Croatie

Croatie - Rapport de monitoring

Date de la visite de monitoring : du 13 au 15 juin 2023
Date d'adoption du rapport: 28 mars 2024

Il s'agit du quatrième rapport concernant le suivi de l’application de la Charte européenne de l’autonomie locale en Croatie depuis que le pays l’a ratifiée en 1997.

Les rapporteurs notent avec satisfaction la mise en œuvre d'amendements législatifs importants dans le domaine de l'autonomie locale et régionale au cours des dernières années. Il s'agit notamment de la délégation de fonctions administratives aux comtés en raison de la suppression des services administratifs de l’État dans les comtés, de la réforme fiscale en cours et des incitations pour encourager les fusions volontaires. Le processus de consultation des représentants locaux et régionaux, notamment sur les questions financières et fiscales, s'est également amélioré dans la pratique.

Toutefois, le rapport soulève plusieurs points de préoccupation concernant la faiblesse de la capacité administrative et de la capacité à générer des revenus d’un grand nombre de petites communes et villes, l’insuffisance des ressources dont disposent les collectivités locales et régionales, le manque de clarté dans la délimitation des responsabilités et le manque d'efficacité du mécanisme de péréquation financière. En outre, l'administration centrale de l'État et les ministères de tutelle conservent des pouvoirs de contrôle étendus sur l'autonomie locale, et un mécanisme formel de consultation sur toutes les questions concernant les autorités locales et régionales reste nécessaire.

En conséquence, il est recommandé aux autorités croates de continuer de soutenir la coopération intercommunale et d’encourager les fusions de communes, de fournir des ressources financières adéquates aux autorités infranationales, de réexaminer les conditions régissant la fiscalité locale, d'explorer les possibilités de diversifier les sources de revenus infranationales, de réduire l’affection des subventions et des transferts et de réexaminer les critères sur lesquels est fondé le système. Les rapporteurs suggèrent également de réviser la législation relative aux pouvoirs de contrôle afin de l'aligner sur le principe de proportionnalité. Il est également recommandé de clarifier la répartition des responsabilités et d’établir un cadre juridique pour la consultation afin de rendre la procédure de consultation contraignante et systémique.

Enfin, le gouvernement est invité à signer et à ratifier, dans un avenir proche, le Protocole additionnel à la Charte européenne de l’autonomie locale sur le droit de participer aux affaires des collectivités locales (STCE n° 207).

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Article ratifié Ratifié avec réserve(s) Non ratifié
Conformité Conformité partielle Non conformité A déterminer
Tout déplier
Tout replier
Article 2
Fondement constitutionnel et légal de l'autonomie locale - Article ratifié

Le principe de l'autonomie locale doit être reconnu dans la législation interne et, autant que possible, dans la Constitution.


 Comme mentionné au paragraphe 7 ci-dessus, le principe de l’autonomie locale est largement reconnu et expressément inscrit dans la Constitution, tandis que la législation interne en traite divers aspects de manière plus détaillée.

Le droit des citoyens à l’autonomie locale et régionale est expressément garanti à l’article 128 de la Constitution, qui dispose en outre que ce droit est exercé par le biais d’organes représentatifs locaux et/ou régionaux composés de membres élus lors d’élections libres qui se tiennent au scrutin secret et au suffrage direct, universel et égalitaire.

Le principe de l’autonomie locale limite celui de la séparation des pouvoirs pour garantir le fonctionnement et la mise en œuvre de l’autonomie locale.

 La Constitution croate contient des dispositions supplémentaires relatives au principe de l’autonomie locale dans ses articles 129a à 131, qui régissent l’application de ce principe et les droits correspondants des citoyens. Ces questions étant toutes liées à d’autres articles de la Charte, elles seront examinées plus en détail dans les parties suivantes pour éviter les répétitions. Par conséquent, les rapporteures concluent que la Croatie respecte pleinement l’article 2 de la Charte.

Article 3.1
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques.


L’article 129a de la Constitution dispose que les collectivités locales « gèrent les affaires de caractère local permettant de répondre directement aux besoins des citoyens » et énonce les domaines spécifiques auxquels s’étend leur sphère de compétence. Mutatis mutandis, l’article 129b de la Constitution contient des références similaires aux collectivités régionales et précise les domaines de compétence des comtés. La liste des compétences des collectivités locales et régionales figure dans la partie 2.1 ci-dessus. Par ailleurs, les articles 129b et 130 de la Constitution prévoient l’autonomie des collectivités locales et régionales dans la gestion des affaires qui relèvent de leurs compétences propres.

 

50.    Compte tenu de ces dispositions, il est possible de conclure que l’étendue des pouvoirs attribués aux collectivités locales et régionales par la Constitution répond sur le principe aux exigences de l’article 3.1 de la Charte. Ce constat avait également été fait par la précédente délégation de suivi dans son rapport de 2016.

 

Le rapport de suivi publié en 2016 concluait que malgré l’existence de dispositions législatives permettant de satisfaire en principe aux exigences de l’article 3.1, dans la pratique, les collectivités locales n’étaient pas en mesure de gérer une part importante des affaires publiques sous leur propre responsabilité en raison du contrôle administratif et financier exercé par les services régionaux de l’administration d’État sur la prise de décisions au niveau local, ainsi que du rôle important joué par les ministères du gouvernement central dans la délimitation de l’usage de certaines compétences, allant à l’encontre de l’article 3, paragraphe 1, de la Charte. Ces observations allaient dans le même sens que la Recommandation 226 (2007) sur la démocratie locale et régionale en Croatie, qui invitait les autorités croates à faire en sorte que les communes puissent exercer leurs compétences de manière autonome en clarifiant la répartition des compétences entre les différents niveaux d’autorité publique.

Depuis lors, l’institution des services de l’administration d’État a été supprimée avec l’entrée en vigueur en 2020 de la nouvelle LSAE (voir plus haut) et leurs fonctions administratives ont été déléguées aux comtés. Cette réforme a réduit les possibilités d’intervention institutionnelle de l’État central dans l’exercice des compétences des collectivités locales et régionales et a permis aux organes administratifs et représentatifs des comtés d’exercer leurs compétences plus efficacement, ce qui a contribué à renforcer l’autonomie des collectivités locales et régionales dans la réglementation et la gestion de leurs affaires publiques au profit de leurs populations.

 La réforme et la décentralisation administrative susmentionnées sont des évolutions positives qui permettent aux comtés, et donc aux collectivités locales du premier niveau, d’exercer leurs fonctions sous leur propre responsabilité, en limitant dans une plus grande mesure l’influence ou l’intervention du gouvernement central.

Malgré ces progrès sur le plan législatif, les collectivités locales et régionales et en particulier les petites villes subissent des contraintes financières qui limitent leur capacité (par opposition à leur droit) de régler et de gérer dans la pratique une part importante des affaires publiques sous leur propre responsabilité. Ces contraintes seront examinées plus en détail dans la partie consacrée à l’article 9 de la Charte.

La population d’un grand nombre de petites communes (273 sur 428 communes de moins de
3 000 habitants) et de villes d’assez petite taille est très limitée tant en valeur absolue que comparativement. Par conséquent, les collectivités correspondantes ne sont pas en mesure de générer des recettes propres suffisantes pour exercer leurs fonctions publiques de base, ce qui compromet fortement leur potentiel de croissance et de développement. La capacité administrative d’un grand nombre de collectivités est également assez faible car elles dépendent de recettes provenant du pouvoir central. Les fusions, pourtant encouragées par des mesures incitatives prévues dans des amendements à la loi en 2022, ne semblent guère les intéresser, alors qu’elles auraient besoin de réorganisations structurelles. Enfin, elles ont une capacité réduite à soutenir le développement local, par exemple par la planification stratégique, les dépenses d’investissement, le développement des infrastructures, la transformation numérique, l’absorption des fonds de l’UE et le recours à des modèles financiers innovants[4].

Le gouvernement central conserve de larges pouvoirs de contrôle et d’orientation sur les collectivités locales, allant de la révocation de leurs organes exécutifs à la dissolution de leurs organes représentatifs en passant par la publication de directives visant à prévenir les irrégularités dans les actes généraux ou encore la suspension de l’exécution d’actes délégués par l’administration d’État et d’actes généraux conformément aux dispositions applicables de la loi sur l’autonomie locale et régionale, qui sont examinées plus en détail ci-après. Ces pouvoirs de l’État peuvent limiter le droit des collectivités locales de régler et de gérer leurs propres affaires sous leur propre responsabilité.

En résumé, les rapporteures considèrent que la Croatie a progressé sur le plan de la conformité avec l’article 3, paragraphe 1, de la Charte en supprimant les services de l’administration d’État au sein des collectivités locales tout en maintenant les dispositions fondamentales de la Constitution du pays qui permettent en principe aux collectivités locales et régionales de gérer sous leur propre responsabilité les affaires de nature locale et régionale, respectivement. Néanmoins, les contraintes financières auxquelles sont soumises de nombreuses collectivités locales (en particulier celles qui ont une population moins importante), conjuguées aux vastes pouvoirs du gouvernement central l’autorisant à dissoudre les organes représentatifs, à révoquer les représentants des organes exécutifs et à adresser des directives aux collectivités, limitent la capacité des autorités infranationales à assurer de telles fonctions de gestion dans la pratique.

Compte tenu de ces éléments, les rapporteures concluent que l’article 3.1 de la Charte est partiellement respecté en Croatie.

Article 3.2
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Ce droit est exercé par des conseils ou assemblées composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel et pouvant disposer d'organes exécutifs responsables devant eux. Cette disposition ne porte pas préjudice au recours aux assemblées de citoyens, au référendum ou à toute autre forme de participation directe des citoyens là ou elle est permise par la loi.


L’article 128 de la Constitution garantit le droit des citoyens à l’autonomie locale et dispose que ce droit « est exercé par des organes représentatifs locaux et/ou régionaux composés de membres élus lors d’élections libres au scrutin secret et au suffrage direct, universel et égalitaire ».

Comme mentionné précédemment, la loi sur l’autonomie locale et régionale contient des dispositions spécifiques concernant l’établissement, l’élection et l’organisation des organes exécutifs et représentatifs de chaque type de collectivité locale, en l’occurrence le préfet et l’assemblée du comté dans les comtés et le maire et le conseil municipal dans les communes et les villes (y compris les grandes villes). La loi sur les élections locales dispose en outre que « le droit de vote s’exerce lors d’élections au suffrage direct et au scrutin secret » garantissant le secret du vote et la libre expression de la volonté de l’électeur. Elle précise également qu’une même personne ne peut voter qu’une seule fois au cours d’un même scrutin.

Les membres des organes exécutifs, c’est-à-dire les préfets des comtés, les maires des communes et des villes et leurs adjoints « sont élus à la majorité des suffrages exprimés » pour un mandat de quatre ans. Est élu le candidat qui remporte 50 % des suffrages (au premier tour) ; en l’absence de tel vote majoritaire, un deuxième tour oppose les deux candidats ayant récolté le plus de voix au premier tour. Le candidat qui recueille le plus de voix lors de ce deuxième tour gagne l’élection. S’il y a égalité des voix entre les deux candidats, ils sont départagés lors d’un troisième tour organisé selon les mêmes règles que le deuxième tour ; si aucun candidat n’obtient la majorité requise, le processus électoral reprend depuis le début.

Les membres des organes représentatifs sont élus selon un système de « représentation proportionnelle dans une circonscription unique couvrant l’ensemble du territoire de la collectivité » et « tous les électeurs ayant leur résidence permanente (domicile) sur le territoire de la collectivité qui se rendent aux urnes élisent, sur la base de listes de candidats, tous les membres de l’organe représentatif de cette collectivité ». Le nombre de membres de chaque organe représentatif varie en fonction de la population de la collectivité concernée. Il est fixé dans la loi sur l’autonomie locale et régionale (voir tableau 2 ci-dessus).

La loi sur les élections locales prévoit des procédures détaillées pour l’élection des organes représentatifs et exécutifs des collectivités au suffrage direct et au scrutin secret et contient des dispositions sur la constitution des commissions électorales et l’organisation des bureaux de vote, les voies de recours disponibles en cas d’irrégularités et le contrôle du processus par la Cour constitutionnelle croate ainsi que d’autres dispositions nécessaires au bon déroulement des élections locales.

Enfin, en plus des organes exécutifs susmentionnés, les organes représentatifs bénéficient de l’assistance de services et départements administratifs établis au sein des collectivités pour exercer les tâches relevant de leur autonomie et les tâches déléguées par l’administration d’État.

Compte tenu de ce qui précède, le droit des citoyens d’élire les organes représentatifs et exécutifs librement, au scrutin secret et au suffrage direct, universel et égalitaire conformément à l’article 3.2 de la Charte est garanti de manière adéquate dans la Constitution et la législation de la République de Croatie : l’article 3.2 de la Charte est donc pleinement respecté dans le pays.

Article 4.1
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences de base des collectivités locales sont fixées par la Constitution ou par la loi. Toutefois, cette disposition n'empêche pas l'attribution aux collectivités locales de compétences à des fins spécifiques, conformément à la loi


La Constitution contient des dispositions spécifiques sur les pouvoirs et responsabilités de chaque type de collectivité locale tandis que la loi sur l’autonomie locale et régionale régit plus en détail la gestion des affaires qui relèvent de leur compétence en vertu de l’article 129a de la Convention.

