Andorre

Andorre - Rapport de monitoring

Date de la visite de monitoring : du 19 au 20 septembre 2024
Date d'adoption du rapport: 27 mars 2024

Il s'agit du deuxième rapport de suivi de l’application de la Charte en Andorre.

 

Les rapporteurs concluent que le système d'autonomie locale du pays fonctionne bien et que les obligations de la Charte sont généralement remplies.

 

Ils relèvent que le niveau de la démocratie locale est satisfaisant et qu’il existe une culture de consultation et de dialogue entre les autorités locales et nationales. Ils notent également que les communes andorranes disposent de larges compétences ainsi que de moyens financiers et humains suffisants. Les rapporteurs soulignent aussi l’existence d’une garantie constitutionnelle des paroisses dans la mesure où ces dernières sont représentées directement au sein du Parlement andorran.

 

Le rapport relève toutefois quelques questions qui méritent une attention particulière. Ainsi, l’absence de loi prévoyant des procédures de consultation et de négociation entre les autorités nationales et locales, ainsi que l’absence d’autonomie spécifique octroyée à la capitale Andorre-la-Vieille. Les rapporteurs soulignent également que les articles 9.2 et 9.5 de la Charte n’ont toujours pas été ratifiés, malgré le fait qu’ils soient actuellement respectés en pratique.

 

Par conséquent, il est recommandé de formaliser dans la législation des mécanismes de consultation entre les autorités et nationales locales, et d’établir d’une autonomie spécifique pour la capitale Andorre-la-Vieille pour prendre en compte sa situation particulière par rapport aux autres municipalités. Les autorités d’Andorre sont également encouragées à signer et à ratifier le Protocole additionnel à la Charte européenne de l’autonomie locale sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales (STCE n° 207) et à ratifier les articles 9.2 et 9.5 de la Charte.

legend
Article ratifié Ratifié avec réserve(s) Non ratifié
Conformité Conformité partielle Non conformité A déterminer
Tout déplier
Tout replier
Article 2
Fondement constitutionnel et légal de l'autonomie locale - Article ratifié

Le principe de l'autonomie locale doit être reconnu dans la législation interne et, autant que possible, dans la Constitution.


Conformément à une longue tradition d’autonomie locale fortement enracinée dans l’histoire de la principauté d’Andorre, ce principe est reconnu dans l’article 79.1 de la Constitution qui prévoit que « [l]es Comuns, en tant qu’organes de représentation et d’administration des Parròquies, sont des collectivités publiques disposant de la personnalité juridique et du pouvoir d’édicter des normes locales, soumises à la loi, sous forme d’ordonnances, de règlements et de décrets. Dans le domaine de leurs compétences, qu’ils exercent conformément à la Constitution, à la loi et à la tradition, ils agissent selon le principe de libre administration, reconnu et garanti par la Constitution ».

L’article 1er de la loi qualifiée sur la délimitation des compétences des communes du 4 novembre 1993, dispose que « Les paroisses sont des entités politico-administratives qui composent la structure territoriale de l'État d'Andorre et participent à l’élaboration de la politique nationale au moyen des procédures et des institutions constitutionnellement établies. Leurs intérêts sont exprimés, gérés et protégés par les Comuns en vertu du principe de l'autonomie gouvernementale (« autogovern »).

L’article 7 de la loi qualifiée sur la délimitation des compétences des communes du 4 novembre 1993, modifiée par celle du 20 octobre 2017, dispose quant à lui que : « Le pouvoir financier et fiscal des communes découle du pouvoir fiscal originel de l'État. Néanmoins, et sans préjudice des nécessaires relations de collaboration avec l'État, les compétences attribuées aux communs par la présente loi en application de l'article 80.2 de la Constitution s'exercent selon le principe d'autonomie ».

Les rapporteurs considèrent, en conséquence, que le système actuellement en vigueur en Andorre répond pleinement aux exigences contenues dans l’article 2 de la Charte.

Article 3.1
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques.


En Andorre, la loi qualifiée sur la délimitation des compétences des communes du 4 novembre 1993, modifiée en dernier lieu par la loi qualifiée du 20 octobre 2017, énumère de manière précise les compétences des communes dont le périmètre apparait très large (cf. supra paragraphe 26).

Restent de la compétence de l’État notamment les compétences dans le domaine de l’éducation qui relève généralement dans les autres pays de la compétence des collectivités locales, ce qui se justifie par la taille réduite de la Principauté. La loi du 11 mai 1995 sur les garderies d’enfants (« Llei de guarderies infantils ») attribue quant à elle, des compétences aux communes concernant les écoles maternelles (préélémentaires).

Selon l’article 79.1 de la Constitution, les assemblées locales disposent « du pouvoir d'édicter des normes locales, soumises a? la loi, sous forme d'ordonnances, de règlements et de décrets. Dans le domaine de leurs compétences, qu'ils exercent conformément a? la Constitution, a? la loi et a? la tradition, ils agissent selon le principe de libre administration, reconnu et garanti par la Constitution ».

Les communes andorranes disposent d’un large éventail de responsabilités, leur octroyant la possibilité de mettre en place des politiques publiques locales concrètes au service et au profit des citoyens. Lors des réunions entre la délégation du Congrès et les autorités locales, ces dernières n’ont d’ailleurs exprimé aucune revendication visant à l’extension des compétences communales.

Compte tenu de l’importance des compétences dévolues aux communes, les rapporteurs considèrent que le système actuellement en vigueur en Andorre répond aux exigences de l’article 3.1 de la Charte.

Article 3.2
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Ce droit est exercé par des conseils ou assemblées composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel et pouvant disposer d'organes exécutifs responsables devant eux. Cette disposition ne porte pas préjudice au recours aux assemblées de citoyens, au référendum ou à toute autre forme de participation directe des citoyens là ou elle est permise par la loi.


Le droit à l’autonomie locale est exercé en Andorre par des organes élus appelés « Comuns », définis par l’article 79.1 de la Constitution comme des « organes de représentation et d’administration des Parròquies ». Chaque « Comú » détermine la taille de son Conseil en fonction de sa population. Le nombre de membres élus des « Comuns » peut varier entre 10 et 14 conseillers. Tous les membres d’un Conseil sont élus au suffrage universel pour un mandat de quatre ans, conformément à l’article 79.3 de la Constitution.

L’élection se fait au scrutin de liste à la représentation proportionnelle avec correctif majoritaire. La moitié des sièges est attribuée au parti ayant reçu le plus grand nombre de suffrages. L’autre moitié des sièges est attribuée proportionnellement aux voix obtenues par les différents partis, y compris la liste ayant emporté le scrutin. Ce système garantit à la formation qui arrive en tête une majorité absolue de sièges ainsi qu’une représentation des listes minoritaires.

L’article 16 de la loi qualifiée du 12 décembre 2022 (texte consolidé) relative au régime électoral et au référendum prévoit que les listes de candidats aux élections générales et aux élections municipales doivent avoir une composition équilibrée entre les femmes et les hommes, de sorte que dans l'ensemble de la liste, les candidats de chaque sexe représentent au moins 40%. Lorsque le nombre de postes à pourvoir est inférieur à cinq, la proportion de femmes et d'hommes doit rechercher le plus grand équilibre numérique possible. La représentation des femmes dans les conseils locaux apparait ainsi significative (3/12 à Encamp, 3/10 à Ordino, 5/12 à La Massana, 5/12 à Escaldes-Engordary) pour atteindre la parité (6/12) à Andorre-la-Vieille et à San Julia de Loria).

La participation électorale quant à elle est variable selon les communes, mais elle apparait plus forte dans les communes les moins peuplées. Ainsi, lors des élections municipales de 2019, la participation était d’environ 49% à Andorre-la-Vieille et à La Massana et de 70% à Canillo.

Depuis les élections de 2019, 3 femmes occupent les fonctions de maires et 4 celles de maires adjointes.

