutes les dépenses ou certaines dépenses en particulier, mais procède plutôt à un contrôle des normes de qualité suivies lors des audits internes.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que l’article 9.1 est respecté en Belgique.

 

Article 9.4
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l'évolution réelle des coûts de l'exercice de leurs compétences.


En vertu de cette disposition de la Charte, les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l’évolution réelle des coûts de l’exercice de leurs compétences.

 

Concernant cet article, il convient de noter que le système de financement local est suffisamment diversifié, comme décrit dans le présent rapport en connexion avec les différents alinéas de l’article 9.

 

En ce qui concerne l’évolutivité du système, nous expliquerons plus loin que les dotations globales que les régions transfèrent aux communes sont actualisées chaque année proportionnellement au taux d’inflation, et que dans certaines régions il existe même un complément au-delà de ce plafond. De plus, il existe des mécanismes généraux de péréquation, qui sont décrits ci-après (article 9.5).

 

En outre, dans certaines régions, des dispositifs spécifiques sont en place pour aider les communes dont les finances sont particulièrement grevées ou déséquilibrées. Par exemple, dans la Région wallonne, les communes et les centres publics d’aide sociale (CPAS) confrontés à de graves difficultés financières structurelles peuvent demander une aide financière au Centre régional d’aide aux communes (CRAC). Cette aide sera également présentée plus en détail ci-après.

 

Enfin, la délégation a entendu quelques plaintes concernant le respect des principes énoncés dans ces dispositions (charge des pensions locales, réduction des recettes en raison de décisions budgétaires de l’État ou des régions, etc.), mais elles ne constituent pas selon nous une violation ouverte de cette disposition, ou du moins pas dans l’ensemble du pays. Dans le même esprit, il convient de rappeler que certaines associations de collectivités locales (telles que l’association wallonne) ont reconnu que les institutions régionales reconnaissaient le principe de neutralité budgétaire, selon lequel la région compense les communes pour les incidences financières négatives que les décisions régionales pourraient avoir sur les collectivités locales. Ce principe est appliqué dans la pratique, bien qu’il ne soit pas encore reconnu dans la Constitution ou dans la législation régionale en vigueur.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte l’article 9.4 de la Charte.

 

Article 10.1
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont le droit, dans l'exercice de leurs compétences, de coopérer et, dans le cadre de la loi, de s'associer avec d'autres collectivités locales pour la réalisation de tâches d'intérêt commun.


Les collectivités locales belges ont le droit de coopérer et de s’associer en constituant des groupements et d’autres types de structures et d’organes collectifs avec d’autres collectivités locales belges (et parfois, avec des collectivités locales situées à l’étranger, voir ci-après). Ainsi, les communes belges peuvent créer des associations ou nouer des partenariats entre elles pour réaliser des tâches d’intérêt commun et pour assurer des services locaux communs. La coopération intercommunale concerne principalement les domaines des infrastructures économiques et techniques, des services communaux, des services sociaux, des transports, de la protection civile, des services culturels, de l’approvisionnement en eau et du traitement des eaux usées, de l’approvisionnement en gaz, de la gestion des déchets et du développement économique.

 

Selon les élus locaux, la coopération intercommunale est extrêmement développée dans toute la Belgique, et il existe des centaines de structures de coopération. Cette coopération se produit principalement entre des communes appartenant à la même région. Des règles communes peuvent être recensées en la matière.

 

Premièrement, cet aspect de l’autonomie locale est également régi exclusivement au niveau régional et, par conséquent, par les différents règlements et lois régionaux. Par conséquent, chaque région peut avoir une politique différente pour encourager ou canaliser la coopération intercommunale.