Par ailleurs, la loi sur l’autonomie locale et régionale prévoit la possibilité de promulguer des lois spéciales qui étendent la liste des compétences et régissent certaines activités citées dans la loi en vue de définir les tâches que les collectivités locales sont tenues d’organiser et celles qu’elles pourront exercer, ce qui rend la situation en Croatie conforme à la disposition de l’article 4.1 de la Charte.

Compte tenu de ce qui précède, la situation en Croatie est conforme à l’article 4.1 de la Charte.

Article 4.2
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n'est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité


Malgré la précédente Recommandation 391 (2016) du Congrès soulignant la nécessité d’intégrer dans les lois applicables et dans la Constitution de la République de Croatie des dispositions consacrant le droit des collectivités locales d’exercer pleinement leur initiative sur toute question qui n’est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité, la législation croate continue de rester silencieuse sur ce point.

Ni la Constitution ni la loi sur l’autonomie locale et régionale ne prévoient de droit plus général autorisant les collectivités locales à exercer leur discrétion pour les questions qui ne sont pas expressément exclues de leur compétence ou attribuées à d’autres autorités, mais elles établissent une liste d’affaires et de questions spécifiques entrant dans le champ de compétence de chaque collectivité. Par conséquent, les lois de la Croatie définissent les limites des compétences des collectivités de manière restrictive plutôt que de leur donner toute latitude pour gérer leurs propres affaires locales en prévoyant un certain nombre d’exclusions.

Les dispositions législatives régissant la compétence de chaque type de collectivité locale subordonnent l’extension du champ des compétences ou l’exercice de l’initiative concernant les fonctions non répertoriées à la promulgation de lois spéciales, ce qui place ces questions sous le contrôle du Parlement et hors de la portée des collectivités locales.

Cette réglementation accorde aux collectivités locales un simple droit conditionnel et ne leur laisse pas toute latitude pour exercer leurs propres initiatives sur toute question qui n’est pas attribuée à une autre autorité. Aux limitations législatives observées dans la formulation des lois applicables de la Croatie s’ajoute le fait que la mise en œuvre des initiatives des collectivités locales nécessite un accès aux ressources financières adéquates et ne pourra être assurée si l’État central décide d’intervenir et de suspendre ces initiatives, ou d’exercer d’autres formes de contrôle susceptibles de bloquer leur avancement.

Les rapporteures concluent par conséquent que l’article 4.2 de la Charte est partiellement respecté en Croatie.

Article 4.3
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

L'exercice des responsabilités publiques doit, de façon générale, incomber, de préférence, aux autorités les plus proches des citoyens. L'attribution d'une responsabilité à une autre autorité doit tenir compte de l'ampleur et de la nature de la tâche et des exigences d'efficacité et d'économie.

 


 L’article 4.3 de la Charte consacre le principe de décentralisation et le principe de subsidiarité en demandant que l’exercice des responsabilités publiques incombe aux autorités les plus proches du citoyen, en l’occurrence les collectivités locales.

La dynamique de l’interaction entre ces deux principes en Croatie est expliquée comme suit par le chercheur Mirko Klaric : « L’un des enjeux primordiaux dans le processus de décentralisation est la question de la capacité des collectivités locales et de leur aptitude à exécuter les missions publiques. Les capacités organisationnelles, financières ou professionnelles des collectivités locales sont des éléments essentiels à la mise en œuvre du principe fondamental de subsidiarité. Or, ce principe exige également des autorités centrales qu’elles apportent un soutien aux collectivités locales pour que celles-ci puissent assurer les missions et services publics au niveau local »[5].

Les communes fournissent des services à leurs citoyens selon leurs moyens et leurs ressources financières (qui sont généralement à la mesure de leur taille). Il n’y a pas de norme universelle de prestation de services en Croatie ; au contraire, on observe des disparités de ce point de vue, attribuées aux différences de moyens et de ressources financières des collectivités locales. Les grandes villes comme Zagreb, Rijeka, Split et Osijek sont plus à même d’organiser leurs activités, d’exécuter leurs missions et d’offrir des services et un soutien matériel à leurs citoyens que les communes de plus petite taille, qui ont moins de moyens et de ressources financières à leur disposition.

De très nombreuses communes ont de faibles capacités administratives et peu de possibilités de générer des recettes fiscales ; elles ne disposent pas des moyens et des ressources financières nécessaires pour exécuter leurs missions avec efficacité, favoriser le développement et le bien-être de leurs populations ou pourvoir aux besoins de leurs citoyens, proposer des services et un soutien matériel adéquats ou tirer parti des économies d’échelle en raison de leur taille, de leur population et de leur situation financière.

Les réponses données par une commune de Croatie lors de la visite témoignent de l’ampleur du problème : son principal défi était la construction d’une école maternelle pour un coût estimé à 1 000 000 € hors plan national de reprise et de résilience (NPOO)/fonds approuvés par l’UE. La construction de cette école étant le projet stratégique le plus important pour son avenir, elle prévoyait d’utiliser toutes les ressources dont elle disposait pour le mener à bien.

La structure administrative et territoriale verticale de la Croatie d’après le recensement de 2021 et les statistiques disponibles concernant la répartition de la population dans les villes et communes du pays, présentées dans le tableau 3, sont éloquentes à cet égard et donnent une idée exacte de la situation dans le pays.

 Le nombre de collectivités locales dans le pays (555 au total, plus la ville de Zagreb) semble relativement excessif et tend à restreindre les perspectives de développement du secteur des collectivités locales. Ce constat est de plus en plus partagé aujourd’hui compte tenu des nouveaux enjeux qui se profilent, notamment la nécessité de concentrer les efforts sur l’énergie verte, le changement climatique, la protection de l’environnement naturel, la transition numérique, la participation des jeunes aux projets locaux et les initiatives encourageant les jeunes à prendre part aux affaires locales[7]. La structure administrative existante, et plus particulièrement le nombre et la taille des petites communes rurales, ne peut répondre à ces défis.

Comme le montre le tableau 4[8], il y a 394 communes de moins de 5 000 habitants et seulement 34 communes de plus de 5 000 habitants en Croatie. Par ailleurs, les 119 petites communes que compte le pays, soit 55 communes de moins de 1 000 habitants et 64 communes de moins de 1 500 habitants, représentent une population d’à peine 122 582 personnes.

Ces chiffres donnent une indication du problème de capacité qui existe dans les collectivités locales de Croatie et qui est aggravé par le déclin et le vieillissement de la population observé dans les données démographiques.

Il ne semble pas y avoir eu de mouvement important de décentralisation des tâches vers les collectivités locales ces dernières années. Le problème fondamental concerne la délégation des compétences de base (écoles primaires, permis, etc.) au niveau local, qui nécessite semble-t-il l’accord préalable de l’assemblée du comté. Les compétences de base doivent être transférées au niveau local en vertu de la loi, de sorte que les villes et les communes puissent assurer librement et en toute indépendance la réalisation de l’ensemble de ces tâches, dans le cadre de l’autonomie définie par la Constitution de la République de Croatie. Il est proposé que les collectivités locales dotées de moyens plus importants soient autorisées à exercer les missions publiques d’un niveau supérieur sans accord préalable si elles sont en mesure de le faire avec les fonds existants.

Parmi les mesures de réforme envisagées par le plan national de reprise et de résilience 2021-2026 pour améliorer l’efficacité du système des collectivités locales et régionales figurait le modèle de cofinancement en cas de fusions fonctionnelles et effectives des collectivités locales. L’efficacité du système dépend principalement de sa structure organisationnelle et non uniquement du nombre de collectivités. Dans un premier temps, l’accent a été mis non pas sur la suppression des collectivités mais sur leur intégration fonctionnelle, pouvant déboucher à terme sur une fusion effective. Les collectivités n’ayant pas fait usage de cette possibilité, le gouvernement croate a mis en place en septembre 2022 un système d’incitations visant à encourager les fusions fonctionnelles ou effectives volontaires entre collectivités locales et prévoyant l’octroi d’un soutien financier à celles qui opteraient pour l’intégration fonctionnelle et désigneraient un responsable conjoint ou créeraient un département/service administratif conjoint ou une société/institution commune pour exécuter des tâches conjointement. Les aides sont particulièrement généreuses pour les fusions effectives volontaires, dans lesquelles le territoire d’une collectivité locale est annexé à une autre collectivité locale.

La fusion des communes aiderait les collectivités locales à s’adapter aux nouvelles réalités, à faire face aux nouveaux défis et à s’acquitter de leurs missions avec efficacité, réduisant ainsi les disparités par rapport à d’autres collectivités locales et les différences dans le niveau de service offert aux citoyens selon les communes. Les rapporteures notent que les problèmes et les externalités négatives associés au nombre excessif de petites communes sont bien reconnus en Croatie. Soucieux de résoudre ou de limiter ce problème, le gouvernement a annoncé un ensemble de mesures visant à encourager la fusion fonctionnelle ou effective volontaire des collectivités locales. Lors de la visite, il a été indiqué aux rapporteurs que ces fusions ont suscité moins d’intérêt que prévu de la part des collectivités locales malgré les aides financières accordées en cas de fusion fonctionnelle volontaire avec d’autres communes. Lors de la procédure de consultation, le ministère de la Justice et de l’Administration publique a souligné que 79 collectivités locales avaient été impliquées dans des fusions fonctionnelles, un nombre qu’il qualifie de satisfaisant.

De l’avis des rapporteurs, il semble pertinent d’encourager de telles fusions, éventuellement en prévoyant des incitations supplémentaires pour permettre une décentralisation effective, ces mesures profitant à la fois aux collectivités locales et aux citoyens. Pour l’heure, les principes de subsidiarité et de décentralisation ne semblent pas pleinement appliqués. Les rapporteures concluent par conséquent que l’article 4.3 de la Charte est partiellement respecté en Croatie.

Article 4.4
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences confiées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et entières. Elles ne peuvent être mises en cause ou limitées par une autre autorité, centrale ou régionale, que dans le cadre de la loi.

 


L’article 4.4 de la Charte vise à éviter les chevauchements de compétences au niveau local au-delà de ce que prévoit la loi, de manière à ce que les collectivités locales aient des compétences pleines et exclusives, sous réserve de l’existence et de l’exploitation de synergies nécessitant la promulgation de dispositions législatives claires délimitant la sphère de compétence de chacun des acteurs.

Bien que la suppression des services de l’administration d’État dans les comtés et les amendements correspondants à la législation soient considérés comme une évolution positive et que des progrès aient été accomplis depuis la précédente visite de suivi en 2016, la délégation a constaté que la question du chevauchement des compétences posait toujours problème aux collectivités locales en Croatie.

Les compétences des différents échelons et types de collectivités locales restent définies en des termes généraux dans la Constitution et la loi et un recouvrement partiel des domaines de compétences entre différents niveaux de l’autonomie locale continue d’être observé.

Lors de la procédure de consultation, le ministère de la Justice et de l’Administration publique a exprimé son désaccord avec l’avis des rapporteures concernant l’existence d’un chevauchement de compétences, affirmant que celles-ci sont réparties clairement et qu’elles sont précisées dans la législation spécifique.

Cependant, les soins de première ligne relèvent du domaine de compétence autonome des communes (et des grandes villes), mais la loi prévoit également qu’ils font partie des pouvoirs décisionnels des comtés en matière de soins médicaux. Il en va de même pour l’urbanisme, l’aménagement du territoire et l’éducation, qui sont à la fois de la compétence des communes, des villes et des comtés. La circulation routière est classée de manière générale parmi les compétences des communes et des villes et grandes villes tandis que les infrastructures de transport et de circulation sont considérées comme étant du ressort des comtés.

Ces chevauchements entre les différents échelons des collectivités locales risquent d’entraîner des conflits de compétences, de reléguer au second plan les petites communes ou les villes par rapport aux comtés et de marginaliser les compétences identiques des communes et des villes ; ils montrent que la délimitation claire des compétences requise par l’article 4.4 de la Charte fait défaut. Par ailleurs, la délivrance de permis de construire et d’implantation, l’entretien des voies publiques et le développement économique ont été exclus de la sphère d’attributions des communes et des villes et relèvent de la seule compétence des comtés.

Enfin, comme l’ont reconnu les interlocuteurs rencontrés par la délégation lors de la visite de suivi, le mécanisme d’attribution des compétences aux collectivités locales implique en lui-même que la délégation de ces compétences dépend des actes de l’État central et de la disponibilité de fonds pour l’exécution de ces missions/compétences.

Compte tenu de ce qui précède, les rapporteures concluent que la situation en Croatie n’est pas conforme à l’article 4.4 de la Charte.

Article 4.5
Portée de l'autonomie locale - Non ratifié

En cas de délégation des pouvoirs par une autorité centrale ou régionale, les collectivités locales doivent jouir, autant qu'il est possible, de la liberté d'adapter leur exercice aux conditions locales.


L’article 4.5 de la Charte dispose qu’enLa structure administrative des collectivités locales et leur connaissance de la situation locale peuvent en faire des organes adéquats pour l’exécution de certaines fonctions dont la responsabilité incombe en dernier ressort à des autorités plus locales. Il importe, toutefois, pour que le recours à ce type de délégation n’empiète pas de manière excessive sur la sphère d’autonomie du niveau local, que ce dernier soit autorisé, quand cela est possible, à prendre en compte la situation locale dans l’exercice des pouvoirs délégués. Il est reconnu néanmoins que pour certaines fonctions, la nécessité d’une réglementation uniforme peut ne laisser aucune place à un quelconque pouvoir discrétionnaire de la collectivité locale.