Les rapporteurs considèrent que le système actuellement en vigueur en Andorre répond aux exigences découlant de l’article 3.2 de la Charte.

Article 4.1
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences de base des collectivités locales sont fixées par la Constitution ou par la loi. Toutefois, cette disposition n'empêche pas l'attribution aux collectivités locales de compétences à des fins spécifiques, conformément à la loi


L’article 79.2 de la Constitution dispose que « Les Comuns représentent les intérêts des Parròquies, approuvent et exécutent le budget paroissial ; ils déterminent et mettent en oeuvre, sur leur territoire, les politiques publiques qui relèvent de leur compétence, et gèrent et administrent tous les biens des Parròquies, qu’ils soient publics ou privés ou appartiennent au Patrimoine ».

L’article 80 de la Constitution énumère de manière non exhaustive les compétences des communes :

a) recensement de la population ; b) établissement des listes électorales ; participation a? l'organisation et au déroulement des élections dans les conditions prévues par la loi; c) consultations populaires ; d) commerce, industrie et activités professionnelles ; e) délimitation du territoire communal ; f) biens du domaine prive? et du domaine public communal; g) ressources naturelles; h) cadastre ; i) urbanisme ; j) voies publiques ; k) culture, sports et activités sociales ; l) services publics communaux.

Les rapporteurs considèrent que le système actuellement en vigueur en Andorre répond aux exigences contenues dans l’article 4, paragraphe 1, de la Charte.

Article 4.2
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n'est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité


La loi qualifiée de délimitation des compétences des communes du 4 novembre 1993 prévoit que les compétences n’étant ni affectées ni déléguées aux municipalités appartiennent à l’État (article 3.3). La liste des compétences dévolues aux communes par la loi de 2017 modifiant la loi de délimitation des compétences des communes est sensiblement plus longue que celle établie en 1993 et recouvre les principaux domaines de l’activité municipale. En outre, l’article 4.16 de la loi de 1993 modifiée en 2017 attribue compétences aux communes pour « L'organisation de toute activité et la fourniture d'autres services publics propres à la satisfaction des besoins et des intérêts de la communauté paroissiale », ce qui s’apparente à une clause de compétence générale et permet à tout le moins aux communes d’intervenir dans des domaines qui ne sont pas énumérés comme relevant expressément de leur compétence.

Par ailleurs, il a été fait mention à la délégation du Congrès de projets portés conjointement par le gouvernement et les communes, notamment dans le domaine culturel et sportif (aide aux artistes, organisation de festivals, etc.). Une étroite collaboration entre le gouvernement et les communes a également été mise en œuvre pendant la crise sanitaire du COVID-19 pour lutter contre les effets de la pandémie.

Lors des différentes réunions tenues au cours de la visite de suivi, les représentants des autorités locales n’ont pas soulevé de problème en ce qui concerne la latitude dont elles disposent.

Par conséquent, les rapporteurs considèrent que le système actuellement en vigueur en Andorre répond aux exigences contenues dans l’article 4, paragraphe 2 de la Charte.

Article 4.3
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

L'exercice des responsabilités publiques doit, de façon générale, incomber, de préférence, aux autorités les plus proches des citoyens. L'attribution d'une responsabilité à une autre autorité doit tenir compte de l'ampleur et de la nature de la tâche et des exigences d'efficacité et d'économie.

 


Le principe de subsidiarité énoncé à l’article 4, paragraphe 3 de la Charte doit être interprété en tenant en compte la taille du pays et de ce fait il ne peut revêtir qu’une portée limitée en Andorre. Au demeurant, les compétences de proximité relèvent des communes selon la loi du 20 octobre 2017 qui a été élaborée en concertation avec les communes. Aucune revendication n’est actuellement formulée de leur part pour se voir attribuer de nouvelles compétences. Comme l’indique par ailleurs la loi qualifiée de délimitation des compétences des communes du 4 novembre 1993, les compétences n’étant ni affectées ni déléguées aux municipalités appartiennent à l’État (article 3.3).

Les rapporteurs considèrent que la répartition des compétences entre l’État et les communes fait application du principe de subsidiarité et que le système actuellement en place en Andorre répond aux exigences contenues à l’article 4, paragraphe 3, de la Charte.

Article 4.4
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences confiées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et entières. Elles ne peuvent être mises en cause ou limitées par une autre autorité, centrale ou régionale, que dans le cadre de la loi.

 


Il convient tout d’abord de relever que dans l’exercice de leurs compétences, les « Comuns » jouissent d’un pouvoir règlementaire autonome en matière d’élaboration et d’application des normes, de gestion, de contrôle des finances publiques et de fiscalité.

Il existe des dispositions législatives qui permettent, dans des cas précis, l’intervention de l’État dans le domaine de compétence des communes. Ainsi, il est prévu par l’article 4 de la loi de 1993, modifiée en 2017, sur les compétences des communes que celles-ci cèdent gratuitement au Gouvernement les terrains et les biens communaux qui doivent être affectés à la réalisation de projets d'intérêt national et de plans sectoriels.

Par ailleurs, les communes sont compétentes pour la construction, l'entretien et l'amélioration des routes secondaires mais le Gouvernement doit cependant assurer l'entretien de toutes les routes secondaires énumérées dans un arrêté gouvernemental du 25 juillet 2007 portant désignation des routes secondaires, y compris l'entretien des ronds-points, à l'exception des éléments d'aménagement paysager et décoratifs qui ont été placés par la municipalité. Il en résulte qu’en pratique l’entretien des talus relève de la compétence des communes et celui des murs qui bordent les routes de la compétence du Gouvernement. Dans le cas où les routes secondaires subissent des dommages très graves à la suite d'incidents provoqués par des risques naturels, le Gouvernement devra entreprendre les travaux nécessaires pour rétablir la circulation avec des garanties de sécurité. Certains travaux d’infrastructure (déviations routières par exemple) peuvent être cofinancés par le Gouvernement et les communes. Ainsi, la déviation de La Massana est financée à hauteur de 25 millions d’euros par le Gouvernement et de 5 millions d’euros par les communes.

Enfin, il convient de souligner que les compétences des communes en matière d'urbanisme et d'utilisation des sols (délivrance des permis de construire notamment) doivent s'inscrire dans le cadre de la loi générale d'aménagement du territoire et d'urbanisme du 29 décembre 2000 (modifiée en 2018) qui a quelque peu limité l'autonomie des gouvernements locaux s'agissant de l'édiction des normes en la matière, lorsque des initiatives nationales ont pour but de réaliser des infrastructures ou des services d'intérêt général.

La question de l'aménagement du territoire et de la poursuite des opérations de construction se pose actuellement du fait de la forte croissance démographique enregistrée ces dernières années. Il existe de moins en moins de zones constructibles disponibles. Cela tient au fait que 90% du territoire de la principauté d'Andorre appartient aux collectivités publiques, 10% seulement pouvant être bâti. Un moratoire sur les investissements étrangers dans le domaine de l’immobilier a été décidé récemment. Afin de faire face à ce défi, une loi de 2022 prévoit que les communes doivent réaliser une étude d'impact détaillée afin d’évaluer les capacités des communes à accroître leur population, que ce soit en termes de ressources hydriques, de capacités d'assainissement, d'investissements publics (écoles, voirie, hôpitaux, logements, etc.) dans le but de déterminer la charge démographique maximale pouvant être acceptée par chaque paroisse. Un nouveau plan d'urbanisme sera établi en fonction des résultats de ces études.

Ces dispositions ne permettent pas de conclure que les compétences confiées aux collectivités locales ne sont pas pleines et entières. En effet, au cours des rencontres avec la délégation du Congrès ainsi que dans leurs contributions écrites, les autorités locales andorranes ont considéré que la répartition des compétences entre les différents niveaux d’administration était satisfaisante et claire.

En conséquence, les rapporteurs considèrent que les exigences liées à l’article 4, paragraphe 4 de la Charte sont remplies en Andorre.

