Norvège

Norvège - Rapport de monitoring

Date de la visite de monitoring : du 22 au 25 mai 2023
Date d'adoption du rapport: 26 mars 2024

Il s’agit du troisième rapport évaluant la mise en œuvre de la Charte en Norvège depuis que le pays l’a ratifiée en 1989.

Les rapporteurs concluent que le système d’autonomie locale du pays fonctionne bien et que les obligations de la Charte sont généralement respectées.

Les rapporteurs notent avec satisfaction l’intégration des principes de la démocratie locale et d’autonomie locale dans la Constitution et la législation spécifique, ainsi que l’introduction de voies de recours judiciaires pour les autorités locales contre les décisions prises par l’administration de l’État. De même, ils notent une réglementation plus complète concernant la supervision des autorités locales par l’État et un niveau satisfaisant de démocratie locale en raison des pouvoirs étendus et des ressources financières des comtés et des municipalités.

Toutefois, comme le souligne le rapport, plusieurs questions méritent une attention spécifique.
En particulier, le processus de consultation des communautés locales sur les changements aux limites des collectivités locales reste flou. Les rapporteurs remarquent également que le degré de contrôle exercé par le gouvernement sur les collectivités locales reste omniprésent, dans une certaine mesure en raison d’une législation trop dense et trop spécifique, notamment en matière de protection sociale, ne laissant pas suffisamment de marge d’appréciation aux autorités locales.

Par conséquent, le rapport formule une série de recommandations aux autorités nationales afin d’accroître encore le degré déjà élevé de respect à la Charte. Il s’agit notamment de renforcer l’autonomie locale en évitant une législation trop dense et trop spécifique et en clarifiant la procédure de consultation des communautés locales dans les changements des limites des autorités locales. Les rapporteurs recommandent également de clarifier la portée de la supervision par l’État de l’autonomie locale afin qu’elle reste proportionnée aux intérêts qu’elle cherche à protéger.

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Article ratifié Ratifié avec réserve(s) Non ratifié
Conformité Conformité partielle Non conformité A déterminer
Tout déplier
Tout replier
Article 2
Fondement constitutionnel et légal de l'autonomie locale - Article ratifié

Le principe de l'autonomie locale doit être reconnu dans la législation interne et, autant que possible, dans la Constitution.


 L’article 2 exige que le principe de l’autonomie locale soit reconnu dans la législation interne et ce, de manière « transparente » et « explicite », c’est-à-dire dans le droit écrit. Les conséquences pratiques et opérationnelles de cette reconnaissance peuvent être pleinement comprises à la lumière de l’article 11, selon lequel « les principes d’autonomie locale qui sont consacrés dans la Constitution ou la législation interne » sont protégés par les recours judiciaires que peuvent engager les autorités locales. Par conséquent, les principes écrits représentent les normes applicables par les tribunaux statuant sur les recours introduits par des collectivités locales contre des actes portant atteinte à leur autonomie.

 

 En Norvège, le principe de la démocratie locale est garanti par la Constitution. En 2016, un nouveau paragraphe 2 a été ajouté à l’article 49 de la Constitution, selon lequel : « Les citoyens ont le droit de gérer les affaires locales par l’intermédiaire d’organes locaux démocratiquement élus. Les dispositions spécifiques concernant le niveau local démocratiquement élu sont fixées par la loi ».

 

 Comme KS l’a souligné lors de la réunion avec la délégation, la signification juridique de la disposition constitutionnelle dans le droit norvégien et la façon dont le contenu de la disposition devrait être compris plus en détail n’ont pas été clarifiées dans la jurisprudence. Les tribunaux n’ont à connaître que d’un nombre très limité d’affaires où ce problème se pose.

 

 En ce qui concerne la législation, en 2018, la nouvelle loi sur les collectivités locales a inscrit plus clairement dans le droit l’autonomie des communes et des comtés. Il est maintenant inscrit dans la loi que les communes et les autorités de comté ont leurs propres dirigeants élus, qu’ils sont leurs propres sujets de droit, que les restrictions à l’autonomie doivent être fondées sur la loi et que l’autonomie est limitée de manière négative, c’est-à-dire que les collectivités disposent d’un droit d’initiative et peuvent assumer les tâches que la loi n’a pas confiées à d’autres niveaux d’autorité.

 

 Pour ces raisons, les rapporteurs concluent que les exigences de l’article 2 de la Charte sont respectées en Norvège.