 

 D’après la délégation nationale de la Croatie au Congrès et les associations nationales de pouvoirs locaux et régionaux, les compétences déléguées reposent sur un ensemble fixe de règles (cadre juridique), qui les rendent difficilement adaptables aux conditions locales.

 

 Il apparaît que la structure actuelle de délégation ou de décentralisation, associée à l’absence d’autonomie financière, ne permet pas aux autorités locales de jouir d’une grande latitude de ce point de vue. Or, que ces compétences déléguées ou décentralisées découlent de la loi ou d’autres dispositions, les collectivités locales devraient être libres de les adapter aux conditions locales en vertu de l’article 4.5 de la Charte. Le contrôle financier strict des collectivités locales semble également être un obstacle important à l’exercice de cette liberté.

 

 Par ailleurs, comme nous le verrons ultérieurement sur la question du contrôle (article 8), il semblerait qu’il n’y ait pas de ligne de démarcation claire entre l’État central et les collectivités locales s’agissant des compétences déléguées ou décentralisées. L’État central continue de contrôler les actes des collectivités locales et les expressions du pouvoir discrétionnaire des collectivités locales font l’objet d’un contrôle direct non pas par la haute cour administrative de Croatie mais par l’État central lui-même. Cette situation pourrait conférer à ce dernier une prérogative/un avantage lui permettant d’intervenir et de suspendre immédiatement tout acte d’une collectivité locale qu’il jugerait « irrégulier », contraignant ainsi la collectivité concernée à demander un examen de cette décision par la haute cour administrative (avant de pouvoir poursuivre ou reprendre l’exercice de la compétence déléguée).

Compte tenu de ce qui précède, les rapporteures concluent que la situation en Croatie n’est pas conforme à l’article 4.5 de la Charte.

Article 4.6
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, autant qu'il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décision pour toutes les questions qui les concernent directement.

 


S’agissant de l’exigence de consultation en temps utile des collectivités locales pour toutes les questions qui les concernent directement ou les touchent indirectement conformément à l’article 4.6 de la Charte, la délégation a observé que cette consultation n’est pas formellement prévue ; elle est menée de manière informelle, si bien que la République de Croatie respecte partiellement l’article 4.6 de la Charte.

 

  D’après les réponses reçues pendant et après la visite de la délégation de suivi, il ne semble pas y avoir de cadre de consultation bien établi entre le gouvernement central et les collectivités locales et régionales.

 

  Comme l’ont indiqué la délégation nationale de la Croatie auprès du Congrès et les associations nationales des collectivités locales et régionales, les seuls intermédiaires permettant aux collectivités locales et régionales d’apporter une contribution sont les membres de la commission parlementaire pour les collectivités locales et régionales du Parlement croate, qui sont aussi les maires de leurs communes, l’association des comtés de Croatie, l’association des villes de Croatie et l’union croate des communes. L’avis de ces organes serait sollicité lors de l’examen de textes législatifs et de réglementations les concernant directement. Bien que les collectivités locales puissent exercer une certaine influence par le biais de leurs organisations/associations nationales, celle-ci se limite à des propositions. Des consultations de l’opinion publique pendant une période de 30 jours sont également prévues en vertu de la loi sur la liberté de l’information. Elles se font par l’intermédiaire du portail central de consultation électronique.

 

 Le ministère des Finances tient des échanges formels et informels avec les collectivités locales et régionales et les associations susmentionnées sur les questions opérationnelles et législatives liées aux collectivités locales, lors desquels des informations et observations sont transmis sur les questions financières et administratives ayant trait à la gouvernance locale.

 

  Par ailleurs, le Premier ministre et les principaux ministres organisent régulièrement tout au long de l’année des réunions publiques conjointes avec l’ensemble des préfets des comtés et présidents des associations de l’autonomie locale (LGA) dans différentes régions de Croatie, afin d’examiner les questions régionales et stratégiques relatives à l’offre de services publics.

 

 Cela étant, les moyens de consultation susmentionnés ne reposent pas sur une méthode imposée ou bien établie de consultation effective des collectivités locales et régionales sur les questions qui les concernent directement. Les rapporteures sont d’avis que des améliorations considérables (voire une toute nouvelle approche) sont nécessaires en la matière. Un cadre de consultation entre le gouvernement central et les collectivités locales et régionales doit être établi, codifié et défini précisément pour assurer transparence et responsabilité. En outre, toute procédure de consultation informelle entre le gouvernement et ses ministères et les collectivités locales et régionales ou les associations de collectivités locales portant sur les questions opérationnelles et législatives relatives aux collectivités locales doit être codifiée en détail puis promulguée dans la loi, afin qu’elle devienne contraignante et systématique.

 

 Compte tenu de l’existence de moyens de consultation informels, mais non codifiés et définis dans la loi, entre le gouvernement central et les collectivités locales et régionales, les rapporteures concluent que la Croatie respecte partiellement l’article 4.6 de la Charte.

Article 5
Protection des limites territoriales des collectivités locales - Article ratifié

Pour toute modification des limites territoriales locales, les collectivités locales concernées doivent être consultées préalablement, éventuellement par voie de référendum là où la loi le permet.


L’article 7 de la loi sur l’autonomie locale et régionale prévoit que « toute modification du territoire d’une collectivité locale nécessitera de recueillir au préalable l’opinion des habitants de cette collectivité. Cet avis ne sera pas contraignant ».

 

Le fait de solliciter l’opinion des habitants de la collectivité locale dont on envisage de modifier les limites du territoire répond à l’exigence de consultation de la communauté locale concernée et la nature non contraignante du résultat de ce processus entre dans la définition du terme « consultation ».

 

Ces éléments permettent de conclure que la Croatie respecte l’article 5 de la Charte.

Article 6.1
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Sans préjudice de dispositions plus générales créées par la loi, les collectivités locales doivent pouvoir définir elles mêmes les structures administratives internes dont elles entendent se doter, en vue de les adapter à leurs besoins spécifiques et afin de permettre une gestion efficace.


 L’administration des collectivités locales est assurée par leurs organes représentatifs et exécutifs, qui sont élus par la population lors d’élections organisées conformément à la loi, comme indiqué précédemment.

 

 De manière générale, les dispositions de la loi sur l’autonomie locale et régionale définissent le nombre de représentants de chaque collectivité (de 7 à 51) selon le nombre d’habitants et le type de collectivité, ainsi que les fonctions exercées au sein de l’organe exécutif de chaque collectivité (cf. tableau 2 et partie 2.1 du présent rapport).

 

Outre les dispositions générales susmentionnées et conformément à l’article 6.1 de la Charte, l’article 129b de la Constitution de Croatie donne expressément aux collectivités locales et régionales le pouvoir de réglementer leurs propres structures administratives internes. Cet article est libellé comme suit : « Les collectivités locales et régionales ont le droit, dans les limites fixées par la loi, de régler de manière autonome, par le biais de leurs statuts, l’organisation interne et les compétences de leurs organes et de les adapter aux capacités et aux besoins locaux ».

 

 S’agissant de la conduite des affaires internes de la collectivité et des procédures y relatives, l’article 33 de la loi sur l’autonomie locale et régionale dispose que le fonctionnement de l’organe représentatif est régi par son règlement conformément à la loi susmentionnée et aux statuts applicables. Le règlement est adopté à la majorité des membres de l’organe représentatif.

 

 En plus de ces dispositions, le chapitre VI de la loi sur l’autonomie locale et régionale prévoit la création de départements et de services administratifs des collectivités locales et régionales pour exécuter les tâches relevant de l’autonomie des collectivités locales et régionales et celles qui leur sont confiées par l’administration d’État.

 

 En vertu de l’article 35 de cette loi, l’organe représentatif peut et doit notamment mettre en place des organes de travail dont il élit et révoque les membres et réglementer l’organisation et le champ d’action des organes administratifs des collectivités locales. L’article 56 de la loi dispose que les collectivités locales assurent l’exécution des tâches administratives et autres tâches professionnelles au sein de leurs organes administratifs.

Compte tenu de ces éléments, les rapporteures concluent que la Croatie respecte l’article 6, paragraphe 1, de la Charte.

Article 6.2
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Le statut du personnel des collectivités locales doit permettre un recrutement de qualité, fondé sur les principes du mérite et de la compétence; à cette fin, il doit réunir des conditions adéquates de formation, de rémunération et de perspectives de carrière.


 La loi sur les salaires au sein des collectivités locales et régionales (comtés) édicte les règles relatives au traitement et indemnités des préfets de comté, des maires et des fonctionnaires et employés des départements et services administratifs des collectivités locales. Cela étant, elle ne règle pas les problèmes liés à la rémunération des employés des collectivités locales et régionales, dont le versement dépend de l’aide financière du budget de l’État du fait de la petite taille de ces collectivités. La loi précise que le montant total des fonds servant à financer les traitements au sein des collectivités locales et régionales doit être inférieur à 20 % des revenus d’exploitation de la collectivité générés au cours de l’année précédente, diminuées des revenus définis par la loi sur les salaires dans la collectivité locale et régionale en question.

 

En 2023, le Parlement croate a modifié la loi sur les salaires au sein des collectivités locales et régionales (comtés), réglementant ainsi les restrictions budgétaires relatives au traitement des employés des communes, des villes et des comtés. Par conséquent, le budget consacré au traitement des employés des collectivités locales et régionales, qui était de 20 %, doit désormais rester inférieur à 18 % des recettes de la collectivité générés au cours de l’année précédant l’exercice budgétaire considéré.

 

 Le ministère de la Justice et l’administration d’État ont affirmé que cet amendement était favorable aux communes, aux villes et aux comtés, même s’il ne semblait pas l’être à première vue. En effet, les 20 % incluaient précédemment des fonds qui ne sont désormais plus pris en compte dans les recettes de ces collectivités, si bien que l’allocation de 18 % permet d’obtenir des fonds plus importants en valeur absolue. La même limite est introduite pour les collectivités qui, au cours de l’année précédant l’exercice budgétaire considéré, ont perçu des ressources de péréquation fiscale du budget et des dotations de péréquation pour les compétences décentralisées d’un montant supérieur à 20 % des recettes, tandis que le montant versé pour les rémunérations était supérieur à 15 %. Le ministère a précisé qu’une réforme complète du système n’interviendra que dans les années à venir.

 

  Au Parlement, les rapporteures ont été informées que ce changement était jugé satisfaisant car il permettait d’augmenter les traitements des fonctionnaires et employés des collectivités locales dans un contexte où il était de plus en plus difficile d’attirer et de fidéliser les agents en raison des salaires élevés dans le secteur privé.

 

L’article 56b de la loi sur l’autonomie locale et régionale dispose que les fonctionnaires, c’est-à-dire les personnes qui exécutent des tâches administratives et professionnelles au sein de l’organe pour lequel ils travaillent, doivent être encouragés à suivre une formation professionnelle continue et à assister à des stages et séminaires de formation.

 

Compte tenu de ces éléments et considérant que la loi susmentionnée énonce les conditions d’emploi des employés des collectivités locales, les rapporteures concluent que la Croatie respecte l’article 6, paragraphe 2, de la Charte.

Article 7.1
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Le statut des élus locaux doit assurer le libre exercice de leur mandat.


L’article 18 de la loi sur l’autonomie locale et régionale dispose que chaque commune, chaque ville et chaque comté prend des décisions de manière autonome sur les questions relevant de son autonomie, conformément à la Constitution de la République de Croatie et à cette loi. Par conséquent, les organes représentatifs élus, les conseils municipaux et l’assemblée des comtés, ainsi que les organes exécutifs comme les maires des communes ou des villes et le préfet de comté, exercent leurs fonctions librement.

 

Les rapporteures n’ont eu connaissance d’aucune plainte à ce sujet lors de la visite.

 

Ces éléments permettent de conclure que la Croatie respecte l’article 7, paragraphe 1, de la Charte.

Article 7.2
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Il doit permettre la compensation financière adéquate des frais entraînés par l'exercice du mandat ainsi que, le cas échéant, la compensation financière des gains perdus ou une rémunération du travail accompli et une couverture sociale correspondante.


Les fonctions de maire, de préfet et d’adjoint exercées au sein des organes exécutifs des collectivités locales de Croatie sont des fonctions salariées. Conformément à l’article 90 de la loi sur l’autonomie locale et régionale, dans les huit jours suivant leur entrée en fonctions, ces personnes indiquent par écrit si elles choisissent d’occuper leurs fonctions à titre professionnel, auquel cas elles bénéficieront d’un traitement et d’autres droits en application de l’article 90a de cette même loi (leur durée de service sera également considérée comme une période ouvrant droit à retraite) ou à titre bénévole, auquel cas elles auront droit à une indemnité. Si aucune notification n’est reçue, il est présumé que les fonctions seront assurées à titre bénévole.

 

Les critères de base servant au calcul des traitements sont définis dans la loi sur les salaires au sein des collectivités locales et régionales (de comté) qui dispose que le traitement d’un préfet de comté, d’un maire et de leurs adjoints respectifs est le produit de la base de calcul des traitements par le coefficient de complexité des tâches, majoré de 0,5 % par année de service ouvrant droit à retraite, dans la limite de 20 %. La base et les coefficients utilisés pour le calcul des traitements sont déterminés par décision de l’organe représentatif de la collectivité sur proposition du maire/préfet de comté. La loi fixe le plafond de traitement, c’est-à-dire le maximum pouvant être versé, base et coefficient inclus.