Article 4.5
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

En cas de délégation des pouvoirs par une autorité centrale ou régionale, les collectivités locales doivent jouir, autant qu'il est possible, de la liberté d'adapter leur exercice aux conditions locales.


Cette disposition ne soulève aucune difficulté particulière en Andorre dans la mesure où les communes n’ont reçu à ce jour aucune délégation de pouvoir de la part de l’État. Lors de la visite de la délégation du Congrès, aucune observation n’a été formulée à cet égard.

Par conséquent, les rapporteurs estiment que l’article 4, paragraphe 5, de la Charte est respecté en Andorre.

Article 4.6
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, autant qu'il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décision pour toutes les questions qui les concernent directement.

 


Il règne en Andorre une culture, bien ancrée dans l’histoire du pays, de consultation et de dialogue étroit entre le Gouvernement et les collectivités locales, laquelle est facilitée par les dimensions réduites du pays qui permet les rencontres et les consultations informelles. Ainsi, les réformes des compétences des communes et de leurs ressources financières de ces dernières années ont fait l’objet d’une concertation préalable. La dernière loi qualifiée sur la délimitation des compétences des communes du 20 octobre 2017 a été préparée par une commission tripartite composée de représentants des groupes parlementaires, du Gouvernement et des comuns afin de permettre la participation de toutes les parties impliquées et de rechercher le consensus le plus large possible. Les lois relatives aux transferts financiers (loi qualifiée sur les transferts aux Comuns du 4 décembre 1993, loi du 20 octobre 2017 et loi du 18 octobre 2018) ont été le fruit d’une longue concertation entre le Gouvernement et les communes qui se sont réunis à partir de 2010 afin de promouvoir les changements nécessaires pour garantir la soutenabilité des finances de l'État et la fourniture de services aux citoyens. Un accord « institutionnel » entre le Gouvernement et les communes a été conclu le 28 avril 2014 qui a servi de base aux lois ultérieures sur les compétences et les finances des communes.

Par ailleurs, il existe une concertation et une consultation régulière entre d'une part les deux représentants de chaque paroisse qui siègent au Conseil général et les autorités communales d'autre part. Il s'agit de rencontres et de discussions informelles qui sont perçues de manière globalement positive par les communes comme cela a été indiqué lors des entretiens avec les autorités locales du pays. Il convient cependant de noter que lors de sa rencontre avec la délégation du Congrès, le maire d'Andorre-la-Vieille a fait part de son souhait de voir cette concertation institutionnalisée.

La collaboration entre l’administration générale (l’État) et les communes a fait l’objet de la loi du 20 décembre 2017 qui établit les canaux et les procédures qui rendent opérationnels les principes généraux de loyauté institutionnelle et de collaboration, compte tenu des conditions spécifiques d'Andorre. Cela implique que les différentes administrations doivent tenir compte dans leurs actions des intérêts légitimes des autres administrations, qu'elles ne peuvent pas entraver l'exercice légitime des pouvoirs qui correspondent aux autres et qu'elles doivent collaborer activement pour que les autres administrations puissent exercer leurs compétences de manière efficace et efficiente (art.1). En vertu des mêmes principes de loyauté et de collaboration et des exigences d'efficacité et d'efficience de l'action publique, l’administration générale et les communes doivent se fournir mutuellement les informations dont elles disposent et qui sont nécessaires au bon exercice de leurs compétences (art.3). Enfin, l'Administration générale et les communes doivent se prêter mutuellement l'assistance nécessaire à l'exercice de leurs compétences respectives (art.4).

Au cours de son entretien avec la délégation du Congrès, le Ministre des Relations institutionnelles, de l'éducation et des universités a exprimé le souhait de voir adopter une loi à caractère général qui aurait pour objet d’institutionnaliser différents mécanismes de concertation et de consultation, lesquels existent déjà de facto. La difficulté principale serait de prévoir une représentation équilibrée des paroisses au regard de leur population dans les instances de consultation ou de concertation ainsi créées.

Il convient enfin de souligner que les sept communes d’Andorre bénéficient d'un droit commun d'initiative législative. Comme le prévoit l’article 58.2 de la Constitution, des propositions de loi peuvent être présentées au Conseil général par trois communes agissant conjointement. Au demeurant, toutes les propositions de loi présentées par les communes ont été adoptés par le Conseil général.

Par conséquent, les rapporteurs considèrent que les collectivités locales sont consultées en temps utile et de manière appropriée sur les questions les concernant directement, cela indiquant que l’article 4, paragraphe 6 est respecté dans le pays.

Article 5
Protection des limites territoriales des collectivités locales - Article ratifié

Pour toute modification des limites territoriales locales, les collectivités locales concernées doivent être consultées préalablement, éventuellement par voie de référendum là où la loi le permet.


La consultation doit avoir lieu en temps utile, c’est-à-dire avant l’adoption d’une décision définitive sur la question. La consultation prévue par la Charte n’exclut pas les fusions ou les changements de limites obligatoires, à condition que les procédures pertinentes soient prévues par la loi.

Aux termes de l’article 79 de la Constitution, les collectivités locales (Comuns) constituent les organes de représentation et d’administration des Parròquies (paroisses), dont l’existence est reconnue par l’article 1.5 de la Constitution. « L’Andorre est composée des Parròquies de Canillo, Encamp, Ordino, La Massana, Andorra la Vella, Sant Julià de Lòria et Escaldes-Engordany ». Leur nombre est passé à sept depuis la création d’Escaldes-Engordany en 1978 (décret des coprinces du 14 juin 1978) en détachant son territoire de la paroisse d’Andorra la Vella, afin de faire droit à une demande vieille de 30 ans de la population en faveur de l’établissement de son propre Comú.

Les limites communales peuvent être révisées sur la base d’un accord entre les communes, d’une décision de justice définitive, ou de traités internationaux signés par la Principauté d’Andorre qui s’appliqueront alors également aux autorités locales.

Le nombre et le nom des paroisses étant expressément mentionné par la Constitution, une hypothétique fusion des paroisses nécessiterait de ce fait une révision de la Constitution, conformément à la procédure prévue dans son article 106, qui prévoit l’organisation d’un référendum national : « La révision de la Constitution est adoptée par le Consell General à la majorité des deux tiers de ses membres. La proposition est ensuite immédiatement soumise à un référendum de ratification ».

Les communes ont fréquemment saisi le Tribunal constitutionnel à propos des délimitations des territoires, à propos de plans d'aménagement du territoire et à propos de la déclaration de la Vallée du Madriu-Perafita-Claror en tant que bien culturel, au cours des années 2006, 2007 et 2008.

Par conséquent, les rapporteurs estiment que, l’article 5 de la Charte est respecté en Andorre.

Article 6.1
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Sans préjudice de dispositions plus générales créées par la loi, les collectivités locales doivent pouvoir définir elles mêmes les structures administratives internes dont elles entendent se doter, en vue de les adapter à leurs besoins spécifiques et afin de permettre une gestion efficace.


La Loi qualifiée sur les compétences des collectivités locales de 1993, modifiée en 2017, accorde aux municipalités le pouvoir de fixer leur propre organisation interne et leur mode de fonctionnement, conformément à la Constitution, aux lois et aux us et coutumes (article 4.14). Les communes avaient déjà adopté en 1995 des règles communes de fonctionnement (Reglament de funcionament dels Comuns). Afin de les moderniser, a été adoptée par l’ensemble des communes l’ordonnance du 29 décembre 2011 sur leur organisation et leur fonctionnement. Celle-ci précise et renforce le rôle du maire et, par délégation, du maire adjoint et précise la fonction du Conseil de gouvernement. Sont également traités, l'organisation interne et le fonctionnement des commissions, qui peuvent être permanentes ou temporaires, et les pouvoirs que le Conseil de gouvernement, organe de base de toute la structure, peut déléguer. Le règlement concernant le secrétaire général est maintenu. L'ordonnance fait également référence à la législation en vigueur applicable dans les matières qui affectent le fonctionnement et l'organisation des communs mais qui, en raison de leurs caractéristiques ou de leur portée, sont déjà réglementées par d'autres dispositions légales, comme par exemple le nombre de conseillers qui composent le Conseil commun. L’ordonnance prévoit aussi qu’il appartient à chaque commune d’approuver son propre règlement intérieur qui peut préciser et compléter les dispositions de l’ordonnance.