 

Par exemple, en Flandre, les dirigeants régionaux ont indiqué qu’il existait de nombreuses structures de coopération intercommunale (environ 190 partenariats), mais que cette coopération ne suivait pas un schéma rationnel (fonctionnel ou territorial). En 2021, le gouvernement régional a approuvé un nouveau décret sur la coopération intercommunale. Ce décret a créé différents « districts » ou régions de coopération (au nombre de quinze), et les communes sont encouragées à coopérer avec d’autres entités se trouvant dans la même zone géographique. Avec cette initiative, le gouvernement régional souhaite « intensifier » la coopération intercommunale, éviter la dispersion territoriale et renforcer la coopération intercommunale.

 

Dans la Région de Bruxelles-Capitale, les caractéristiques territoriales particulières de la région (qui compte 19 communes sur un territoire relativement restreint de 161 km2) rendent inévitable la coopération intercommunale, par exemple dans le domaine de la gestion des réseaux d’égouts. Les forces de police, pour ce qui les concerne, ont été fusionnées dans les communes. Il existe actuellement six zones de police, qui sont gérées par des conseils dans lesquels les communes concernées sont représentées. Les infrastructures sportives et autres constituent un autre domaine habituel de coopération, en raison de la grande proximité des populations (piscines, infrastructures sportives) ; les communes participantes cherchent à mutualiser les dépenses.

 

En Wallonie, les représentants du gouvernement ont indiqué à la délégation qu’ils préparaient une législation régionale pour réformer la coopération intercommunale, sur le modèle de l’intercommunalité française. À l’avenir, il sera possible de créer dans cette région des « communautés de communes », qui constituent la forme la plus approfondie et la plus complexe de coopération intercommunale en France. En attendant, des projets pilotes sont mis en place, par exemple pour l’accueil de réfugiés.

 

Deuxièmement, les formes et mécanismes de coopération intercommunale varient selon le degré et l’ambition de la coopération. La forme la plus souple de coopération est la coopération informelle. Les communes participantes peuvent ensuite souhaiter établir une coopération plus forte ou plus stable, qui prend généralement la forme d’un « accord de partenariat ». Enfin, deux ou plusieurs communes peuvent décider de créer une structure, une autorité ou un organe permanents, disposant d’une personnalité, d’organes de gestion et d’une organisation interne propres, etc.

 

Par exemple, en Flandre, il existe des « associations interlocales », qui constituent la forme la plus légère de coopération intercommunale et qui n’ont pas de personnalité juridique. Il existe également des associations de projet, qui sont créées pour réaliser un projet (de petite ampleur) d’intérêt communal clairement défini ; elles ont une personnalité juridique. Enfin, il existe des « associations prestataires de services » et des « associations chargées de mission ». Ces partenariats constituent la forme la plus forte et la plus stable de coopération. On les rencontre dans des domaines tels que l’approvisionnement en eau ou en énergie et la collecte des déchets.

 

Troisièmement, la législation régionale prévoie des éléments tels que : a) la rémunération des élus locaux (communaux) siégeant dans les comités de gestion des structures de coopération ; b) la possibilité pour lesdites structures d’avoir recours à l’emprunt ; c) la possibilité d’assumer simultanément deux ou plusieurs fonctions dans différentes structures de coopération, etc.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte pleinement l’article 10.1 de la Charte.

 

Article 10.2
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Le droit des collectivités locales d'adhérer à une association pour la protection et la promotion de leurs intérêts communs et celui d'adhérer à une association internationale de collectivités locales doivent être reconnus dans chaque Etat.


En Belgique, les collectivités locales ont assurément le droit d’adhérer à des associations pour la protection et la promotion de leurs intérêts communs. Comme pour les autres domaines de l’autonomie locale, cette dimension doit être analysée strictement au niveau régional. Contrairement à la plupart des pays, la Belgique ne dispose pas d’une association nationale des communes ou des provinces. Par contre, il existe dans chacune des trois régions une grande (ou unique) association de communes (voire de provinces). Elles ont généralement le statut juridique d’association sans but lucratif.

 

Ces associations ont un champ d’action strictement régional : dans la Région flamande, l’association locale est l’Association des villes et communes flamandes (Vereniging van Vlaamse Steden en Gemeenten, VVSG). Cette association rassemble l’ensemble des 300 communes qui existent aujourd’hui en Flandre. C’est donc la seule association de ce type active au niveau régional.