 

Les personnes qui ont servi à titre professionnel au cours des six derniers mois précédant la cessation de leurs fonctions ont droit à une indemnité compensatrice de traitement et de service ouvrant droit à retraite pendant six mois après la cessation des fonctions, au taux de traitement moyen perçu au cours des six derniers mois de service. Les personnes qui ont servi à titre professionnel pendant moins de six mois avant la cessation de leurs fonctions ont droit, après la cessation des fonctions, à une indemnité compensatrice de traitement et de service ouvrant droit à retraite pendant une période égale au nombre de mois durant lesquels elles ont servi à titre professionnel, au taux de traitement moyen perçu avant la cessation de fonctions. Les personnes qui n’ont pas exercé leurs fonctions à titre professionnel ne perçoivent pas d’indemnité lorsqu’elles cessent leurs fonctions.

 

Les membres des organes représentatifs n’ont pas droit à un traitement car ils exercent des fonctions à titre honoraire mais ils perçoivent une indemnité financière pour l’exécution de leurs tâches conformément à une décision de l’organe représentatif, au taux fixé par ce dernier.

 

La rémunération des membres représentatifs est régie à l’article 31a de la loi sur l’autonomie locale et régionale sur une base nette par membre, plafonnée pour chaque type de collectivité locale ou régionale en fonction du nombre d’habitants, comme le montre le tableau 5.

Le même article prévoit que l’indemnité peut être majorée d’un maximum de 50 % pour le président d’un organe représentatif et d’un maximum de 30 % pour les vice-présidents (jusqu’à deux).

 

D’après les réponses écrites transmises à la délégation, les partis politiques et les conseillers indépendants reçoivent un financement régulier de l’assemblée municipale (dans le cadre d’un système entièrement informatisé) qui fait l’objet d’une provision dans le budget annuel ; pour faciliter le travail des représentants, des bureaux sont mis à leur disposition.

 

Certains interlocuteurs ont fait valoir qu’une augmentation du montant de l’indemnité des représentants élus devrait être envisagée compte tenu du temps qu’ils sont appelés à consacrer à leurs fonctions, de l’inflation et du coût de la vie, afin qu’ils perçoivent une indemnisation adéquate pour perte de revenus, alignée sur les niveaux de rémunération et d’indemnisation en vigueur en Croatie.

 

Compte tenu de ces éléments, les rapporteures considèrent que la Croatie respecte l’article 7, paragraphe 2, de la Charte.

Article 7.3
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Les fonctions et activités incompatibles avec le mandat d'élu local ne peuvent être fixées que par la loi ou par des principes juridiques fondamentaux.


 L’article 7.3 de la Charte vise à faire en sorte que les fonctions incompatibles avec le mandat d’élu local soient fixées par la loi.

 

 Bien que ces fonctions incompatibles ne soient pas expressément et spécifiquement définies dans la loi sur l’autonomie locale et régionale, l’article 30 prévoit un mécanisme de recours en cas de conflit d’intérêts. En particulier, cette loi dispose que : « [t]out membre d’un organe représentatif qui, durant son mandat, accepte d’exercer des fonctions considérées comme incompatibles avec ce dernier en vertu des dispositions d’une loi spéciale, sera mis en indisponibilité et remplacé par un adjoint pendant la durée d’exercice de ces fonctions conformément aux dispositions de la loi spéciale » ; une telle mesure ne peut être prise qu’une fois au cours du mandat.

 

 Certains types de conflits d’intérêts sont mentionnés dans la loi sur la prévention des conflits d’intérêts dans l’exercice de fonctions publiques. Celle-ci interdit notamment aux fonctionnaires (terme incluant les préfets et le maire de la ville de Zagreb ainsi que leurs adjoints et les maires des villes et des communes et leurs adjoints) de recevoir ou solliciter des avantages ou une promesse d’avantages pour exercer une charge publique, d’exercer ou d’obtenir un droit s’il ne respecte pas le principe de l’égalité devant la loi, d’utiliser à des fins abusives les droits spéciaux découlant de l’exercice d’une charge publique ou nécessaires à l’exercice de cette charge, de recevoir une rémunération supplémentaire pour des tâches découlant de l’exercice d’une charge publique, de solliciter, d’accepter ou de recevoir un bien ou un service en échange d’un vote ou pour influencer une décision prise par un organe à des fins personnelles ou au profit d’une personne liée, de promettre un emploi ou tout autre droit en échange d’un cadeau ou de la promesse d’un cadeau, d’exercer une influence pour obtenir un emploi ou des contrats dans le cadre des passations de marchés publics, d’utiliser des informations confidentielles sur les activités des organismes publics pour servir des intérêts personnels ou ceux d’une personne liée, d’utiliser une fonction officielle de toute autre manière en influençant les décisions des autorités législatives, exécutives ou judiciaires pour servir des intérêts personnels ou ceux d’une personne liée, obtenir un privilège ou un droit, de conclure une affaire juridique, ou de recevoir de toute autre manière des avantages servant des intérêts personnels ou ceux d’une personne liée.

 

 Cette loi interdit également l’acceptation d’une autre fonction publique, l’exercice de toute autre activité rémunérée lorsque la fonction publique est exercée à titre professionnel, ainsi que la direction ou la participation au conseil de surveillance d’une société privée (sauf exception), et oblige les fonctionnaires qui détiennent plus de 0,5 % des parts d’une société privée à céder ces participations à une personne à laquelle ils ne sont pas liés ; les sociétés en question ne peuvent établir une relation d’affaires avec une autorité de l’État ou un organisme public dans lequel le fonctionnaire exerce une charge publique ; elles ne peuvent pas non plus faire partie des soumissionnaires ou des fournisseurs dans cette relation d’affaires. La loi sur la prévention des conflits d’intérêts dans l’exercice de fonctions publiques prévoit d’autres obligations applicables aux titulaires des fonctions susmentionnées, pour prévenir ou résoudre les situations de conflit d’intérêts.

 

Compte tenu de ces éléments, les rapporteures concluent que la Croatie respecte l’article 7, paragraphe 3, de la Charte.

Article 8.1
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif sur les collectivités locales ne peut être exercé que selon les formes et dans les cas prévus par la Constitution ou par la loi.


La limitation de l’exercice du contrôle administratif sur les collectivités locales aux formes et aux cas prévus par la Constitution et par la loi est liée à l’autonomie dont les collectivités locales devraient jouir dans l’administration des affaires relevant de leur compétence. L’article 137 de la Constitution de la République de Croatie prévoit que dans l’administration des affaires relevant de leur compétence, les collectivités locales et régionales sont autonomes et ne sont soumises qu’au contrôle de la constitutionnalité et de la légalité par les organes autorisés du gouvernement national, en l’occurrence, le ministère de la Justice et de l’Administration publique. S’appuyant sur cette disposition constitutionnelle, la loi sur l’autonomie locale et régionale édicte des règles supplémentaires sur l’étendue de l’intervention et du contrôle de l’État central aux articles 78 à 89.

 

 La légalité des travaux et des actes des collectivités locales et régionales est contrôlée par le ministère de la Justice et de l’Administration publique, afin d’assurer la constitutionnalité et la légalité. Si des irrégularités sont observées, le ministère peut décider d’annuler l’acte en question et de le déclarer illégal ; bien qu’un recours contre une telle décision ne soit pas possible, la collectivité locale concernée peut engager un contentieux administratif devant la haute cour administrative.

 

  La légalité des actes généraux adoptés dans le cadre de l’autonomie des organes représentatifs des collectivités locales est assurée par les organes compétents de l’administration d’État, chacun dans son domaine de compétence, conformément à une loi distincte et la procédure est spécifiée dans la loi. Tous les organes de l’administration d’État ont le droit de contrôler la légalité des actes généraux des collectivités locales, chacun dans son domaine de compétence. La loi précise également que si les dispositions d’un acte général d’une collectivité locale ou régionale sont considérées comme contraires à la Constitution ou à la loi, ou s’il est décidé que des irrégularités ont été commises dans le processus d’adoption de cet acte général, l’organe représentatif est invité à corriger les irrégularités constatées.

 

  Aux termes de l’article 82, lorsque l’organe compétent de l’administration d’État adopte une décision de suspension d’un acte général, il soumet à la haute cour administrative de Croatie une demande d’examen de la légalité de ce dernier.

 

 Une distinction est opérée entre les actes généraux et les statuts des collectivités. Lorsqu’il existe un litige concernant la légalité d’un acte général ou en cas d’irrégularités, la question est portée devant la haute cour administrative de Croatie pour examen. Si le litige concerne les statuts d’une collectivité, c’est la Cour constitutionnelle de Croatie qui est saisie.

 

  Quand elle décide d’une suspension, l’administration d’État doit proposer sans délai au gouvernement la saisine de la Cour constitutionnelle de Croatie pour un contrôle de conformité avec la Constitution et les lois de la République de Croatie. Si la Cour n’a pas été saisie dans un délai de 30 jours à compter de la décision de suspension, la suspension cesse.

 

  Avant 2013, la Cour constitutionnelle avait compétence pour toutes les réglementations locales mais depuis cette date, elle ne contrôle plus que la constitutionnalité des statuts locaux. En vertu de la loi sur le contentieux administratif entrée en vigueur le 1er janvier 2012, la haute cour administrative s’est vu confier la compétence de contrôler la légalité des actes généraux des collectivités locales et régionales, ainsi que des actes ou omissions (actes exécutoires) dans le domaine public.

 

Au cours de la visite, les rapporteures n’ont pas été informées d’un quelconque contrôle contraire ou non conforme à la Constitution ou à la loi. Par ailleurs, la suppression des services de l’administration d’État dans les comtés et les réformes législatives correspondantes sont une évolution positive qui entre en ligne de compte dans l’évaluation du respect de l’article 8.1 par la Croatie.

 

  Compte tenu de ces éléments, les rapporteures concluent que la Croatie respecte l’article 8, paragraphe 1, de la Charte.

Article 8.2
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif des actes des collectivités locales ne doit normalement viser qu’à assurer le respect de la légalité et des principes constitutionnels. Le contrôle administratif peut, toutefois, comprendre un contrôle de l’opportunité exercé par des autorités de niveau supérieur en ce qui concerne les tâches dont l’exécution est déléguée aux collectivités locales.


Le contrôle administratif devrait normalement se limiter à la question de la légalité des actes des collectivités locales et non de leur opportunité, hormis pour les fonctions déléguées où l’autorité à l’origine de la délégation peut souhaiter exercer un certain contrôle de la manière dont la tâche est exécutée. Cela ne devrait pas, toutefois, avoir pour résultat d’empêcher la collectivité locale en question d’exercer un certain pouvoir d’adaptation conformément à l’article 4, paragraphe 5, de la Charte[9], tout en respectant le principe de proportionnalité du contrôle de l’État.

 

Par rapport aux observations qui avaient été faites dans le précédent rapport du Congrès, la loi sur l’autonomie locale et régionale contient toujours des dispositions vastes et détaillées sur le pouvoir du gouvernement central d’intervenir dans les affaires locales et d’exercer ses fonctions de contrôle sur les compétences déléguées. L’article 8, paragraphe 2, de la Charte continue d’être respecté en raison de l’existence de dispositions législatives détaillées sur ce point, mais certains pouvoirs définis dans la loi cadrent mal avec le principe de proportionnalité énoncé à l’article 8, paragraphe 3 (examiné ci-après). Les constats de conformité formulés dans le présent rapport doivent donc être lus à la lumière des paragraphes suivants qui examinent la conformité avec l’article 8.3.

 

Depuis la suppression des services de l’administration d’État au niveau des comtés, les pouvoirs de contrôle précédemment exercés par les directeurs de ces services n’appartiennent plus qu’aux organes compétents de l’administration centrale. En particulier, en vertu de la loi sur l’autonomie locale et régionale, le pouvoir de contrôle de la légalité des actes généraux adoptés par les organes représentatifs des communes, des villes et des comtés dans leur domaine de compétence autonome n’est exercé que par les organes de l’administration d’État qui avaient déjà ce pouvoir avant les amendements de 2019.

 

Une nouveauté dans les pouvoirs de contrôle prévus par la loi réside dans le fait que le président de l’organe représentatif d’une collectivité locale ou régionale est tenu de transmettre les actes généraux à l’organe compétent de l’administration d’État, qui peut donner des instructions à l’organe représentatif s’il constate des irrégularités dans ces actes (une tâche qui incombait précédemment aux services de l’administration d’État dans les comtés). Cette procédure a été instaurée pour éviter une augmentation importante du nombre de décisions de suspension de l’application des actes généraux, le contrôle ne s’exerçant plus à deux niveaux depuis la suppression des services régionaux de l’administration d’État.

 

L’article 83 de la loi sur l’autonomie locale et régionale traite du contrôle de l’exécution des tâches administratives confiées par l’État ; il dispose que l’organe compétent de l’administration d’État chargé du contrôle administratif de l’exécution des tâches administratives déléguées peut donner des instructions générales et individuelles aux organes administratifs des collectivités et prendre les mesures et dispositions prévues par la loi pour réglementer le système d’administration publique.