Par conséquent, les rapporteurs estiment que l’article 6.1 de la Charte est respecté en Andorre.

Article 6.2
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Le statut du personnel des collectivités locales doit permettre un recrutement de qualité, fondé sur les principes du mérite et de la compétence; à cette fin, il doit réunir des conditions adéquates de formation, de rémunération et de perspectives de carrière.


La loi du 17 janvier 2019 sur la fonction publique fixe les règles qui concernent notamment la fonction publique locale. Certaines communes souhaiteraient plus de flexibilité pour leur permettre de disposer d’une marge de manœuvre plus grande dans la gestion de leur personnel. L’ordonnance du 29 décembre 2011 sur l’organisation et le fonctionnement des communes prévoit quant à elle que le secrétaire général de la commune est librement nommé et révoqué par le Conseil commun, sur proposition du consul majeur. Son mandat prend fin, au plus tard, avec le mandat communal, sans préjudice d'une éventuelle nouvelle nomination. Si la personne nommée est un fonctionnaire public ou un agent de l'administration, elle est mise en congé pendant la durée de son emploi. Les causes d'incompatibilité et d'inéligibilité prévues par la législation électorale s'appliquent au secrétaire général.

Les municipalités andorranes disposent d’une compétence autonome pour recruter les agents compétents sur la base de leur mérite et de leurs capacités à l’issue d’une procédure ouverte. Les charges salariales représentent environ un tiers du budget des communes. Lors de la visite de suivi, il a été indiqué à la délégation du Congrès par les représentants des communes que celles-ci rencontraient parfois des difficultés pour attirer et retenir des personnels très qualifiés (juristes, financiers, architectes, etc.), compte tenu de la différence de rémunération défavorable au secteur public par rapport au secteur privé, ainsi que du manque de logements locatifs disponibles.

La délégation considère que les exigences contenues dans l’article 6, paragraphe 2, de la Charte sont respectées en Andorre.

Article 7.1
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Le statut des élus locaux doit assurer le libre exercice de leur mandat.


Les entretiens conduits par la délégation du Congrès avec les élus locaux ont permis de vérifier que ces derniers ne rencontraient aucun obstacle d’ordre matériel dans l’exercice de leur mandat, les moyens mis à leur disposition étant considérés comme satisfaisants.

Le « libre exercice » du mandat des élus locaux suppose également que les élus locaux soient protégés par la loi contre les menaces représentées par les réseaux sociaux ou contre les atteintes à leur vie privée. Cette protection juridique existe mais en pratique elle n’a pas l’occasion de s’appliquer. Il a été indiqué à la délégation de suivi que les élus sont soumis à une pression très élevée, notamment sur les réseaux sociaux, et que cela a pour effet de lancer le débat sur la professionnalisation de la politique dans le pays.

Le libre exercice du mandat implique aussi que soit reconnu aux élus locaux le droit à l’information et la liberté d’expression. A cet égard, l’ordonnance du 29 décembre 2011 sur l’organisation et le fonctionnement des communes (articles 28 et 29) prévoit queles conseillers ont le droit d'exprimer leur avis sur toutes les questions inscrites à l'ordre du jour, sans préjudice du pouvoir du maire de diriger les débats. Ils ont le droit de recevoir des informations suffisantes et complètes sur les questions inscrites à l'ordre du jour des séances du Conseil. En outre, les conseillers peuvent demander des informations et de la documentation complémentaires sur toute question d'intérêt commun.

Par conséquent, cette situation dans le pays est vue par les rapporteurs comme conforme à l’article 7, paragraphe 1, de la Charte.

Article 7.3
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Les fonctions et activités incompatibles avec le mandat d'élu local ne peuvent être fixées que par la loi ou par des principes juridiques fondamentaux.


En Andorre, Le régime des incompatibilités et des inéligibilités est déterminé par les articles 17, 18 et 19 de la « Llei qualificada del règim electoral i del referèndum » (Loi qualifiée sur le système électoral et les référendums). Ce texte prévoit que sont inéligibles : les magistrats du Tribunal constitutionnel ; les membres du Conseil Supérieur de Justice ; les huissiers et magistrats et les membres du ministère public ; les membres du Conseil Électoral. Ces causes d'inéligibilité sont également des causes d'incompatibilité. Les personnes condamnées à une peine définitive de privation de liberté sont également inéligibles pendant la durée de la peine. Par ailleurs, l'exercice de la fonction publique tant par les fonctionnaires en service actif que par les personnes qui entretiennent avec l'Administration une relation de travail moyennant rémunération est incompatible avec l'exercice de toute fonction élective de l'Administration à laquelle ils sont rattachés. Enfin, nul ne peut être simultanément candidat au Conseil général et au conseil communal dans le cas où l'élection aurait lieu le même jour.

Au regard de la situation actuelle en Andorre, les rapporteurs considèrent que les exigences de l’article 7.3 de la Charte sont satisfaites.

Article 7.2
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Il doit permettre la compensation financière adéquate des frais entraînés par l'exercice du mandat ainsi que, le cas échéant, la compensation financière des gains perdus ou une rémunération du travail accompli et une couverture sociale correspondante.


L’ordonnance du 29 décembre 2011 sur l’organisation et le fonctionnement des communes, dans son article 30, fixe les règles générales qui doivent régir l'établissement de la rémunération des conseillers et des maires. Les administrateurs ont droit à une rémunération mensuelle fixée par le Conseil communal lors de l'approbation du budget de la commune. Cette rémunération tient compte de la charge de travail de chacun des conseillers et de la complexité des tâches assignées. Les présidents de commissions reçoivent ainsi une indemnité particulière. La rémunération des maires et maires adjoints doit être quant à elle supérieure à celle des autres conseillers, ce qui se justifie par le fait qu'il s'agit d'une activité exercée à plein temps. En pratique, elle peut varier entre 4000 et 6000 euros mensuels selon les communes (5500 euros par exemple à Encamp, commune où les conseillers perçoivent quant à eux 1500 euros par mois). Chaque municipalité établit donc ses propres règles de compensation financière de ses élus au début de chaque mandat et le montant, fixé par le budget communal, semble adéquat. Il a été noté que dans certaines communes les maires exercent également les fonctions de présidents du conseil d’administration de sociétés locales (stations de ski par exemple) sans percevoir de rémunération.

Par conséquent, les rapporteurs estiment que les exigences de l’article 7, paragraphe 2, de la Charte sont respectées en Andorre.

Article 8.1
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif sur les collectivités locales ne peut être exercé que selon les formes et dans les cas prévus par la Constitution ou par la loi.


L’article 82.2 de la Constitution andorrane prévoit que « les actes des Comuns sont directement exécutoires dans les conditions fixées par la loi. Des recours administratifs et juridictionnels peuvent être formés pour contrôler leur conformité à l’ordre juridique ». Une disposition analogue figure aux articles 5 et 6 de la loi qualifiée sur la délimitation des compétences. Seuls les tribunaux ordinaires, le Tribunal constitutionnel et le Tribunal de comptes (Cour des comptes) qui sont des instances indépendantes ont compétence pour contrôler les décisions des municipalités. En particulier, le Tribunal constitutionnel décide des litiges « relatifs à l’interprétation ou à l’exercice des compétences entre les organes généraux de l’État et les Comuns » (article 82.1 de la Constitution).

Par conséquent, les rapporteurs estiment que l’article 8, paragraphe 1, de la Charte est pleinement respecté en Andorre.