Article 3.1
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Par autonomie locale, on entend le droit et la capacité effective pour les collectivités locales de régler et de gérer, dans le cadre de la loi, sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques.


 La principale question qui se pose ici est celle-ci : dans la situation présente, les collectivités locales de Norvège règlent-elles et gèrent-elles « sous leur propre responsabilité et au profit de leurs populations, une part importante des affaires publiques » ? Pour juger du respect ou non de cette disposition, il convient de tenir compte du caractère plutôt « subjectif » et relatif de concepts tels que « la capacité », « une part importante des affaires publiques », « sous leur propre responsabilité » et « au profit de leurs populations », puisqu’il n’existe aucune méthode officielle ou universelle pour mesurer cette importance. Il faut donc prendre en considération l’évolution historique, la culture et les traditions constitutionnelles du pays concerné. Cette question est aussi étroitement liée à l’évaluation de la conformité avec d’autres parties de la Charte, comme ses articles 4, 8 et 9.

 

 Pour évaluer le respect de cette disposition, on prendra en considération à la fois des aspects législatifs et des éléments factuels.

 

 En Norvège, selon les données de l’OCDE[45], les collectivités infranationales représentaient en 2020 un tiers des dépenses publiques et 18,6 % du PIB. Les collectivités infranationales sont également un employeur important, puisque les communes et les comtés sont responsables de plus de la moitié des dépenses de personnel public et que les dépenses de personnel représentent la moitié des dépenses totales des collectivités infranationales, soit l’une des parts les plus élevées parmi les pays de l’OCDE.

 

 Conformément à la tradition nordique, le secteur public local en Norvège est un fournisseur important de services sociaux[46], ce qui explique pourquoi l’éducation, la santé et les secteurs sociaux représentent la majeure partie des dépenses des collectivités infranationales. Le poste budgétaire le plus important est la protection sociale, qui représente 5,1 % du PIB (un niveau bien supérieur à la moyenne de l’OCDE de 2,2 % du PIB) et près de 29 % des dépenses des collectivités infranationales (un pourcentage également bien supérieur à la moyenne de l’OCDE de 14,1 %). En ce qui concerne l’éducation, la Norvège se situe dans la moyenne de l’OCDE, tant en pourcentage du PIB (3,9 % du PIB dans l’OCDE en 2019) qu’en pourcentage des dépenses publiques infranationales (24,3 %). Bien que les hôpitaux relèvent du pouvoir central, la santé est un secteur de dépenses important des collectivités infranationales, représentant 2,4 % du PIB et 13,7 % des dépenses infranationales. Les collectivités infranationales sont responsables de plus de 27 % des dépenses publiques dans ce domaine. Enfin, les collectivités infranationales sont actives dans les affaires économiques et les transports, en particulier parce qu’elles assurent l’entretien des routes locales, mais la part de ces domaines dans les dépenses des collectivités infranationales reste inférieure à la moyenne de l’OCDE (13,6 % en 2019) et en pourcentage du PIB (2,2 %).

 

 Au niveau factuel, nous pourrions citer le classement par pays de l’Indice d’autonomie locale (LAI) 2014, qui place la Norvège dans le groupe de tête des pays européens.

 

Classement par pays de l’Indice d’autonomie locale (LAI) 2014

 

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Source : Ladner/Keuffer/Baldersheim/Hlepas/Swianiewicz/Navarro, Patterns of Local Autonomy in Europe, 2019, New York, Palgrave MacMillan, p. 236

 

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Descrizione generata automaticamenteLa réforme constitutionnelle et législative a renforcé cette position.

 

 

 

 

 

 

 

Source : Local Autonomy in the Nordic Countries. A report for the Norwegian Association of Local and Regional Authorities, Universitetet I Agder, 2019 https://www.ks.no/fagomrader/demokrati-og-styring/lokaldemokrati/det-lokale-selvstyre-er-styrket/  p. 82

 

 

 

 Dans le cadre de leurs compétences, les autorités locales disposent d’un pouvoir réglementaire. Selon l’article 37 de la loi sur l’administration publique, il n’existe pas d’exigence générale selon laquelle les communes doivent rédiger et fournir une justification pour une décision réglementaire, mais cette même loi exige que la commune s’assure qu’une décision n’est prise sur un sujet qu’après « s’être informé du mieux possible ».

 

 Par conséquent, les rapporteurs concluent que l’article 3, paragraphe 1, de la Charte est respecté en Norvège.