 

Qui plus est, le gouvernement de Croatie a le pouvoir de dissoudre l’organe représentatif local et régional en application de l’article 84 de la loi sur l’autonomie locale et régionale sur proposition de l’administration d’État, en vertu des amendements de 2012 à cette loi, redéfinis par d’autres amendements en 2017. Ce pouvoir peut être exercé lorsque l’organe représentatif en question : (a) adopte une décision ou un acte menaçant la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Croatie ; (b) n’adopte pas de statuts dans un délai de 60 jours suivant sa constitution ; (c) adopte régulièrement des actes généraux contraires à la Constitution, à la loi ou à d’autres réglementations du fait de violations fréquentes et graves des lois et autres réglementations ; (d) n’a plus le quorum nécessaire pour mener à bien ses travaux et adopter des décisions ; (e) n’est pas en mesure d’adopter des décisions dans son domaine de compétence pendant plus de trois mois ; (f) ne convoque pas un référendum lorsqu’il est établi qu’une proposition de référendum a été présentée par un nombre suffisant d’électeurs, conformément aux dispositions de la loi sur l’autonomie locale et régionale et de la loi régissant l’organisation de référendums ; (g) ne convoque pas un référendum de révocation ; (h) n’adopte pas le budget pour l’année suivante au cours de l’année ou après l’expiration de la période de financement temporaire, sauf disposition contraire de la loi ; (i) n’adopte pas le budget dans les 45 jours suivant la publication de l’arrêt de la haute cour administrative de la Croatie annulant le budget dans la procédure d’évaluation de la légalité d’un acte général, sauf disposition contraire de la loi.

 

Les pouvoirs de l’État ne se limitent pas à la dissolution de l’organe représentatif. L’article 85a de la loi prévoit également une possibilité de révoquer simultanément l’organe exécutif, laquelle a été jugée contraire au principe de proportionnalité dans le précédent rapport de suivi. En effet, sur proposition de l’organe compétent de l’administration d’État chargé des collectivités locales et régionales, le gouvernement de Croatie peut simultanément dissoudre l’organe représentatif et révoquer l’organe exécutif d’une collectivité locale (le maire de la commune, le maire ou le préfet du comté et leurs adjoints) dans l’un des cas suivants : (a) si, après la dissolution de l’organe représentatif pour non-convocation d’un référendum de révocation, l’organe représentatif nouvellement élu n’adopte pas le budget dans un délai de 90 jours suivant sa constitution ou (b) si l’organe représentatif n’adopte pas le budget dans un délai de 45 jours à compter de la date à laquelle le responsable exécutif de la collectivité a soumis sa proposition. Dans les deux cas, des élections anticipées se tiendront dans la collectivité en question et un commissaire du gouvernement sera nommé pour exécuter les tâches des organes représentatif et exécutif de la collectivité conformément à l’article 85b de la loi.

 

Lorsque ces pouvoirs sont exercés, le président de l’organe représentatif dissous peut déposer un recours contre la décision gouvernementale de dissolution et de révocation du maire ou du préfet dans les huit jours suivant la publication de celle-ci. La haute cour administrative examine le recours et rend son arrêt dans les 30 jours. Si le recours est rejeté, le gouvernement convoque des élections anticipées au sein de l’organe représentatif dans un délai de 90 jours à compter de la date de publication de la décision de la cour au Journal officiel.

 

Aux termes de l’article 77b de la loi sur l’autonomie locale et régionale, le contrôle de la légalité des actes individuels non administratifs adoptés par les organes représentatifs et exécutifs des communes, des villes et des comtés dans le cadre de l’autonomie de chacun est effectué par les organes de l’administration d’État dans leurs domaines de compétence respectifs, définis dans les lois spéciales. Dans l’exercice de ce contrôle, la loi donne à l’organe compétent la possibilité de déclarer un acte individuel non administratif nul et non avenu s’il a été adopté par un organe non autorisé, si une loi, un statut ou tout autre acte général de la collectivité a été enfreint lors de la procédure d’adoption de l’acte, si ce dernier a trait à une question qui ne relève pas de la compétence de la collectivité locale ou régionale concernée ou si une loi, une autre réglementation ou un acte général ont été appliqués de manière incorrecte. L’organe compétent peut adopter une telle décision dans l’année suivant l’adoption de l’acte individuel en question. Une décision annulant un acte individuel non administratif ne peut faire l’objet d’un recours mais un contentieux administratif peut être engagé devant la juridiction administrative compétente.

 

Dans le cadre du processus de suivi, la délégation a été informée d’une pratique du ministère de la Justice et de l’Administration publique consistant à transmettre aux autorités locales des directives sur la manière d’exécuter certaines réglementations. Par exemple, à la suite des derniers amendements en date à la loi sur l’autonomie locale et régionale et à la loi sur les élections locales, le ministère de la Justice et de l’Administration publique a donné à plusieurs reprises des instructions sur la mise en œuvre des dispositions juridiques correspondantes. Il a été expliqué que le but de ces instructions n’était pas d’intervenir dans les questions relevant de la compétence des collectivités locales mais principalement de fournir à ces dernières des orientations sur la manière d’appliquer ces dispositions juridiques pour éviter les irrégularités et illégalités.

 

Hormis les réserves quant à la proportionnalité mentionnées précédemment et détaillées plus loin, les rapporteures considèrent que les dispositions qui autorisent l’État central à exercer un contrôle sur les affaires des collectivités locales et à intervenir selon les modalités susmentionnées rentrent dans le champ d’application de l’article 8, paragraphe 2, car le texte de la loi ne semble pas exiger le respect de la loi et des principes constitutionnels, tandis que le contrôle de l’exercice des tâches déléguées/confiées aux collectivités locales est stricto sensu conforme à l’article 8.2. La suppression de l’institution des services de l’administration d’État dans les comtés vient corroborer cette conclusion.

Article 8.3
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Le contrôle administratif des collectivités locales doit être exercé dans le respect d’une proportionnalité entre l’ampleur de l’intervention de l’autorité de contrôle et l’importance des intérêts qu’elle entend préserver.


 L’article 8.3 de la Charte de l’autonomie locale énonce le principe de proportionnalité du contrôle administratif des collectivités locales et régionales.

Les articles 85a, 85b et 85c qui ont été introduits dans la loi sur l’autonomie locale et régionale par un amendement de 2012 et prévoient la possibilité, simultanément, de dissoudre l’organe représentatif local et de révoquer le maire d’une commune ou d’une ville ou le préfet d’un comté, continuent de poser problème sur le plan de la conformité de la situation en Croatie avec le principe de proportionnalité énoncé à l’article 8.3 de la Charte.

 De l’avis des rapporteures, la dissolution simultanée de l’organe représentatif et de l’organe exécutif d’une collectivité locale constitue un acte de contrôle strict qui est disproportionné au regard de l’importance des intérêts que les articles 85a à 85c visent à protéger. Lors de la procédure de consultation, le ministère de la Justice et de l’Administration publique a expliqué que la dissolution de l’organe représentatif et la révocation simultanée du maire ou de l’organe exécutif du comté interviennent dans des circonstances spécifiques, telles que la non-adoption du budget. Cela ne s’est produit que dans une seule unité entre 2017 et 2021. Le ministère considère que cette possibilité qu’offre la loi contribue à réduire le nombre des élections locales anticipées, qui devraient sans cela être convoquées afin de résoudre le problème de la non-coopération entre les organes représentatif et exécutif.

Cependant, les rapporteurs soulignent que la nécessité de veiller à ce que le budget d’une collectivité locale soit établi dans un délai approprié ou de convoquer en temps utile un référendum révocatoire ne justifie pas la dissolution de l’organe représentatif ni la révocation des chefs de l’exécutif à la demande de l’État central, considérées comme une réponse disproportionnée au besoin de faire face à ces situations. Des mesures moins intrusives et plus proportionnées devraient être prises pour remédier à de tels manquements.

 Bien que les précédentes remarques concernant le non-respect de l’article 8.3 de la Charte aient déjà été formulées dans le rapport de suivi de 2016, rien n’a été fait pour corriger la situation. Par conséquent, les autorités croates sont exhortées à prendre des mesures pour mettre la loi sur l’autonomie locale et régionale en conformité avec le principe de la proportionnalité du contrôle administratif.

 Les rapporteures considèrent également que le pouvoir de l’exécutif de suspendre ou d’annuler les actes des collectivités locales avant que les autorités judiciaires ne se soient prononcées sur leur légitimité n’est pas conforme au principe de proportionnalité. Tout recours contre des actes des collectivités locales doit se faire en premier lieu devant les tribunaux et, si le recours est jugé valide, l’annulation ou invalidation éventuelle devrait être décidée ensuite ; aucune suspension ou déclaration d’invalidité ne devrait pouvoir s’appliquer à ces actes avant que la juridiction compétente ne se soit prononcée sur ces recours (compte tenu de la possibilité d’une réponse négative ou d’un rejet de la demande par les tribunaux).

Cette observation concerne en particulier l’exercice du pouvoir strict de l’État de dissoudre l’organe représentatif local élu et de révoquer le maire d’une commune ou le préfet d’un comté sans examen et approbation préalable par la haute cour administrative, qui devrait être la seule habilitée à suspendre et annuler une décision ou un acte d’un organe représentatif local pour des questions de légalité.

En tout état de cause, l’existence de délais procéduraux stricts pour la publication de la décision du tribunal sur ces questions ne justifie pas le maintien du processus actuel dans lequel l’acte de contrôle précède la décision du tribunal.

 Les rapporteures concluent par conséquent que la République de Croatie ne respecte pas l’article 8.3 et invitent les autorités compétentes à prendre les mesures nécessaires pour modifier la loi et la procédure qui y est prévue.

Article 9.1
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l’exercice de leurs compétences.


 Les dispositions de la Constitution représentent le point de départ de l’évaluation de la conformité du pays avec l’article 9, paragraphe 1, de de la Charte. En effet, l’article 131 de la Constitution dispose que « les collectivités locales et régionales ont le droit de percevoir leurs propres revenus et d’en disposer librement pour réaliser les tâches de leur compétence », ce qui correspond largement aux dispositions de l’article 9.1 de la Charte.

 

 L’article 68 de la loi sur les collectivités locales et régionales reprend la disposition susmentionnée et énumère les sources de revenus des collectivités locales et régionales suivantes : (a) les impôts, surtaxes, taxes, contributions et redevances perçus par les communes, villes ou comtés ; (b) les revenus tirés des biens dont la collectivité est propriétaire et des droits de propriété ; (c) les revenus provenant de sociétés et d’autres personnes morales appartenant à la collectivité, c’est-à-dire dans lesquelles elle détient une part ou des actions ; les recettes provenant des droits de concession ; (e) les amendes et la confiscation de gains matériels découlant de la commission d’infractions mineures imposées par la collectivité conformément à la loi ; (f) une part des impôts communs nationaux ; (g) les subventions de la Croatie prévues dans le budget national ; et les autres revenus prévus par la loi.

 

Comme le précise le rapport explicatif de la Charte, l’autorité en droit d’exercer certaines fonctions est dépourvue de sens si les collectivités locales sont privées des moyens financiers de remplir ces fonctions, attendu que ces fonds doivent provenir de leurs propres ressources. Les tâches et fonctions que les collectivités locales sont tenues d’accomplir sont présentées dans les sections précédentes du présent rapport, auxquelles nous vous invitons à vous référer afin d’éviter des répétitions dans cette section.

 

 À partir de 2001, la Croatie a procédé à plusieurs vagues de décentralisation administrative et a retiré des tâches et des fonctions au gouvernement central, en les confiant aux collectivités locales et régionales.

 

  Entre 2001 et 2003, la protection contre les incendies, l’éducation élémentaire et secondaire, la protection sociale et la santé ont été déléguées aux comtés et aux collectivités locales disposant de capacités fiscales adéquates.

 

 L’octroi des permis de construire a été décentralisé vers les comtés et les grandes villes en 2008. Des financements équivalents à la masse salariale consacrée à l’octroi décentralisé des permis de construire avaient été attribués aux comtés et aux grandes villes à l’époque, mais ont été interrompus en 2012. En 2008, l’entretien des voies publiques a également été délégué aux grandes villes, qui ont obtenu des financements correspondant à une part de la taxe d’utilisation des voies publiques. En 2020, plusieurs fonctions administratives publiques ont été transférées aux comtés, accompagnées d’une dotation globale équivalente à la masse salariale des fonctionnaires décentralisés.

 

Comme l’a admis le ministère des Finances, l’augmentation des normes d’offres de services pour les fonctions exercées par les collectivités locales ou l’élargissement des compétences des fonctionnaires locaux ne s’accompagnent pas toujours de financements supplémentaires, car il n’existe aucune garantie législative disposant que la décentralisation fiscale doit correspondre aux coûts de la mise en œuvre des services et des fonctions administratives décentralisés (délégués).

 

 Le financement des besoins des collectivités locales et régionales en Croatie dépend fortement du partage de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP). Selon le ministère des Finances, les collectivités locales et régionales reçoivent respectivement 74 % et 20 % de l’IRPP perçu sur leur territoire, et, en plus de ces montants, 6 % des recettes de l’IRPP sont attribués aux collectivités locales et régionales pour l’exercice de fonctions décentralisées (déléguées). Par conséquent, les règles régissant la répartition de l’IRPP constituent également un élément important du système de transfert intergouvernemental en Croatie.