Ces dispositions expliquent que le gouvernement ne jouit d’aucun pouvoir de surveillance sur les activités des paroisses. Seuls les tribunaux ordinaires, le Tribunal constitutionnel et le Tribunal de comptes (Cour des comptes)  toutes instances ne dépendant pas du gouvernement – sont autorisés à contrôler l’activité des municipalités.

 

En particulier, le Tribunal constitutionnel décide des litiges « relatifs à l’interprétation ou à l’exercice des compétences entre les organes généraux de l’État et les Comuns » (article 82.1).

 

Le Tribunal de comptes (Cour des comptes) est chargé de l’audit financier de chaque municipalité sous l’angle de la régularité de ses actes et de sa conformité aux normes de l’administration publique et à la loi (contrôle de légalité). Il prépare également des rapports relatifs aux dépenses à l’intention du Parlement et des municipalités qui sont tenus d’appliquer les recommandations énoncées. En cas de détection d’une infraction pénale, il prévient le parquet.

 

La Loi n° 32/2014 du 27 novembre 2014 sur la viabilité fiscale fixe le plafond des dettes pouvant être contractées et renforce les contrôles internes en élargissant les pouvoirs des vérificateurs aux comptes internes. La loi sera appliquée aux municipalités à compter de 2019, année au cours de laquelle le mandat des conseillers élus en 2015 prendra fin.

 

Les rapporteurs considèrent que les exigences énoncées à l’article 8 de la Charte sont pleinement respectées en Andorre

Article 8.2
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif des actes des collectivités locales ne doit normalement viser qu’à assurer le respect de la légalité et des principes constitutionnels. Le contrôle administratif peut, toutefois, comprendre un contrôle de l’opportunité exercé par des autorités de niveau supérieur en ce qui concerne les tâches dont l’exécution est déléguée aux collectivités locales.


En Andorre, il n’existe pas de contrôle d’opportunité ni de supervision politique de la part du Gouvernement sur l’exercice des compétences locales, mais seulement un contrôle de légalité. Comme cela a été souligné lors de la visite de la délégation du Congrès, il n’y a pas de relation hiérarchique entre le Gouvernement et les communes. Le gouvernement ne jouit d’aucun pouvoir de surveillance sur les activités des paroisses et aucune observation n’a été faite à la délégation du Congrès à cet égard.

Par ailleurs, aucune compétence n’a été déléguée par l’État aux communes, ce qui exclut par là même toute possibilité d’un contrôle d’opportunité.

Les rapporteurs concluent, par conséquent, que l’article 8, paragraphe 2, de la Charte est pleinement respecté dans le pays.

Article 8.3
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Le contrôle administratif des collectivités locales doit être exercé dans le respect d’une proportionnalité entre l’ampleur de l’intervention de l’autorité de contrôle et l’importance des intérêts qu’elle entend préserver.


Au cours de leurs entretiens avec la délégation du Congrès, les représentants des communes n’ont d’ailleurs émis aucune critique à l’égard de ce contrôle. En pratique, le principal contrôle sur les actes des communes relève de la Cour des comptes, organiquement rattaché au Consell General, qui se présente comme un organe technique indépendant chargé notamment de l’audit financier de chaque municipalité sous l’angle de la régularité de ses actes et de sa conformité aux normes de l’administration publique et à la loi (contrôle de légalité).

Le contrôle exercé sur les actes budgétaires des communes tel qu’il est prévu par la loi sur les finances communales est avant tout un contrôle interne à la collectivité, exercé par un organe dénommé « Intervention communale » dirigé par un inspecteur communal. Ce contrôle revêt plusieurs aspects :

- Le contrôle de légalité qui concerne tous les actes, documents et dossiers de la commune et des entreprises publiques auxquelles elle participe ayant une incidence sur les finances communales.

- Le contrôle des opportunités économiques qui a principalement pour objet de déterminer, tant qualitativement que quantitativement, les conséquences qu'aurait la réalisation de certaines dépenses sur les finances communales et l'exécution normale du budget communal.

- Le contrôle financier qui consiste à vérifier le fonctionnement économique et financier des entreprises publiques auxquelles participe l'administration communale et des entités privées qui reçoivent des subventions, prêts, garanties et autres aides du budget communal.

- Le contrôle d'efficacité qui a pour objet la vérification périodique du degré de conformité avec les objectifs des programmes inscrits au budget de l'exercice précédent, ainsi que l'analyse des coûts de fonctionnement et des performances ou l'utilité des services rendus par les communs, des travaux et des acquisitions réalisés.

Enfin, le contrôle politique est exercé par le Conseil communal sur l'exécution du budget communal et le respect des dispositions à caractère budgétaire.

Les rapporteurs considèrent que les exigences énoncées à l’article 8, paragraphe 3 de la Charte sont pleinement respectées en Andorre.

Article 9.8
Les ressources financières des collectivités locales - Non ratifié

Afin de financer leurs dépenses d'investissement, les collectivités locales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché national des capitaux.


Comme le soulignait déjà le rapport du Congrès de 2018, la question de la ratification éventuelle par Andorre de l’article 9, paragraphe 8, s’avère problématique, ce pays ne disposant pas de marché national des capitaux et les collectivités locales étant par ailleurs trop petites pour avoir accès au marché financier international.

Les rapporteurs considèrent que les exigences énoncées à l’article 9 de la Charte sont actuellement respectées en Andorre. En ce qui concerne les dispositions non ratifiées de l’article 9, ils estiment qu’aucun obstacle sérieux ne s’oppose à la ratification des paragraphes 2 et 5, depuis les réformes intervenues depuis le précédent rapport du Congrès. Par conséquent, ils encouragent les autorités andorranes à ratifier ces dispositions.

Article 9.7
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L'octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence.


La loi du 20 octobre 2017 sur les transferts prévoit le caractère inconditionnel de la destination des transferts financiers reçus par les communes, ressources dont elles peuvent disposer librement sans autres limitations que celles établies par les lois en vigueur et notamment la loi 32/2014, du 27 novembre 2014 sur la soutenabilité des finances publiques et la stabilité budgétaire et fiscale. Compte tenu de la libre disposition des communes sur les sommes reçues, la loi de 2017 supprime les pouvoirs de contrôle que la loi précédente attribuait au Gouvernement et au Conseil Général, ainsi que le pouvoir de suspendre les transferts.

Les rapporteurs estiment que l’article 9, paragraphe 7, de la Charte est respecté en Andorre.

Article 9.6
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, d'une manière appropriée, sur les modalités de l'attribution à celles ci des ressources redistribuées.


La loi du 20 octobre 2017 (modifiée en 2018) qui a réformé l’intégralité du système des transferts financiers aux communes (en l’adaptant aux compétences des municipalités) a fait l’objet d’une longue négociation tripartite entre le Conseil général, le Gouvernement et les municipalités. Les critères de répartition des transferts adoptés à l'issue de cette négociation ont été déterminés de façon suffisamment précise et détaillée pour éviter toute renégociation annuelle. Qui plus est, les communes peuvent contester les modalités de calcul des transferts financiers, en premier lieu auprès du Ministre des finances et au besoin devant les tribunaux. Il ressort des entretiens entre la délégation de suivi et les représentants des autorités locales que ces derniers portent dans l’ensemble un jugement positif sur la qualité des consultations relatives aux questions financières.

Les rapporteurs concluent que l’article 9.6 de la Charte apparait comme respecté en Andorre.

Article 9.5
Les ressources financières des collectivités locales - Non ratifié

La protection des collectivités locales financièrement plus faibles appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou des mesures équivalentes destinées à corriger les effets de la répartition inégale des sources potentielles de financement ainsi que des charges qui leur incombent. De telles procédures ou mesures ne doivent pas réduire la liberté d'option des collectivités locales dans leur propre domaine de responsabilité.