Article 3.2
Concept de l'autonomie locale - Article ratifié

Ce droit est exercé par des conseils ou assemblées composés de membres élus au suffrage libre, secret, égalitaire, direct et universel et pouvant disposer d'organes exécutifs responsables devant eux. Cette disposition ne porte pas préjudice au recours aux assemblées de citoyens, au référendum ou à toute autre forme de participation directe des citoyens là ou elle est permise par la loi.


 L’article 3.2 est la principale expression du principe démocratique dans les dispositions de la Charte. Le droit à l’autonomie doit être exercé par des autorités démocratiquement constituées. Cette autonomie n’implique pas un simple transfert de pouvoirs et de responsabilités des autorités centrales à une collectivité locale. Elle exige également que cette dernière exprime, directement ou indirectement, la volonté de la population locale.

 

 En Norvège, les communes sont gouvernées par un conseil qui est élu par les citoyens locaux tous les quatre ans lors d’élections libres et équitables. Les organes exécutifs sont élus par le conseil et sont responsables devant lui. La Norvège, comme d’autres pays nordiques, se situe au tout premier rang de plusieurs indices de démocratie, grâce à des scores élevés concernant le processus électoral et le pluralisme, la culture politique et la participation politique[47]. La participation électorale a augmenté de manière significative lors des élections locales de 2019, la plus forte hausse ayant été observée chez les jeunes. Les enquêtes montrent que les citoyens préfèrent les élus de leur propre conseil municipal pour promouvoir leurs intérêts[48].

 

 Par conséquent, les rapporteurs estiment que l’article 3, paragraphe 2, est respecté en Norvège.

Article 4.1
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences de base des collectivités locales sont fixées par la Constitution ou par la loi. Toutefois, cette disposition n'empêche pas l'attribution aux collectivités locales de compétences à des fins spécifiques, conformément à la loi


 L’article 4, paragraphe 1, de la Charte requiert que les compétences de base des collectivités locales soient fixées par la Constitution ou par la loi, de manière à garantir leur prévisibilité, leur permanence et leur protection dans l’intérêt de l’autonomie locale. Par conséquent, les tâches des collectivités locales ne doivent pas leur être attribuées de manière ad hoc mais doivent être suffisamment ancrées dans la législation. L’établissement de compétences et de pouvoirs locaux par le biais d’une réglementation administrative devrait être évité comme allant à l’encontre de l’esprit de la Charte[49].

 

 En Norvège, les compétences des communes et des comtés sont définies dans une série de législations sectorielles. Ces compétences incluent notamment, comme indiqué plus haut, les structures préscolaires et les services de protection de l’enfance, les écoles primaires et secondaires du premier cycle, les soins de santé primaire, les soins aux personnes âgées et aux personnes handicapées, le soutien financier aux bénéficiaires de l’aide sociale, l’entretien des églises et les affaires culturelles (bibliothèques publiques, etc.), la protection contre les incendies, les routes et des ports municipaux, les services d’approvisionnement en eau et d’assainissement, la collecte et l’élimination des déchets, l’aménagement du territoire local et les questions environnementales, les écoles secondaires du deuxième cycle, les services dentaires, les routes de comté et les transports publics, l’aménagement du territoire et le développement régional.

 

 

Source : Comité technique de calcul pour l'économie municipale et départementale (nov.2022)

https://www.regjeringen.no/no/dokumenter/rapport-fra-det-tekniske-beregningsutvalg-for-kommunal-og-fylkeskommunal-okonomi-november-2022/id2948377/

 

 Par conséquent, il apparaît aux rapporteurs que l’article 4, paragraphe 1, est respecté en Norvège.

Article 4.2
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales ont, dans le cadre de la loi, toute latitude pour exercer leur initiative pour toute question qui n'est pas exclue de leur compétence ou attribuée à une autre autorité


 Aux termes de l’article 4, paragraphe 2, les collectivités locales doivent avoir le droit d’exercer leur initiative pour toute question qui n’est pas explicitement exclue de leur compétence par la loi. De plus, elles doivent avoir « toute latitude pour exercer leur initiative ». Les restrictions à cette latitude peuvent également découler de règles administratives, financières et budgétaires requérant une base légale solide pour engager des dépenses[50].