 

  En ce qui concerne les recettes de l’impôt sur le revenu, les nouvelles dispositions des règlements adoptés par le Parlement croate en octobre 2023 entreront en vigueur le 1er janvier 2024. En ce qui concerne les budgets des collectivités locales, dont la ville de Zagreb, la loi portant modification de la loi sur les impôts locaux et la loi portant modification de la loi sur l’impôt sur le revenu revêtent une importance majeure. Le principal changement est la suppression de la surtaxe et, en parallèle, l’autorisation accordée aux collectivités locales de fixer de manière indépendante les taux d’imposition pour le paiement de l’impôt sur le revenu annuel. En d’autres termes, la loi a autorisé la compensation de la surtaxe par l’augmentation des taux d’imposition en fixant ces derniers au niveau maximum permis par la loi, maintenant ainsi le niveau actuel de recettes générées par l’impôt sur le revenu et la surtaxe ces dernières années. Le ministère des Finances a informé la délégation que cette réforme de l’IRPP avait été adoptée pour renforcer l’autonomie fiscale des collectivités locales.

 

  Comme l’a également indiqué le ministère des Finances, la taxe communale, qui n’est pas considérée comme un impôt bien qu’elle en présente plusieurs caractéristiques, constitue une source de revenus importante pour les collectivités locales. Le taux de la taxe communale n’est pas plafonné. Son taux ainsi que les exceptions sont définis par les collectivités, elle est perçue par les collectivités et la base d’imposition est définie par la loi.

 

La taxe sur les opérations immobilières, d’un taux de 3 %, constitue une autre source de revenus pour les collectivités locales. Il s’agit d’un impôt commun, qui est partagé entre les collectivités locales et régionales. Par ailleurs, la délégation a été informée par le ministère des Finances que les autres impôts locaux perçus par les collectivités locales et régionales sont les suivants : droits de succession et taxe sur les donations, d’un taux de 4 %, taxe sur les véhicules à moteur, taxe sur les bateaux, taxe fixe sur les jeux de divertissement, taxe sur la consommation, allant de 0 % à 3 %, taxe sur les résidences secondaires et taxe sur l’utilisation de l’espace public (non plafonnées).

 

 Comme indiqué dans le précédent rapport de suivi pour la Croatie – Recommandation 391 (2016) – et comme il ressort également des réponses reçues par la délégation lors de la préparation du présent rapport, le système de finances croate reste trop centralisé. Il reste fortement tributaire de l’IRPP et des modalités de répartition de ses fonds entre les collectivités locales, bien que des efforts aient été entrepris pour remédier à l’application basique de la répartition de cet impôt. Pendant la procédure de consultation, le ministère des Finances a affirmé que les collectivités locales pouvaient réduire leur dépendance envers le système de répartition de l’impôt en agissant sur leurs propres sources de revenus, par exemple en augmentant les surtaxes ou en fixant des taux maximums, et a indiqué que les revenus des collectivités locales avaient considérablement augmenté au cours des dix dernières années.

 

 Lors de ses échanges avec les interlocuteurs rencontrés pendant la visite de suivi et dans les réponses qu’elle a reçues par la suite, la délégation a observé une inquiétude partagée notamment par les petites collectivités locales concernant le faible niveau de ressources financières dont elles disposent compte tenu de leur capacité limitée à générer des revenus, ce qui complique l’exercice de leurs compétences et fonctions. Cette observation figure dans le précédent rapport de suivi pour la Croatie, et il est évident que l’absence de financements adéquats reste un défi pour les collectivités locales, notamment pour celles qui ont moins d’habitants. Cela ne semble pas être le cas dans les grandes villes et dans la capitale du pays, qui ont une plus grande capacité à générer des revenus et ne rencontrent donc pas de difficultés financières pour exercer leurs compétences.

 

 Enfin, comme indiqué également ci-dessous dans la section sur le niveau de conformité du pays avec l’article 9, paragraphe 7, de de la Charte, une partie des revenus perçus par les collectivités locales et régionales sont affectés à des projets spécifiques, et elles ne peuvent donc pas en disposer librement.

 

  L’inadéquation des ressources financières contrôlées par les collectivités locales les rend encore plus tributaires des subventions de l’État/du gouvernement. En outre, cette dépendance excessive est l’une des raisons pour laquelle la réforme de décentralisation fiscale reste nécessaire et doit inclure les éléments suivants : redéfinition des compétences des collectivités locales et régionales au moyen de fusions volontaires, redéfinition des tâches des organes du gouvernement central chargés des relations fiscales, nouvelles modifications du système fiscal et modification des règles fiscales pour les collectivités de niveau inférieur.

 

 Compte tenu de ce qui précède, les rapporteures concluent que les ressources financières dont disposent les collectivités locales dans la pratique ne sont pas adéquates pour permettre l’exercice de leurs fonctions et que par conséquent, malgré certains progrès observés dans ce domaine, la situation en Croatie n’est toujours pas conforme à l’article 9, paragraphe 1, de la Charte.

Article 9.2
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi.


 Comme expliqué dans le commentaire contemporain[10], l’article 9.2 consacre le principe de proportionnalité des ressources financières des collectivités locales. En d’autres termes, les ressources dont celles-ci disposent doivent être suffisantes et proportionnées à leurs fonctions et tâches. On ne saurait en déduire que toutes ces tâches doivent être financées par des recettes propres. Le paragraphe prévoit uniquement que les recettes et les tâches obligatoires des collectivités locales doivent s’équilibrer afin de garantir la disponibilité de ressources financières suffisantes par rapport aux tâches que leur assigne la loi.

 

En Croatie, les compétences, fonctions et tâches des collectivités locales et régionales sont définies par la loi et outre les différences entre les différents types de collectivités locales (villes et communes, grandes villes et comtés), cette attribution ne semble pas dépendre de la capacité financière de chaque collectivité ou de leur nombre d’habitants.

 

  Cela crée des inégalités manifestes entre des collectivités locales du même type et entre différents types de collectivités, compte tenu de leurs différences en termes de situation, de dépenses, de revenus attribués et d’habitants. Pendant la visite de suivi, les interlocuteurs au niveau infranational ont indiqué que les ressources financières étaient inadéquates pour couvrir les dépenses engendrées par le transfert de nouvelles tâches et missions aux collectivités locales. Les rapporteures ont également été informées qu’à la suite de modifications du cadre législatif relatif aux compétences déléguées, les collectivités locales exerçaient plus de responsabilités, mais ne recevaient pas de financements supplémentaires du gouvernement central pour leur mise en œuvre.

 

 Compte tenu de ce qui précède, les rapporteures estiment que les ressources financières des collectivités locales ne sont pas proportionnelles aux responsabilités prévues dans la Constitution et dans la législation en vigueur, et que par conséquent, la Croatie ne respecte pas l’article 9.2 de la Charte.

 

 Il convient donc de prendre des mesures législatives et administratives pour examiner la capacité des collectivités locales à générer des revenus, de façon à assurer la proportionnalité des ressources financières avec les responsabilités qui leur incombent.

Article 9.3
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d’impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.


Comme mentionné ci-dessus, le taux d’IRPP n’est pas fixé par les collectivités locales, mais par l’État, et des propositions législatives sont en cours d’examen pour transférer l’autorité de fixer ce taux aux collectivités locales. À cet égard, les rapporteures estiment que la décentralisation de l’autorité de fixer les taux d’IRPP, qui a eu lieu après la visite de suivi, peut être considérée comme une évolution positive, mais que ses effets sur l’indépendance financière et la viabilité des collectivités locales restent à voir. Elles rappellent que les produits de l’IRPP représentent la source de revenus la plus importante pour les collectivités locales.

 L’autre source importante de revenus pour les collectivités locales est la surtaxe sur les arriérés d’IRPP, mais cette obligation devrait prendre fin en 2024.

 La somme des redevances et impôts prélevés par les collectivités locales représente un pourcentage relativement faible des revenus qu’elles perçoivent. En revanche, les collectivités locales sont largement tributaires des subventions et revenus qu’elles reçoivent régulièrement du gouvernement central. Les impôts des comtés sont déterminés exclusivement par le gouvernement central.

 Compte tenu de ce qui précède, les rapporteures concluent que pour le moment la situation en Croatie reste non conforme à l’article 9, paragraphe 3, de la Charte.

Article 9.4
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l'évolution réelle des coûts de l'exercice de leurs compétences.


  En vertu de ce paragraphe, les ressources financières dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre l’évolution réelle des coûts de l’exercice de leurs compétences et fonctions.

  Outre l’inadéquation et l’insuffisance avérées de leurs ressources, et le fait qu’elles sont largement tributaires de l’État, la capacité des collectivités locales à générer leurs propres revenus dépend des revenus de l’IRPP, qui ne varient pas en fonction de l’évolution de leurs coûts.

 En général, à l’exception des subventions reçues de l’État et des subventions de l’UE auxquelles les collectivités locales peuvent avoir droit pour financer des projets, les ressources financières susmentionnées sont fixes, standard et non affectées, et/ou sans lien avec les coûts et leur évolution, ce qui renforce progressivement le niveau de dépendance envers les subventions et aides de l’État.

D’un autre côté, les catégories de dépenses des collectivités locales sont définies par la loi et déléguées par l’État, et sont donc standard et spécifiques dans le temps.

 Compte tenu de ce qui précède, les rapporteures concluent que la situation en Croatie n’est pas conforme à l’article 9, paragraphe 4, de la Charte et soulignent la nécessité de mettre en œuvre des réformes progressives pour rationaliser et renforcer la capacité des collectivités locales à générer des revenus afin de respecter l’article 9, paragraphe 4, de la Charte, et l’article 9 en général.

Article 9.5
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

La protection des collectivités locales financièrement plus faibles appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou des mesures équivalentes destinées à corriger les effets de la répartition inégale des sources potentielles de financement ainsi que des charges qui leur incombent. De telles procédures ou mesures ne doivent pas réduire la liberté d'option des collectivités locales dans leur propre domaine de responsabilité.


  L’article 9.5 de la Charte prévoit que la protection des collectivités locales financièrement plus faibles appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou des mesures équivalentes destinées à corriger les effets de la répartition inégale des sources potentielles de financement ainsi que des charges qui leur incombent.

En vertu de l’article 138 de la Constitution de la Croatie, l’État est tenu d’accorder une assistance financière aux collectivités régionales et locales les plus pauvres, conformément à la loi. Ce processus est géré au moyen d’un fonds de péréquation budgétaire. Le système de péréquation financière repose sur le prélèvement par le gouvernement central de 17 % des recettes de l’IRPP collecté par les collectivités locales. Ces 17 % sont alors mis en commun dans le fonds de péréquation financière destiné aux fonctions décentralisées.

Comme indiqué dans le précédent rapport de suivi – Recommandation 391 (2016) –, depuis 2014, la répartition des fonds repose sur un nouvel indice de développement déterminé suivant la décision sur la classification des collectivités locales et régionales d’après leur niveau de développement (Journal officiel 158/2013). Cet indice de développement a été utilisé pour calculer les subventions financières octroyées à chaque ville, commune et comté en fonction des critères suivants : taux de chômage, revenu par habitant, budget local/du comté par habitant, évolution de la population et part des 16-65 ans ayant une éducation supérieure.

 D’après les réponses reçues du ministère des Finances lors de la préparation du présent rapport, jusqu’en 2021, le fonds de péréquation fiscale était financé par 17 % de l’IRPP perçu, distribué automatiquement et quotidiennement aux bénéficiaires et comptabilisé en tant qu’IRPP. À partir de 2021, cette part de 17 % de l’IRPP a été attribuée aux collectivités locales et régionales pour compenser la décision du gouvernement central de réduire les taux d’IRPP. En raison de ce changement, depuis 2021, le fonds de péréquation fiscale est financé sur les revenus du gouvernement central et comptabilisé en tant que subvention générale. Les financements provenant du fonds de péréquation fiscale sont attribués aux collectivités locales suivant des parts individuelles définies avant l’exercice budgétaire. Les parts individuelles des collectivités locales sont calculées en fonction de la différence entre les objectifs de recettes de l’IRPP par habitant (moyenne sur 5 ans) et les recettes réelles (moyenne sur 5 ans). La création du fonds de péréquation fiscale est considérée comme une évolution positive majeure. En effet, il réduit les inégalités d’attribution de l’IRPP entre collectivités locales, tout en renforçant la transparence et la prévisibilité de leurs revenus. Cependant, les évolutions récentes des sources de financement du fonds de péréquation fiscale ont augmenté sa dépendance envers les procédures budgétaires du gouvernement national. Par ailleurs, peu d’éléments ont été communiqués concernant le maintien de la prise en compte des critères introduits en 2014 (qui sont principalement de nature locale, financière et sociale) lors de l’attribution des fonds aux collectivités locales.

Il n’est pas sûr que le nouveau système de répartition atteigne l’objectif de remédier aux inégalités au sein de la population. Au nom de la simplicité et de la prévisibilité, des facteurs sociaux, économiques, locaux et démographiques importants ne sont pas pris en compte avant d’attribuer le fonds de péréquation fiscale aux collectivités locales. Par conséquent, il est possible d’attribuer davantage de fonds à des collectivités plus solides et ayant plus de capacités financières, et moins de fonds à des collectivités plus fragiles, qui se trouveraient alors sans financements adéquats pour faire face aux problèmes liés au chômage, au vieillissement de la population, à la jeunesse, à la sous-éducation et à la population à faibles revenus. Le problème de l’obtention de ressources financières suffisantes pour accomplir les tâches relevant de leur compétence semble particulièrement présent dans les communes disposant de budgets modestes ou d’un faible nombre d’employés.