L’introduction du principe de solidarité financière constitue l’un des principaux aspects de la réforme relative aux transferts financiers de l’État intervenue en 2017 en Andorre. L'article 8 de la loi du 20 octobre 2017, modifié en 2018, précise de la manière suivante la clé de répartition des transferts financiers aux communes en application de l’article 81 de la Constitution :

« Le montant total à reverser aux comuns est réparti selon les dotations et postes suivants :

a.  38% en part égale, à répartir entre toutes les communes pour le même montant ;

b.  21% à répartir entre toutes les communes proportionnellement à leur population ;

c.  16% à répartir entre toutes les communes proportionnellement à la superficie de chacune des paroisses ;

d.  12,75% à répartir entre toutes les communes proportionnellement à la somme de leur population d'enfants et de personnes âgées ;

e.  5,50% au titre des nuitées, à répartir entre toutes les communes proportionnellement à la répartition des nuitées par paroisse ;

f.   6,75% à titre d'élément de solidarité et de particularités communales ».

Les modalités de calcul des transferts financiers prennent donc en compte la situation particulière de chaque commune et s’apparentent ainsi à une forme de péréquation.

Lors de son entretien avec la délégation du Congrès, le maire d’Andorre-la-Vieille a émis le souhait que soient prises en compte dans le calcul des transferts les charges communes supportées par la capitale en tant que commune-centre (conservatoire de musique, piscine, terrain d’athlétisme, etc.).

En conséquence, les rapporteurs constatent un équilibre général. En ce qui concerne la non-ratification de l’article 9.5, ils estiment qu’aucun obstacle sérieux ne s’oppose à la ratification de cette disposition depuis les réformes intervenues depuis le précédent rapport du Congrès. Par conséquent, en prenant en compte les spécificités du système andorran, les rapporteurs encouragent les autorités nationales à ratifier cette disposition, qui est de facto respectée dans la pratique du pays. Entretemps, les rapporteurs ont été informés, au cours de la procédure de consultation, que le Gouvernement réfléchirait à l’idée de ratifier cette disposition dans un avenir proche.

Article 9.3
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d’impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.


La loi sur les finances municipales reconnait dans son article 6 un véritable pouvoir fiscal aux communes qui se traduit par l’adoption d’un règlement fiscal communal, lequel peut varier d’une paroisse à l’autre. Les communes créent, réglementent et appliquent les impôts conformément à la Constitution, à la loi qualifiée délimitant les compétences des communes, à la loi fixant les bases du régime fiscal, à la loi sur les finances municipales et aux autres dispositions ayant rang de loi.

L’article 3 de la loi du 16 décembre 2021 sur les finances communales indique que les ressources communales sont constituées notamment par les taxes, impôts communaux, impôts partagés avec l’État, les produits du domaine, les emprunts, les redevances, les transferts financiers du Gouvernement. Les impôts communaux, conformément à la loi qualifiée délimitant les compétences des communes sont les suivants : a) La traditionnelle taxe d'incendie et de placement. b) L'impôt sur les biens immobiliers (impôt foncier). c) L'impôt sur les revenus locatifs. d) L'impôt sur l'établissement d'activités commerciales, économiques et professionnelles. e) La taxe de construction.

Les ressources sur lesquelles les communes disposent d'un réel pouvoir de décision, et qu’elles perçoivent directement (à savoir les impôts locaux et les redevances), représentent une part importante du montant total de leurs ressources. En 2021, Les ressources propres représentaient 166.860.234 euros (soit 56% des ressources globales), les transferts financiers (dotations) 51.879.658 euros (31% du total) et les impôts partagés avec le Gouvernement 13.456.465 euros (8% du total). Le ratio d'autonomie financière est cependant variable puisque le montant des ressources propres des communes peut aller selon les communes de 39 % (Canillo) à 75 % (Andorre-la-Vieille).

Les rapporteurs considèrent que les exigences énoncées à l’article 9, paragraphe 3 de la Charte sont respectées en Andorre.

Article 9.2
Les ressources financières des collectivités locales - Non ratifié

Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi.


Il ressort des entretiens entre la délégation du Congrès et les responsables des communes que les réformes récentes intervenues sur les compétences et les transferts financiers permettent aux communes de disposer de moyens financiers suffisants pour exercer leurs compétences dans de bonnes conditions. La commune de Canillo considère cependant qu'en ce qui la concerne, l'entretien des routes secondaires qui sont à sa charge absorbent une grande partie de ses investissements compte tenu du fait qu'elle dispose du réseau routier le plus important du pays. Par là-même, elle estime qu’elle devrait disposer de ressources financières plus importantes pour faire face à ce poste de dépenses.

De manière générale, les rapporteurs considèrent qu’aucun obstacle sérieux ne s’oppose à la ratification de l’article 9 paragraphe 2 de la Charte.

Article 9.1
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l’exercice de leurs compétences.


Les principes relatifs aux ressources financières des communes andorranes sont directement énoncés par la Constitution (articles 80.2 et 81) dont la mise en œuvre résulte notamment de la loi.Les ressources financières des communes sont constituées des impôts et taxes qu’elles prélèvent, des impôts partagés avec le Gouvernement auxquels viennent s’ajouter les transfertsprovenant du budget général. Depuis 2005 ces derniers sont libres d’emploi, ce qui a permis d’accroître l’autonomie des communes en matière de dépenses. Les communes participent également au produit de la taxe sur la propriété des véhicules, gérée par l'État. Les autorités locales lèvent donc leurs propres impôts conformément à l’article 80.2 de la Constitution qui dispose que dans le respect des prérogatives de l’État, une loi qualifiée fixe les pouvoirs qui sont reconnus aux communes pour l’exercice de leurs compétences dans les domaines économique et fiscal. Ceux-ci portent, notamment : sur les revenus et l’exploitation des ressources naturelles, les impôts traditionnels et les redevances des services communaux ; les autorisations administratives ; l’implantation d’activités commerciales, industrielles et professionnelles ; ainsi que sur la propriété immobilière. Outre les transferts de l’État, les communes disposent donc de ressources propres : la loi sur les finances municipales du 16 décembre 2021 reconnait dans son article 6 un véritable pouvoir fiscal aux communes qui leur permet de créer leurs propres impôts.

Il convient également de souligner par ailleurs le faible niveau d’endettement des communes, les budgets communaux dégageant pour la plupart des résultats positifs. La loi du 16 décembre 2021 sur les finances communales prévoit que le montant total des opérations d'emprunt à long terme ne peut excéder 200% de la moyenne des recettes totales enregistrées dans les budgets des trois années civiles immédiatement précédentes, en excluant du résultat total celles correspondant aux opérations d'emprunt et celles provenant de cessions d'actifs. Or, le niveau d’endettement des communes qui se situait entre 120 et 150% en 2014?2015 est passé à 50-70% en 2020 avant de remonter légèrement en 2021, tout en restant inférieur à 100%, loin de la limite fixée par la loi.

Lors de la visite de suivi et des différents entretiens avec les autorités locales, ces dernières considèrent leurs ressources financières comme étant suffisantes. Elles ont également toute la liberté possible d’en disposer comme elles le souhaitent.

Par conséquent, les rapporteurs estiment que les exigences de l’article 9, paragraphe 1, de la Charte sont respectées en Andorre.

Article 9.4
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l'évolution réelle des coûts de l'exercice de leurs compétences.


Outre les transferts financiers provenant de l’État, le pouvoir de décision en matière fiscale détenu par les communes leur permet de créer des taxes spécifiques en cas de besoin : taxe sur le ramassage des déchets, taxe sur les appareils distributeurs de billets, taxe sur l’éclairage public à Andorre-la-Vieille par exemple. Les ressources des communes andorranes apparaissent donc comme suffisamment diversifiées.