 

Dans la Région de Bruxelles-Capitale, l’association est « Brulocalis », tandis que dans la Région wallonne, il s’agit de l’« Union des villes et communes wallonnes » (UVCW). Dans la Communauté germanophone, toutefois, il n’y a pas d’association représentant les collectivités locales. Le faible nombre de collectivités permet cependant une communication directe entre les communes et les institutions de la communauté.

 

En ce qui concerne les provinces, en 1973, les provinces existantes ont décidé de créer une association pour promouvoir leurs intérêts communs : l’association des provinces belges été née. En 1991, les provinces flamandes et les membres flamands du conseil de la province du Brabant ont créé leur propre association, l’Association des Provinces flamandes.

 

Les missions des associations régionales de collectivités locales sont équivalentes dans les trois régions. Elles visent à protéger les droits et les intérêts de toutes les communes ou provinces affiliées ; à plaider en faveur des communes et des provinces et à les représenter au niveau régional et fédéral ; à fournir des rapports et des consultations, chaque fois qu’elles sont consultées par les régions sur toute question concernant les collectivités locales ; à leur fournir des services de conseil, des formations pour le personnel communal ainsi qu’un soutien et une assistance technique. Ces associations sont généralement financées grâce aux frais d’adhésion.

 

Outre la liberté générale de constituer ou de rejoindre des associations représentatives régionales dont elles disposent, les collectivités locales belges ont la capacité d’adhérer à des associations internationales. Par conséquent, ces associations peuvent participer à des institutions et organisations internationales liées à leur domaine d’activités en tant que membres fondateurs ou membres, sur décision du conseil communal ou provincial.

 

Ainsi, les associations belges œuvrent activement dans des associations internationales de collectivités locales, telles que le Conseil des Communes et Régions d’Europe (CEMR), l’association européenne de collectivités locales et régionales la plus ancienne et la plus étendue. L’Association des Provinces flamandes est membre de la CEPLI (Confédération européenne des pouvoirs locaux intermédiaires), etc.

 

Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que la Belgique respecte pleinement les exigences de l’article 10.2 de la Charte.

 

Article 10.3
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales peuvent, dans des conditions éventuellement prévues par la loi, coopérer avec les collectivités d'autres Etats.


Comme indiqué ci-dessus (voir paragraphe 5), le Royaume de Belgique a signé et/ou ratifié plusieurs traités internationaux du Conseil de l’Europe dans le domaine de la coopération transfrontalière au niveau local, tels que la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (STE no 106) ; le Protocole additionnel à la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales, du 9 novembre 1995 (STE no 159) ; le Protocole no 2 à la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales relatif à la coopération interterritoriale, du 5 mai 1998 (STE no 169) ; ainsi que le Protocole no 3 à la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales relatif aux Groupements eurorégionaux de coopération (GEC), du 16 novembre 2009 (STE no 206). Étant donné que ces traités portent sur un domaine qui relève de l’entière compétence des régions, tous ces traités, ou la plupart d’entre eux, ont également été ratifiés par les régions.

 

Par conséquent, il existe d’amples fondements juridiques et institutionnels permettant une coopération étendue avec les communes d’autres États voisins (principalement la France, le Luxembourg, les Pays-Bas et l’Allemagne).

 

Par exemple, dans le cas de la Flandre, cette région a approuvé la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales, ainsi que les trois protocoles additionnels à cette Convention. La Flandre est également liée par le règlement de l’UE du 5 juillet 2006 relatif à un groupement européen de coopération territoriale (GECT), tel que modifié. Par conséquent, la Flandre et/ou les collectivités locales et intermédiaires flamandes participent actuellement à différents GECT (par exemple, à l’Euregio Meuse-Rhin).