Les rapporteures concluent donc que la Croatie reste en conformité partielle avec l’article 9.5 de la Charte et appellent les autorités croates à réexaminer les critères utilisés pour attribuer le fonds de péréquation fiscale aux collectivités locales.

Article 9.6
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, d'une manière appropriée, sur les modalités de l'attribution à celles ci des ressources redistribuées.


L’article 9.6 de la Charte dispose que les collectivités locales doivent être consultées, d’une manière appropriée, sur les modalités de l’attribution à celles-ci des ressources redistribuées.

 

 En vertu de la loi sur la liberté d’information, tous les organes publics sont tenus de mener des consultations publiques d’une durée de 30 jours auprès du grand public, en utilisant un portail central de consultation en ligne. Les collectivités locales et régionales ainsi que leurs associations sont invitées à participer aux consultations publiques, ce qu’elles font souvent. En outre, la commission parlementaire pour les collectivités locales, un organe clé chargé d’étudier toutes les lois relatives aux collectivités locales et régionales, examine la législation relative aux modalités financières et administratives. Cette commission comprend 13 membres parlementaires et neuf autres membres, dont des représentants des quatre plus grandes villes de Croatie, de deux comtés et de deux communes et un juriste. Bien que cela ne soit pas obligatoire, les associations de collectivités locales sont invitées à participer à toutes les séances de cette commission. Les associations de collectivités locales établissent un consensus politique entre la plupart, voire l’ensemble des collectivités locales de divers poids économiques et appartenances politiques, et présentent ou défendent ces politiques de manière non partisane.

 

 Dans ses réponses écrites, le ministère des Finances souligne qu’en pratique, il mène un dialogue informel et formel avec les collectivités locales et régionales ainsi qu’avec les associations de collectivités locales sur les questions opérationnelles et législatives qui les concernent, et que les deux parties apportent leur contribution sur les questions de financement et d’administration des collectivités locales. En outre, le Premier ministre et les principaux ministres participent régulièrement à des réunions publiques avec tous les préfets des comtés et les présidents des associations de collectivités locales tout au long de l’année dans différentes régions de Croatie pour discuter des questions régionales et stratégiques relatives à l’offre de services publics. Toutefois, il n’existe pas de cadre juridique national bien défini en matière de consultation des collectivités locales par d’autres niveaux de gouvernement sur toutes les questions qui les concernent, notamment sur la redistribution des ressources financières.

 

Par conséquent, les rapporteures concluent que la Croatie respecte partiellement l’article 9.6 de la Charte. Elles suggèrent que, pour assurer la transparence et la responsabilité, les consultations informelles menées par le ministère des Finances avec les collectivités locales et régionales ainsi qu’avec les associations de collectivités locales sur les questions opérationnelles et législatives qui les concernent devraient être codifiées en détail dans un texte contraignant de législation primaire.

Article 9.7
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L'octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence.


 L’article 9.7 dispose que, dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L’octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence. Selon le rapport explicatif de la Charte, il ne serait pas réaliste de s’attendre à ce que toutes les subventions pour des projets spécifiques soient remplacées par des subventions générales, particulièrement lorsqu’il s’agit d’investissements importants. Mais un recours excessif aux subventions pour des projets spécifiques limite beaucoup la liberté des collectivités locales dans le choix des dépenses prioritaires.

 

 En Croatie, le recours aux subventions pour des projets spécifiques est fréquent. Comme l’indique le ministère des Finances :

-     Il existe deux types de subventions destinées à des projets spécifiques en Croatie, et ils visent tous deux à financer les fonctions que le gouvernement a transférées aux collectivités régionales et locales au début des années 2000, notamment l’éducation primaire et secondaire, la protection sociale, la santé et la lutte contre les incendies.

-     Environ 6 % des revenus de l’IRPP sont réservés aux collectivités locales et régionales qui exercent les fonctions susmentionnées. Les dépenses qui ne sont pas couvertes par ces 6 % de l’IRPP sont financées par le fonds de péréquation financière destiné aux fonctions décentralisées, une subvention spécifique financée par le budget de l’État (environ 260 millions d’euros) et régie chaque année par des règlements nationaux émis par les ministères de tutelle. Les financements du fonds de péréquation financière destiné aux fonctions décentralisées dépendent de normes minimums spécifiques à chaque fonction et définies dans des règlements nationaux, par exemple, pour l’éducation primaire, le nombre d’élèves, de classes et d’établissements scolaires.

-     Le ministère des Finances admet que bien que ce fonds fournisse la majorité des financements destinés aux fonctions décentralisées (déléguées), il rend également les collectivités locales tributaires des procédures budgétaires et des tendances économiques nationales.

-     En outre, pendant la procédure de consultation, le ministère des Finances a informé les rapporteures qu’en septembre 2023, le gouvernement central a mis en place un fonds de durabilité fiscale pour l’éducation préscolaire afin de fournir des financements supplémentaires aux collectivités locales visant à couvrir les coûts opérationnels des écoles maternelles, basé sur l’indice de développement.

 

En ce qui concerne les financements qui ne sont pas destinés à des projets spécifiques, le ministère des Finances a indiqué que les attributions du fonds de péréquation fiscale susmentionné, d’un montant d’environ 260 millions de dollars, mis en place en 2017 et versé à partir de 2018, n’étaient pas réservées à des fins spécifiques. À partir de 2021, cette part de 17 % de l’IRPP a été attribuée aux collectivités locales et régionales pour compenser la décision du gouvernement central de réduire les taux d’IRPP. Le ministère des Finances reconnaît qu’en raison de ce changement, depuis 2021, le fonds de péréquation fiscale est financé sur les revenus du gouvernement central et comptabilisé en tant que subvention générale. Les financements provenant du fonds de péréquation fiscale sont attribués aux collectivités locales suivant des parts individuelles définies avant l’exercice budgétaire. Les parts individuelles des collectivités locales sont calculées en fonction de la différence entre les objectifs de recettes de l’IRPP par habitant (moyenne sur 5 ans) et les recettes réelles (moyenne sur 5 ans).

 

 Compte tenu de ce qui précède, les rapporteures concluent que la situation en Croatie n’est pas conforme à l’article 9.7 de la Charte. Les rapporteures estiment gue les autorités nationales devraient réexaminer la question de la dépendance croissante des collectivités locales envers les procédures budgétaires et les tendances économiques nationales engendrée par le degré d’affectation des financements ainsi que la manière dont les collectivités locales pourraient devenir plus indépendantes à cet égard, en consultation avec les autorités infranationales et leurs associations.

Article 9.8
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Afin de financer leurs dépenses d'investissement, les collectivités locales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché national des capitaux.


 Selon l’article 9.8 de la Charte, afin de financer leurs dépenses d’investissement, les collectivités régionales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché des capitaux. Les sources possibles de ce financement dépendront toutefois inévitablement de la structure du marché des capitaux dans les différents pays, et les procédures et conditions d’accès à ces sources peuvent être fixées par la législation.

 

  Selon le ministère des Finances, les collectivités locales obtiennent des financements à court et à long terme sur les marchés nationaux et étrangers, sous réserve de l’approbation du gouvernement ou du ministère des Finances, en contractant des crédits ou des emprunts et en émettant des titres. Au niveau national, les emprunts des collectivités locales et régionales sont plafonnés à 3 % des revenus totaux de l’ensemble des collectivités locales et régionales. Les collectivités locales peuvent emprunter à court terme pour une durée maximale de 12 mois uniquement pour combler le déficit engendré par des dynamiques différentes entre les entrées de financements et les échéances des engagements, et n’ont pas la possibilité de reprogrammer de nouveau ou de contracter de nouveaux crédits ou emprunts à court terme.

 

Le ministère des Finances a informé la délégation que les collectivités locales pouvaient contracter des dettes à long terme : (a) pour un investissement financé sur son budget (dépenses pour l’acquisition d’actifs non financiers autres que des voitures de tourisme et autres dépenses directement liées à cet investissement) ; (b) pour apporter une aide en capital à des entreprises et à d’autres personnes morales détenues majoritairement ou conjointement par les collectivités locales pour des investissements qui sont co-financés par l’UE et pour des investissements ou des projets prévus par des règlements spéciaux ; et (c) pour le financement de coûts inéligibles qui ont été co-financés par des fonds de l’UE.

 

 Les procédures et les conditions permettant l’accès au marché des prêts sont en place. Le gouvernement ou le ministère des Finances ne donnent pas leur accord préalable à l’emprunt de toute somme si ce nouvel emprunt ou engagement dépasse le plafond national ou si le remboursement annuel de la collectivité locale concernée est supérieur à 20 % de ses revenus réels de l’année qui précède l’année au cours de laquelle l’emprunt est souscrit. Le remboursement annuel inclut le montant du remboursement annuel moyen des crédits, emprunts et obligations compte tenu des titres émis, des garanties émises et des emprunts approuvés, ainsi que les obligations échues figurant dans le dernier état financier disponible. Néanmoins, les emprunts des collectivités locales ne dépassant pas le coût total acceptable des projets financés par l’UE et les emprunts destinés à des investissements dans des projets d’efficacité énergétique sont exclus de cette limite.

 

 Les organes financés par le budget peuvent contracter des dettes à long terme aux mêmes fins que les collectivités locales et refinancer et reprogrammer le reste de la dette, avec l’approbation préalable de la collectivité locale. Les organes extrabudgétaires peuvent souscrire des emprunts à long terme auprès d’une institution financière internationale, avec l’approbation préalable du ministère des Finances. En outre, une collectivité régionale peut fournir une garantie à une collectivité locale se trouvant sur son territoire avec l’autorisation préalable du ministre des Finances. Les collectivités locales ou régionales peuvent fournir des garanties pour des emprunts à long terme à des organes financés par le budget ou extrabudgétaires et à des personnes morales détenues majoritairement ou conjointement par la collectivité, avec l’autorisation préalable du ministère des Finances. Des garanties sont incluses concernant la limite de l’endettement éventuel des collectivités locales ou régionales proportionnellement à la valeur de la part qu’elles détiennent. Les garanties pour les emprunts ne dépassant pas le coût total acceptable d’un projet co-financé par des fonds de l’UE ne sont pas incluses dans cette limite d’endettement.

 

Si des collectivités locales ou régionales contractent un emprunt ou émettent une garantie sans l’approbation préalable du gouvernement ou du ministère des Finances, cet emprunt ou cette garantie sont considérés comme nuls et non avenus.Les collectivités locales sont tenues de présenter des rapports au ministère des Finances pendant l’exercice budgétaire, tous les trimestres et avant le 10 du mois pour la période qui précède, sur le remboursement de la dette et le statut des garanties actives. Les collectivités locales peuvent refinancer ou restructurer leur dette à condition que la rente et/ou l’échéance annuelle totale n’augmente pas.

 

Par conséquent, les rapporteures concluent que la Croatie respecte l’article 9.8 de la Charte.

Article 10.1
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont le droit, dans l'exercice de leurs compétences, de coopérer et, dans le cadre de la loi, de s'associer avec d'autres collectivités locales pour la réalisation de tâches d'intérêt commun.


 La loi sur l’autonomie locale et régionale contient des dispositions qui prévoient et donnent expressément aux collectivités locales le droit de coopérer et de s’associer pour la réalisation de tâches d’intérêt commun.

L’article 54 de la loi sur l’autonomie locale dispose que deux collectivités locales ou plus peuvent organiser conjointement l’exécution de certaines tâches dans leur domaine de compétence autonome, notamment pour préparer des projets financés par les fonds de l’UE. Les collectivités locales peuvent créer un organe conjoint, un département/service administratif conjoint ou une société conjointe pour la réalisation de ces tâches, ou les organiser conjointement, en vertu de lois spéciales. Les relations entre les collectivités locales pour l’organisation conjointe de ces tâches sont régies par un accord spécial conformément à la loi et à leurs statuts et actes généraux.

 Par ailleurs, l’article 54a de la loi prévoit que les organes représentatifs des collectivités locales sont habilités à décider de la création, de l’organisation et du champ d’action de l’organe administratif conjoint établi conformément aux dispositions de l’article 54. Sur décision des organes représentatifs, les maires des communes sont autorisés à conclure un accord en vue de la constitution d’un organe administratif conjoint, dans lequel les parties conviennent des aspects relatifs au financement, à la gestion, à la responsabilité, au statut des fonctionnaires et employés de ce dernier, ainsi qu’à toute autre question sur laquelle elles jugeront nécessaire de s’entendre. Par ailleurs, l’article 55 de la loi prévoit que les statuts du comté peuvent établir des organes administratifs en dehors de son siège pour la réalisation de certaines tâches relevant de ses compétences autonomes.

 Les dispositions législatives susmentionnées et les informations et réponses fournies par les interlocuteurs au cours de la visite effectuée dans le cadre de la préparation du présent rapport permettent de conclure que la Croatie respecte l’article 10.1 de la Charte.

Article 10.2
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Le droit des collectivités locales d'adhérer à une association pour la protection et la promotion de leurs intérêts communs et celui d'adhérer à une association internationale de collectivités locales doivent être reconnus dans chaque Etat.