Certaines communes ont connu ces dernières années une forte augmentation de leurs ressources, due principalement à l’essor des constructions. C'est le cas notamment des paroisses de Canillo et d’Encamp. Il convient cependant de souligner la dépendance de certains budgets locaux à l'égard des taxes et impôts perçus sur les constructions immobilières. Si le marché immobilier a connu une très forte expansion ces dernières années, certains responsables communaux ont fait part à la délégation du Congrès des difficultés qui pourraient découler dans un proche avenir d'un ralentissement, voire d'une diminution des constructions et des transactions immobilières. Il convient également de prendre en compte les effets du réchauffement climatique qui réduit la durée de la saison de ski alors même que les stations de ski génèrent des ressources importantes pour les communes.

Par conséquent, les rapporteurs estiment que l’article 9, paragraphe 4, de la Charte est respecté en Andorre.

Article 10.1
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont le droit, dans l'exercice de leurs compétences, de coopérer et, dans le cadre de la loi, de s'associer avec d'autres collectivités locales pour la réalisation de tâches d'intérêt commun.


La coopération entre paroisses constitue en Andorre une pratique solidement établie qui a été récemment formalisée par plusieurs textes. L’ordonnance du 29 décembre 2011 sur l’organisation et le fonctionnement des communes consacre le droit d’association des autorités locales et fait expressément référence dans son exposé des motifs à la Charte européenne de l'autonomie locale « incorporée dans l'ordre juridique de la Principauté d'Andorre et entrée en vigueur le 1er juillet 2011 ».

Les dispositions du Chapitre XII de cette ordonnance permettent de donner un cadre juridique à l’assemblée des Maires des paroisses (Reunió de cònsols) qui se tient périodiquement (une fois par mois ou tous les deux mois) depuis des temps immémoriaux. L'assemblée des Maires est composée des Maires et des Maires adjoints de chacune des sept paroisses de la Principauté.

L’ordonnance de 2011 dispose que dans l'exercice de leurs attributions, et conformément à la législation en vigueur, sont reconnus les droits des autorités locales à coopérer et s'associer avec d'autres collectivités pour réaliser des tâches d'intérêt commun. A titre d’exemple de coopération intercommunale, il est possible de mentionner la gestion forestière, les services de circulation municipaux, la collecte sélective des déchets ou encore l'exploitation d'une déchetterie commune entre la commune d'Encamp et la commune voisine de Canillo.

La collaboration entre les communes a par ailleurs été visée par la loi du 20 décembre 2017. Pour assurer la coopération entre les communes et les autres entités locales et permettre l'optimisation des ressources, cette loi prévoit la mutualisation possible des services. Ainsi, les communes et autres organismes locaux peuvent créer des Communautés pour fournir et mettre en œuvre conjointement des services et des travaux. Les Communautés ont leur propre personnalité juridique et, pour le développement et l'exécution de leurs fonctions, elles disposent des pouvoirs des communes et des autres organismes locaux (art.5).

L'un des principaux instruments permettant de renforcer la collaboration entre l'Administration générale et les communes et autres administrations publiques, ainsi qu'entre les communes elles-mêmes, est celui des accords de collaboration dans l'exécution de tâches et fonctions d'intérêt commun, dans le cadre de leurs compétences. La loi du 20 décembre 2017 réglemente en ce sens la capacité, la procédure, le contenu, les effets et le contrôle de tels accords, afin de sécuriser ce type d'instrument.

Par conséquent, les rapporteurs concluent que l’article 10, paragraphe 1, de la Charte est pleinement respecté en Andorre.

Article 10.2
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Le droit des collectivités locales d'adhérer à une association pour la protection et la promotion de leurs intérêts communs et celui d'adhérer à une association internationale de collectivités locales doivent être reconnus dans chaque Etat.


L’ordonnance du 29 décembre 2011 sur l’organisation et le fonctionnement des communes consacre dans son article 34 le droit des autorités locales « d’adhérer aux associations pour la protection et la promotion de leurs intérêts et a associations internationales de collectivités locales ». Les communes andorranes font ainsi partie de l’Association Internationale des Maires Francophones (AIMF). On peut également mentionner la Réunion des maires qui permet une concertation entre les différentes communes.

En conséquence, l’article 10, paragraphe 2, de la Charte, dont les termes sont repris pratiquement mot à mot par l’article 34 de l’ordonnance de 2011 est pleinement respecté dans le pays.

Article 10.3
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales peuvent, dans des conditions éventuellement prévues par la loi, coopérer avec les collectivités d'autres Etats.


L’ordonnance du 29 décembre 2011 sur l’organisation et le fonctionnement des communes consacre dans son article 34 le droit des autorités locales à coopérer avec des entités locales d'autres États, sans devoir solliciter la moindre autorisation du Gouvernement. Les collectivités locales ont ainsi signé de nombreux accords de coopération décentralisée, notamment dans le domaine culturel. La coopération intercommunale transfrontalière en Andorre trouve son cadre juridique dans l’accord signé entre le Gouvernement et les communes pour la création de l'Organisation Andorrane de Coopération Transfrontalière (OACT). L’OACT a pour objectif établir un cadre de coopération transfrontalière qui inclut les autorités nationales et locales andorranes et qui permet de signer des accords avec les autorités régionales des deux côtés de la frontière et en même temps de devenir membre à part entière de la Communauté de Travail des Pyrénées (CTP). Les statuts de l’OACT prévoient la composition de leur organes directeurs et administratifs. Le président (Ministre chargé des Affaires étrangères) et le vice-président (président de la Réunion des Maires, exercée à tour de rôle par un maire parmi l'ensemble des communes) de l'OACT participent annuellement à la réunion plénière de la CTP. Les autorités locales ont participé à plusieurs projets européens de coopération transfrontalière à travers le programme de coopération transfrontalière Espagne – France – Andorre (Interreg POCTEFA) et le ministère des Affaires étrangères, en charge de la coopération transfrontalière, est en contact avec les pouvoirs locaux afin de proposer tout projet de coopération transfrontalière pouvant intéresser les autorités locales. À titre d'exemple, les communes participent avec le gouvernement à la Communauté de Travail des Pyrénées (CTP) avec des régions françaises et des communautés autonomes espagnoles. Il existe également des projets de coopération transfrontalière auxquels participent une ou plusieurs communes. C'est le cas du Parc pyrénéen des trois nations, qui comprend le parc naturel des Hautes-Pyrénées (Espagne), le parc naturel régional des Pyrénées ariégeoises (France), le parc naturel du Comapedrosa (La Massana) et le parc naturel de la Vall de Sorteny (Ordino).

Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 10, paragraphe 3, de la Charte, dont les termes sont repris par l’article 34 de l’ordonnance de 2011 est respecté dans le pays.

Article 11
Protection légale de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent disposer d'un droit de recours juridictionnel afin d'assurer le libre exercice de leurs compétences et le respect des principes d'autonomie locale qui sont consacrés dans la Constitution ou la législation interne.


En Andorre, les municipalités disposent, outre d’un recours juridictionnel ordinaire, de la capacité de porter directement plainte à titre individuel devant le Tribunal constitutionnel. Selon l’article 82.1 de la Constitution, « les litiges relatifs à l’interprétation ou à l’exercice des compétences entre les organes généraux de l’État et les communes sont tranchés par le Tribunal Constitutionnel ». En pratique, seuls une quinzaine de recours ont été formés devant le Tribunal constitutionnel entre 1997 et 2023. Jusqu’à présent, la Charte européenne de l'autonomie locale n'a jamais été citée par les communes pour faire valoir leurs droits.

Si les actes, les résolutions ou les dispositions normatives du Conseil général ou du Gouvernement empiètent sur le domaine de compétence réservé aux communes par la Constitution ou si ces dernières exercent des compétences réservées au Conseil général, au Gouvernement ou à une autre commune, les organes lésés peuvent introduire un recours en conflit de compétences devant le Tribunal constitutionnel (article 69 de la Loi qualifiée sur le Tribunal constitutionnel). Les conflits positifs de compétence entre les collectivités locales et les organes généraux de l’État, concernent les lois qualifiées qui règlent les compétences et les attributions financières des paroisses, en tant que règles devant être considérées conjointement avec la Constitution pour déterminer le détenteur de la compétence en litige. Il s'agit de conflit négatif de compétences, lorsque le défaut d'exercice d'une compétence d'un organe général de l’État ou d'une commune empêche, entrave ou porte atteinte à un autre organe dans l’exercice d'une compétence lui étant propre, ou viole un droit subjectif des particuliers.