 

La coopération transfrontalière est également forte dans le cadre de l’Union Benelux, dont la Flandre est partenaire. Ce cadre permet différentes formes de coopération, par exemple par la création du groupement Benelux de coopération territoriale. Les communes flamandes n’ont pas besoin de l’approbation du gouvernement flamand, sauf pour la création d’un GECT, car le règlement susmentionné du 5 juillet 2006 tel que modifié l’exige.

 

En général, la délégation n’a eu connaissance d’aucune plainte concernant la mise en œuvre de cette liberté ou de ce droit consacré dans la Charte, et de nombreuses communes belges participent à des dispositifs de coopération intercommunale à l’échelle internationale, parmi lesquels les jumelages avec des villes étrangères sont bien sûr fréquents.

 

La délégation n’a eu connaissance d’aucune plainte ou évaluation négative relative à cette liberté. Au vu de ce qui précède, les rapporteurs considèrent que l’article 10.3 de la Charte est respecté en Belgique.

 

Article 11
Protection légale de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent disposer d'un droit de recours juridictionnel afin d'assurer le libre exercice de leurs compétences et le respect des principes d'autonomie locale qui sont consacrés dans la Constitution ou la législation interne.


L’analyse de la protection légale de l’autonomie locale dans le Royaume de Belgique doit donc porter sur deux aspects distincts : d’une part, l’accès des collectivités locales aux juridictions ordinaires, et d’autre part, l’accès de ces entités à la Cour constitutionnelle pour défendre le principe de l’autonomie locale.

 

Concernant le premier aspect, les collectivités locales belges ont bien qualité pour agir devant les juridictions ordinaires et administratives en vue de défendre leurs droits, leurs biens et leurs intérêts, exactement au même titre que n’importe quelle autre personne morale. Dans le système belge, les communes et les provinces ont bien qualité pour agir devant les juridictions en vue d’assurer le libre exercice de leurs compétences et de défendre leurs intérêts et leurs biens. Elles peuvent saisir des juridictions civiles ou administratives. La délégation n’a eu connaissance d’aucune plainte de la part de dirigeants ou de représentants des collectivités locales à ce sujet.

 

La juridiction administrative revêt un intérêt particulier aux fins du présent rapport. Le Conseil d’État est la seule juridiction administrative générale en Belgique, et il existe d’autres juridictions spécialisées. Par exemple, si une commune constate qu’une décision d’un organe régional qui lui est adressée est illégale, elle peut déposer une plainte devant le Conseil d’État.

 

Les collectivités locales ont qualité pour agir et disposent d’un accès ordinaire au Conseil d’État (section du contentieux), comme toute personne morale, et cette juridiction supérieure examine leur « locus standi » (qualité pour agir), dans le sens où elles doivent montrer un « intérêt à agir ». En règle générale, cette exigence est appliquée de manière large par le Conseil d’État.

 

En outre, dans certaines procédures judiciaires engagées par des personnes et des entreprises (par exemple dans le domaine de l’aménagement du territoire et de l’urbanisme), le Conseil d’État invite la commune concernée à être partie aux procédures ou tiers intervenant. En pratique, le « locus standi » s’applique aussi au bourgmestre ainsi qu’au collège des bourgmestre et échevins de la commune. Le Conseil d’État interprète aussi largement l’« intérêt à agir » requis lorsque le plaignant est un habitant de la commune, agissant pour défendre des intérêts collectifs locaux.

 

Lors d’une procédure judiciaire engagée devant le Conseil d’État, la collectivité locale concernée peut assurément invoquer les principes de l’autonomie locale consacrés dans la Charte (ou à l’article 162 de la Constitution). La violation de ces principes représente une plainte fréquente formulée dans les procédures judiciaires qui opposent, par exemple, une commune et une région dans le contexte d’un contrôle intergouvernemental ou du contrôle administratif (tutelle).