 L’article 12 de la loi sur l’autonomie locale et régionale reconnaît aux communes, aux villes et aux comtés le droit de s’associer en vue de la poursuite et de la promotion d’intérêts communs. Il dispose également que les communes, villes et comtés peuvent créer leurs associations nationales respectives pour améliorer leur coopération et défendre leurs intérêts communs. Les associations nationales de communes, de villes et de comtés peuvent se regrouper au sein d’une fédération nationale des collectivités locales et régionales.

L’article 13 de la loi prévoit en outre que les lois spéciales régissant la création et le fonctionnement des associations s’appliquent à la création et au fonctionnement des associations de communes, de villes et de comtés ainsi que des fédérations de collectivités locales et régionales. L’organisation, le champ d’action et la méthode de financement de l’association ou de l’alliance sont régis par les termes de leurs actes constitutifs et de leurs statuts. Les associations nationales et la fédération nationale peuvent coopérer avec des organisations et associations internationales de collectivités locales et régionales conformément à la loi et adhérer à leurs associations internationales.

  En Croatie, les communes, villes et comtés ont créé leurs associations respectives conformément à la loi sur les associations et à la loi sur l’autonomie locale et régionale : il s’agit de l’union croate des municipalités, de l’association des villes de Croatie et de l’Association des comtés croates. Ce sont des associations libres, à but non lucratif, volontaires et non partisanes, qui œuvrent à la promotion et à la défense d’intérêts communs ainsi qu’à l’amélioration de la coopération entre les collectivités locales et régionales de Croatie et les collectivités locales et régionales d’autres États, conformément à la loi et aux traités internationaux applicables. Leur organisation, leur champ d’action, leurs activités et leur mode de financement sont régis par leurs actes constitutifs et par la loi. Chacune des trois associations susmentionnées est réglementée et jouit du statut d’association nationale, coopère avec les organisations et associations internationales de collectivités locales et régionales adéquates et fait partie d’associations internationales.

 D’après les réponses écrites reçues par la délégation après la visite de suivi, aucun consentement ou approbation préalables par les organes de l’administration d’État n’est requis pour la coopération entre communes et les collectivités peuvent également coopérer de manière informelle (en tenant des réunions pour échanger des informations sur leur expérience, en coordonnant leurs activités ou en débattant de sujets d’intérêt commun). Les domaines de coopération habituels des collectivités sont le secteur des services essentiels (collecte, transport et enlèvement des ordures ménagères, alimentation en eau, transports publics), la lutte contre les incendies et plus récemment, le développement (plans et projets de développement, zones d’activité économique, tourisme).

 

228.  Compte tenu de ce qui précède, la Croatie respecte l’article 10.2 de la Charte.

Article 10.3
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales peuvent, dans des conditions éventuellement prévues par la loi, coopérer avec les collectivités d'autres Etats.


Comme mentionné précédemment, la coopération des collectivités locales et régionales avec leurs homologues d’autres pays relève des compétences des autorités locales, notamment en vertu de l’article 13 de la loi sur l’autonomie locale et régionale.

 

 D’après les réponses écrites reçues par la délégation à l’issue de la visite de suivi, les villes ont participé avec succès aux programmes européens de coopération territoriale pour 2014-2020 et notamment à des programmes de coopération transfrontaliers et interrégionaux. Sur la période 2021-2027, il y a quatre programmes de coopération transnationaux (Danube, Adrion, Méditerranée et Europe centrale) et quatre programmes de coopération transfrontalière (Italie-Croatie, Slovénie-Croatie, Croatie-Serbie et Croatie-Bosnie Herzégovine-Monténégro ; la Croatie participe à deux stratégies macrorégionales – la Stratégie de l’UE pour la région du Danube et la Stratégie de l’UE pour la région de l’Adriatique et de la mer Ionienne – et fait également partie du réseau des associations d’autorités locales d’Europe du Sud-Est).

 

Cela étant, les rapporteures notent qu’à ce jour, le gouvernement croate n’a ni signé ni ratifié les trois protocoles à la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales.

 Compte tenu de ces éléments, les rapporteures sont d’avis que la Croatie respecte l’article 10.3 de la Charte.

Article 11
Protection légale de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent disposer d'un droit de recours juridictionnel afin d'assurer le libre exercice de leurs compétences et le respect des principes d'autonomie locale qui sont consacrés dans la Constitution ou la législation interne.


La Cour constitutionnelle de Croatie est la gardienne de la Constitution du pays : elle contrôle la conformité des lois avec la Constitution, est habilitée à en interpréter le texte et protège les droits humains et les libertés des citoyens garantis par la Constitution.

L’article 125 de la Constitution dispose que la Cour constitutionnelle de Croatie se prononce sur les recours constitutionnels contre les décisions individuelles des organes de l’État, des organes des collectivités locales et régionales et des personnes morales investies de l’autorité publique lorsque ces décisions portent atteinte aux droits humains et aux libertés fondamentales, ainsi qu’au droit à l’autonomie locale et régionale garanti par la Constitution de la République de Croatie.

 

  Dans l’exercice de sa compétence de décision sur ces questions, la Cour constitutionnelle de la République de Croatie peut abroger une loi qu’elle juge inconstitutionnelle ou annuler une réglementation qu’elle juge inconstitutionnelle ou contraire à la loi.

 

Dans ses réponses écrites à la délégation, la Cour constitutionnelle de Croatie souligne que « l’article 62 de la loi constitutionnelle garantit aux collectivités locales (villes, communes), dans les conditions prescrites, le droit de déposer un recours constitutionnel en cas d’ingérence de l’autorité de l’État dans leur mandat autonome, ce qui est également conforme aux principes énoncés dans l’article 11 de la Charte européenne de l’autonomie locale. Cette voie de recours ne leur est toutefois ouverte que dans le cas où elles demandent une protection contre une ingérence inconstitutionnelle dans le droit à l’autonomie locale et régionale garanti par la Constitution ».

 

Aux termes de la loi constitutionnelle, la Cour constitutionnelle peut être saisie d’une requête écrite, d’une proposition ou d’un recours constitutionnel. Si l’organe représentatif de la collectivité locale et régionale de la Croatie considère qu’une loi régissant l’organisation, les compétences ou le financement d’une collectivité locale ou régionale n’est pas conforme à la Constitution, il peut demander à la Cour constitutionnelle d’examiner la constitutionnalité de cette loi ou de certaines de ses dispositions. La Cour constitutionnelle se prononce sur cette demande en recourant à la procédure d’urgence, dans un délai de 30 jours suivant le dépôt de la requête.

 

 En dehors des dispositions susmentionnées, avec la promulgation de la loi sur le contentieux administratif le 1er janvier 2012, la haute cour administrative s’est vu confier la compétence d’examiner la légalité des actes généraux des collectivités locales et régionales, des personnes morales investies de l’autorité publique et des personnes morales assurant des services publics. Un arrêt de la haute cour administrative peut annuler un acte général ou certaines de ses dispositions s’il établit que cet acte ou ces dispositions ne sont pas conformes à la loi ou au statut de l’organe de droit public. Par ailleurs, les collectivités locales disposent d’un droit de recours juridictionnel contre une décision prise par le ministère de l’Administration publique dans le cadre de son contrôle, déclarant une session de l’organe représentatif nulle et non avenue. Dans ce cas, le conseil peut saisir la haute cour administrative qui tranchera le contentieux administratif. De la même manière, lorsque le gouvernement décide de la dissolution et de la révocation des organes locaux, la haute cour administrative est compétente pour juger de la légalité de cette mesure.

 

 Il va de soi que toutes les réglementations (décrets, ordonnances, décisions, instructions, etc.) doivent être conformes à la loi, celle-ci étant la principale source du droit. Avant l’entrée en vigueur de la loi susmentionnée, la Cour constitutionnelle était chargée du contrôle de toutes les réglementations locales ; depuis 2013, elle ne contrôle plus que les statuts locaux.

 

Par ailleurs, conformément à l’article 36 de la loi constitutionnelle : « [s]i l’organe représentatif de la collectivité locale et régionale de la Croatie considère qu’une loi régissant l’organisation, les compétences ou le financement d’une collectivité locale ou régionale n’est pas conforme à la Constitution, il peut demander à la Cour constitutionnelle d’examiner la constitutionnalité de cette loi ou de certaines de ses dispositions ». Une protection similaire est assurée à toute personne physique ou morale : l’article 38 de la loi constitutionnelle prévoit que « toute personne physique ou morale a le droit de proposer l’ouverture d’une procédure visant à contrôler la constitutionnalité d’une loi et la légalité et la constitutionnalité d’autres réglementations ».

 

 Ces dernières années, les collectivités locales et régionales ont fait usage de leur droit de recours juridictionnel devant la Cour constitutionnelle. Depuis 2017, la Cour constitutionnelle a rendu plusieurs décisions sur des recours des collectivités locales et régionales demandant une protection contre les ingérences inconstitutionnelles dans le droit à l’autonomie locale et régionale, dans les affaires suivantes : U-III-4868/2017 du 15 février 2018, U-III-3006/2019 du 18 mars 2019, U-III-1734/2017 du 10 octobre 2019, U-III-273/2016 du 17 avril 2019, U-III-6136/2016 du 17 septembre 2020, U-III-6143/2016 du 22 mars 2017 et U-III-4846/2015 du 11 octobre 2018. Deux décisions ont également été rendues dans des recours constitutionnels de la ville de Zagreb (U-III-6143/2016 du 22 mars 2017) et de la ville de Delnice (U-III-4846/2015 du 11 octobre 2018).

 

L’Association des villes de la Croatie a soumis à plusieurs reprises des propositions à la Cour constitutionnelle et a demandé l’examen de la constitutionnalité et de la légalité de lois et de réglementations. Les décisions suivantes ont été rendues : U-I-54182/2009 du 15 mai 2012, U-I-1956/2016 du 11 juillet 2017, U-I-529/2020 du 4 mai 2021 et U-II-341/2020 du 23 mars 2021.

 

Par ailleurs, il convient de mentionner que la Cour constitutionnelle a fait expressément référence à la Charte de l’autonomie locale dans les décisions récentes suivantes : U-I-5827/2013 du 24 juin 2020, U-I-3198/2019 du 7 juillet 2020, U-I-529/2020 du 4 mai 2021, et dernièrement la décision U-II-627/2022 du 7 février 2023.

 

Compte tenu de ce qui précède, les collectivités locales en Croatie disposent d’un droit de recours juridictionnel et les rapporteures concluent que la Croatie respecte pleinement l’article 11 de la Charte.

Article 16.2
Clause territoriale - Non ratifié

Tout Etat peut, à tout autre moment par la suite, par une déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, étendre l'application de la présente Charte à tout autre territoire désigné dans la déclaration. La Charte entrera en vigueur à l'égard de ce territoire le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de trois mois après la date de réception de la déclaration par le Secrétaire Général.


Article 16.3
Clause territoriale - Non ratifié

Toute déclaration faite en vertu des deux paragraphes précédents pourra être retirée, en ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, par notification adressée au Secrétaire Général. Le retrait prendra effet le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de six mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire Général.


Article 17.1
Dénonciation - Non ratifié

Aucune Partie ne peut dénoncer la présente Charte avant l'expiration d'une période de cinq ans après la date à laquelle la Charte est entrée en vigueur en ce qui la concerne. Un préavis de six mois sera notifié au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe. Cette dénonciation n'affecte pas la validité de la Charte à l'égard des autres Parties sous réserve que le nombre de celles ci ne soit jamais inférieur à quatre.


Article 17.2
Dénonciation - Non ratifié

Toute Partie peut, conformément aux dispositions énoncées dans le paragraphe précédent, dénoncer tout paragraphe de la partie I de la Charte qu'elle a accepté, sous réserve que le nombre et la catégorie des paragraphes auxquels cette Partie est tenue restent conformes aux dispositions de l'article 12, paragraphe 1. Toute Partie qui, à la suite de la dénonciation d'un paragraphe, ne se conforme plus aux dispositions de l'article 12, paragraphe 1, sera considérée comme ayant dénoncé également la Charte elle même.


Article 18
Notifications - Non ratifié

Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifie aux Etats membres du Conseil:

 

a toute signature;

 

b le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation;

 

c toute date d'entrée en vigueur de la présente Charte, conformément à son article 15;

 

d toute notification reçue en application des dispositions de l'article 12, paragraphes 2 et 3;

 

e toute notification reçue en application des dispositions de l'article 13;

 

f tout autre acte, notification ou communication ayant trait à la présente Charte.

 

 

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente Charte.

 

Fait à Strasbourg, le 15 octobre 1985, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats membres du Conseil de l'Europe.


ADHESION

au Conseil de l’Europe

RATIFICATION

de la Charte européenne de l’autonomie locale

CONSTITUTION | LEGISLATION NATIONALE

L’article 133 précise : « Les citoyens ont le droit garanti à l’autonomie régionale et locale ». D’après cet article, le droit à l’autonomie locale et régionale est exercé par des organes représentatifs régionaux et locaux, composés de membres élus lors d’élections libres.



29Disposition(s) ratifiée(s)
0Disposition(s) avec réserve(s)
6 Articles non ratifiés
16Disposition(s) conforme(s)
6Articles partiellement conformes
8Disposition(s) non conforme(s)