Selon sa jurisprudence, dans le cadre d'un conflit de compétences, le Tribunal constitutionnel ne peut se prononcer que sur la question de la délimitation de compétences et non sur la constitutionnalité -pour d'autres raisons que l'incompétence- des textes discutés (Arrêt du 13 mars 1998, affaire 1997?1?CC). Le Tribunal Constitutionnel a considéré, par ailleurs, que les matières attribuées aux communes par l'article 80 de la Constitution (recensement de la population, établissement des listes électorales, participation à l'organisation et au déroulement des élections dans les conditions prévues par la loi, consultations populaires, commerce, industrie et activités professionnelles, délimitation du territoire communal, biens du domaine privé et du domaine public communal, ressources naturelles, cadastre, urbanisme, voies publiques, culture, sports et activités sociales et services publics communaux) constituent une liste de compétences minimales (arrêt du 12 mai 1997, affaire 97-2-L) qui, en conséquence, ne peut pas être interprétée restrictivement, mais compte tenu aussi bien de ses connexions matérielles, que du principe général de coordination (arrêt du 9 mai 2003, affaire 2003?1?CC).

Le Tribunal constitutionnel d'Andorre n'a connu que d'un seul conflit de compétences depuis l'entrée en vigueur de la Charte (01/07/2011), l'affaire 2018-1-CC déposée par la commune d'Andorre-la-Vieille qui portait sur les limites du territoire établies par le plan d'aménagement de la commune de Sant Julià de Lòria et qui a été déclaré irrecevable parce que le litige qui opposait les deux collectivités locales était un litige d'ordre territorial et il était donc du ressort de la juridiction civile de le résoudre. Ainsi, selon l'article 73 b) de la LQTC, le Tribunal a considéré que le conflit « doit être instruit par des voies de procédure différente », en l'espèce par la voie ordinaire civile.

De plus, trois communes agissant conjointement peuvent introduire des recours en inconstitutionnalité contre des lois ou décrets dans un délai de 30 jours à compter de leur publication au Journal officiel. Le Tribunal constitutionnel doit alors se prononcer dans les deux mois (articles 83 et 99 de la Constitution). On dénombre au total 8 recours en inconstitutionnalité formés par les communes.

Enfin, en vertu de l’article 102 de la Constitution, chaque commune peut introduire, à titre individuel, un recours « d’empara » (notamment pour protéger leurs compétences). Les autorités locales saisissent fréquemment le Tribunal constitutionnel de recours d'empara lorsqu'elles considèrent que les garanties procédurales auxquelles elles ont droit au cours d'un procès contre des particuliers et contre d'autres Comuns n'ont pas été respectées par les juges ordinaires. La plupart des recours d’empara sont ainsi dirigés contre des décisions juridictionnelles et non contre les décisions du Gouvernement. Depuis 2006, le Tribunal constitutionnel a été saisi à 17 reprises. Il a déclaré huit recours irrecevables et sur les neuf recours recevables six ont été acceptés et trois rejetés.

Dans l'arrêt du 25 mai 2007, affaire 2006-22 i 25-RE, le Tribunal constitutionnel a affirmé que « le Comú d'Escaldes-Engordany est pleinement fondé pour former un recours d'empara pour assurer la protection des droits inscrits à l'article 10 de la Constitution », parce que « non seulement les personnes physiques sont titulaires de droits fondamentaux mais les personnes morales aussi, parmi eux celui de jouir de la protection judiciaire effective de l'article 10 de la Constitution. Or, s'il faut distinguer entre ce droit et ses garanties procédurales, il est logique que, là où il existe un recours d'empara, comme dans le cas de l'Andorre, celui qui détient ces droits est fondé pour demander leur protection au Tribunal constitutionnel, par la voie de l'empara, ce qui en résulte littéralement de l'article 102 de la Constitution. L'évolution dans ce sens du droit comparé, par exemple le droit allemand, pourrait justifier le cas échéant cet argument. En conséquence, en vertu de la personnalité juridique des Comuns, et de l'article 2.2 de la Loi qualifiée sur la délimitation des compétences des Comuns, du 4 novembre 1993, il faut affirmer leur droit à la protection judiciaire effective et donc leur capacité pour saisir le Tribunal constitutionnel d'un recours d'empara ». (…) « La doctrine et la jurisprudence comparée ont signalé des « spécificités » quant à protection judiciaire effective des personnes morales publiques, et plus spécialement aux personnes qui sont investies de pouvoirs. Néanmoins, en l'espèce, puisque le Comú requérant a défendu ses droits dans les différentes instances au cours d'un procès judiciaire ordinaire, en égalité avec la partie demanderesse, rien ne peut lui retirer son droit à obtenir une décision fondée en droit sur sa prétention ».

Par ailleurs, l’article 23 loi du 20 octobre 2017 sur les transferts aux communes prévoit un recours spécifique contre la décision du gouvernement qui détermine les montants des transferts alloués chaque année aux différentes communes. La commune, dans le délai d'un mois à compter de la notification de la liquidation émise par le ministère chargé des finances, peut introduire un recours devant le Gouvernement. Une fois la contestation déposée, le Gouvernement la transmet au reste des communes, qui sont également constituées comme parties à la procédure, et peuvent formuler des observations dans un délai d'un mois. Le Gouvernement doit statuer sur la contestation formulée par les communes dans un délai de deux mois à compter de la réception des observations des communes. La contestation de la commune est considérée comme rejetée si, dans un délai de trois mois à compter de la date de la contestation, le Gouvernement n'a pas statué expressément. Le dépôt d'une contestation par une ou plusieurs communes de la liquidation formulée par le ministère chargé des finances ne suspend ni ne modifie le paiement des transferts prévus dans la même liquidation, ni pour la commune réclamante ni pour les autres communes, sauf résolution expresse à cet effet, également contestable selon la même procédure. La décision du gouvernement relative à la contestation formulée par la commune peut faire l’objet d’un recours juridictionnel dans un délai d'un mois, qui est traitée selon la procédure établie dans le droit de la juridiction administrative et fiscale. Il a été indiqué aux rapporteurs par le ministre des Finances que plusieurs recours ont ainsi été introduits par les communes sur la base de cette disposition légale. La plus récente des divergences entre le Gouvernement et les communes concerne une question liée au transferts financiers vers les communes, en application des lois qualifiées relatives aux compétences (2017) et aux transferts financiers (2018). Il s’agit d’une action intentée par les communes le 24 février 2022 (par la voie judiciaire ordinaire administrative) relative à une divergence sur les critères d’exécution des liquidations des transferts liée à l’exercice budgétaire de 2017. Il s’agit essentiellement d’une question d’interprétation juridique qui engendre, néanmoins, d’éventuelles conséquences économiques pour les collectivités concernées.

Par conséquent, les rapporteurs considèrent que les exigences énoncées à l’article 11 de la Charte sont pleinement respectées en Andorre.

ADHESION

au Conseil de l’Europe

RATIFICATION

de la Charte européenne de l’autonomie locale

CONSTITUTION | LEGISLATION NATIONALE

Conformément à une longue tradition d’autonomie locale fortement enracinée dans l’histoire de l’Andorre (puisque les paroisses sont en fait à l’origine de la Principauté), ce principe est reconnu dans la Constitution de 1993 et dans plusieurs lois qualifiées, dont la Llei qualificada de delimitació de competències dels Comuns.



27Disposition(s) ratifiée(s)
0Disposition(s) avec réserve(s)
3 Articles non ratifiés
27Disposition(s) conforme(s)
0Disposition(s) partiellement conforme(s)
0Article non conforme