 

Le Conseil d’État a rendu plusieurs arrêts dans lesquels le concept et les principes de l’autonomie locale ont été interprétés et appliqués. Par conséquent, cette jurisprudence revêt une importance capitale pour comprendre la manière dont le principe de l’autonomie locale est appliqué et protégé en Belgique. De fait, certaines décisions rendues par le Conseil d’État dans ce domaine sont citées dans différentes sections du présent rapport.

 

Le Conseil d’État est très prudent lorsqu’il s’agit de reconnaître l’« effet direct » de la Charte, et ne reconnaît pas un tel « effet direct » pour de nombreuses dispositions de la Charte en raison de sa formulation large.

 

Le Conseil est peu disposé à reconnaître un tel « effet direct » lorsqu’une disposition donnée n’entraîne pas une obligation claire pour l’État. Néanmoins, cette juridiction supérieure a reconnu un tel effet à certains articles de la Charte, par exemple l’article 4.6 (consultation des collectivités locales). Dans d’autres cas, le Conseil d’État ne s’est pas prononcé sur la plainte sur la base de la seule Charte, mais s’est également appuyé sur les dispositions constitutionnelles ou légales.

 

La jurisprudence du Conseil d’État revêt une importance cruciale pour comprendre et mettre en œuvre le système de contrôle interterritorial en Belgique (tutelle), en vertu duquel la région a le pouvoir de contrôler les décisions, les plans et les mesures approuvés par les collectivités locales. Par exemple, une collectivité locale souhaite mettre en œuvre une décision ou un plan, mais la région refuse de donner son accord ; dans d’autres cas, une commune envisage d’introduire une taxe locale, mais l’autorité de tutelle refuse d’accepter la proposition ; la commune assigne alors la région devant le Conseil d’État, et ladite juridiction doit déterminer si le contrôle exercé par la région est proportionnel et s’il respecte l’autonomie locale. Par conséquent, la jurisprudence du Conseil d’État est essentielle pour comprendre le contenu et les limites réels des principes de l’autonomie locale. 

 

Un autre domaine où l’activité judiciaire du Conseil d’État est très importante est la mise en œuvre de la législation relative aux communes dotées de facilités linguistiques (notamment dans les six communes situées en Flandre, dans la périphérie de la Région de Bruxelles-Capitale), qui s’est avérée très controversée (voir la section 4.3 ci-après). Il existe une chambre spécifique au sein du Conseil d’État qui traite ces questions (l’assemblée générale).

 

En ce qui concerne l’accès des collectivités locales à la Cour constitutionnelle, il n’y a pas de problème majeur concernant leur qualité pour agir, étant donné qu’elles ont le droit de saisir cette juridiction. En outre, les citoyens peuvent également agir au nom d’une commune, en qualité de « suppléant », et les associations de collectivités locales peuvent aussi introduire des recours devant la Cour, étant donné que leur « qualité pour agir » est également reconnue.

 

La jurisprudence de la Cour constitutionnelle constitue donc le deuxième pilier qu’il convient d’examiner pour connaître en détail la compréhension, la mise en œuvre et la protection du principe de l’autonomie locale en Belgique et, par conséquent, de la Charte. En effet, la Cour constitutionnelle n’a pas besoin d’utiliser le concept d’« effet direct » pour vérifier l’application effective d’un traité international, étant donné qu’elle peut procéder à un « examen indirect » de la conformité de la législation avec ces traités, y compris la Charte. La Cour constitutionnelle a également reconnu l’existence du principe de subsidiarité, bien qu’il ne soit pas explicitement consacré dans la Constitution.

 

À ce jour, les collectivités locales ont introduit environ 80 recours devant la Cour constitutionnelle (ce chiffre inclut les communes ou les provinces ou leurs associations). En général, elles demandent l’annulation d’une règle juridique ou d’une décision, considérée comme inconstitutionnelle. Si un recours en annulation réussit, la loi est annulée par la Cour constitutionnelle et l’organe ou le parlement concerné doit en élaborer une nouvelle. En outre, au cours de la procédure, la Cour peut suspendre la loi contestée, en tant que mesure provisoire.

 

Par ailleurs, les communes peuvent avoir « accès » indirectement à la Cour constitutionnelle au moyen d’une « question préjudicielle », par laquelle une juridiction inférieure compétente pour statuer sur une plainte déposée par (ou impliquant) une collectivité locale formule à la Cour une question pertinente pour régler l’affaire en cours dans cette juridiction (par exemple, une question sur la constitutionnalité d’une loi qui est décisive pour statuer sur l’affaire). Selon les services de la Cour constitutionnelle, à ce jour, 153 affaires impliquant une collectivité locale d’une manière ou d’une autre ont fait l’objet de questions préjudicielles.

 

Dans toutes les procédures susmentionnées, les principes de l’autonomie locale peuvent être invoqués, et ils le sont dans la pratique (en particulier dans le domaine des finances locales, comme les pompiers, la police, les pensions locales, etc.). Ce point est facilité par la position de la Cour vis-à-vis de l’application indirecte des traités dans le système juridique belge, et notamment de la Charte.

 

Par conséquent, la Cour constitutionnelle a rendu plusieurs arrêts pertinents, dans lesquels le principe de l’autonomie locale a été invoqué et appliqué dans un contexte précis. Parmi cette jurisprudence, il convient de mentionner :

 

  •  l’arrêt no 173/2004 du 2 novembre 2004, qui règle un recours en annulation introduit par la province de Namur. Les articles 41 et 160 ont été interprétés « à la lumière » de la Charte ;

 

  •  l’arrêt no 89/2010 du 29 juillet 2010, qui règle un recours en annulation introduit par plusieurs communes de la Région de Bruxelles-Capitale contre une ordonnance passée par le parlement régional régissant le stationnement et la police dans la région. Toutefois, la Cour n’a pas constaté de violation du principe de l’autonomie locale ;

 

  •  l’arrêt no 109/2011 du 16 juin 2011, qui a répondu à une question préjudicielle introduite par le Conseil d’État, concernant une disposition légale dans la Région flamande qui établissait un organe dont les activités étaient susceptibles de porter atteinte à l’autonomie des communes ;

 

  •  l’arrêt du 14 février 2019 (arrêt no 28/2019). Cette décision mérite d’être mentionnée, en particulier dans cette partie du rapport. Cette dernière décision porte sur une disposition de la législation régionale flamande concernant les collectivités locales, à savoir l’article 194 du décret régional du 15 juillet 2005, qui, dans des circonstances exceptionnelles, permet à un habitant d’agir devant les tribunaux au nom de la collectivité locale pour défendre ses droits et intérêts, à condition que le conseil communal ait refusé d’engager un recours en justice. La Cour a analysé la constitutionnalité de cette disposition (à la demande d’une juridiction inférieure), à la lumière de l’article 11 de la Charte. La Cour a conclu que cette disposition était constitutionnelle et qu’elle respectait ladite disposition de la Charte.

 

Les arrêts du 8 mai 2014 (arrêt no 73/2014) et du 21 décembre 2017 (arrêt no 145/2017) sont également pertinents.

 

La jurisprudence de la Cour constitutionnelle a également eu un impact très important sur le régime juridique régissant les « communes dotées de facilités linguistiques ». Dans ce domaine, il convient de souligner les arrêts no 57 et 58/2014, tous deux du 3 avril 2014 (voir la section 4.3 ci-après).

 

Compte tenu de ce qui précède, la délégation estime que le système belge d’autonomie locale respecte pleinement les exigences énoncées à l’article 11 de la Charte.

 

ADHESION

au Conseil de l’Europe

RATIFICATION

de la Charte européenne de l’autonomie locale

CONSTITUTION | LEGISLATION NATIONALE

Le principe de l’autonomie locale est reconnu dans la Constitution belge.



25Disposition(s) ratifiée(s)
2Declaration
3 Articles non ratifiés
24Disposition(s) conforme(s)
2Articles partiellement conformes
4Disposition(s) non conforme(s)