 

 En Norvège, la loi sur les collectivités locales a confirmé la position traditionnelle des collectivités locales norvégiennes : les communes peuvent assumer toutes les fonctions qui ne sont pas prises en charge par d’autres organes publics (en pratique, les organes d’État ou les conseils de comté) ; il s’agit également d’une tradition historique ancienne. En outre, une série de lois spéciales rendent certaines fonctions spécifiques obligatoires pour les autorités locales, par exemple l’éducation, les jardins d’enfants, l’aménagement du territoire, etc.

 

 Cependant, en 2021, la Cour suprême a statué sur la question de savoir si la commune de Trondheim pouvait limiter l’utilisation des scooters électriques, en se fondant sur les droits de propriété de la commune[51]. La commune souhaitait atteindre cet objectif en exigeant que les sociétés de location qui désiraient louer des scooters électriques sur les terrains de la commune participent à un appel d’offres pour pouvoir installer ces scooters sur les terrains de la commune. La commune était propriétaire de la majeure partie du centre-ville de Trondheim. Elle souhaitait ainsi réglementer le champ d’application et l’utilisation de la location de scooters électriques. La Cour suprême a conclu qu’un tel usage des droits de propriété en vertu de l’article 113 de la Constitution constituait une « intervention » qui nécessitait une autorité juridique. Le Parlement a adopté une loi qui accorde cette autorité spécifique en juin 2021[52].

 

 Au cours des réunions, la question de savoir si des limitations s’appliquent – et le cas échéant lesquelles – au droit de la commune d’utiliser les droits de propriété pour promouvoir des objectifs politiques ou socialement bénéfiques a été soulevée, une question à laquelle seule la jurisprudence future pourra répondre.

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 4, paragraphe 2, de la Charte est respecté en Norvège.

Article 4.3
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

L'exercice des responsabilités publiques doit, de façon générale, incomber, de préférence, aux autorités les plus proches des citoyens. L'attribution d'une responsabilité à une autre autorité doit tenir compte de l'ampleur et de la nature de la tâche et des exigences d'efficacité et d'économie.

 


 L’article 4, paragraphe 3, de la Charte énonce le principe général de la subsidiarité. Il établit que « l’exercice des responsabilités publiques doit, de façon générale, incomber, de préférence, aux autorités les plus proches des citoyens. L’attribution d’une responsabilité à une autre autorité doit tenir compte de l’ampleur et de la nature de la tâche et des exigences d’efficacité et d’économie ».

 

 En Norvège, le principe de subsidiarité est inscrit à l’article 2-2 de la loi sur les collectivités locales, selon lequel « les tâches publiques doivent de préférence être attribuées au niveau administratif le plus proche des habitants ».

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 4, paragraphe 3, de la Charte est respecté en Norvège.

Article 4.4
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les compétences confiées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et entières. Elles ne peuvent être mises en cause ou limitées par une autre autorité, centrale ou régionale, que dans le cadre de la loi.

 


 L’article 4, paragraphe 4, dispose que « les compétences confiées aux collectivités locales doivent être normalement pleines et entières. Elles ne peuvent être mises en cause ou limitées par une autre autorité, centrale ou régionale, que dans le cadre de la loi ». La loi peut certes introduire des limites aux compétences allouées aux collectivités locales, mais de telles limites doivent revêtir un caractère exceptionnel, se fonder sur des raisons objectives et être interprétées de manière restrictive. D’autre part, le chevauchement des responsabilités peut devenir une menace pour l’autonomie locale[53].

 

 En Norvège, les autorités locales sont responsables de la plupart des services sociaux, dans un système où le gouvernement central (et le Parlement) ont la responsabilité globale d’une répartition égale et suffisante des services sur l’ensemble du territoire. Combinée avec leur part importante dans les dépenses publiques globales et leur dépendance générale à l’égard des transferts de fonds de l’État, cette responsabilité crée inévitablement un niveau de tension entre l’idéal de l’autonomie locale et la liberté de choix réelle dont jouissent les communes.

 

 Selon de nombreux chercheurs, l’expansion des dispositions légales relatives à des droits individuels entraîne des restrictions disproportionnées du champ d’action des communes. En outre, en particulier dans le domaine de la protection sociale, on observe une tendance à une gestion plus détaillée, notamment par le biais d’exigences légales et réglementaires relatives aux procédures, à la documentation, aux compétences et aux normes en matière de personnel. Un rapport de 2015 de la Direction norvégienne de l’administration publique (DIFI) illustre la complexité croissante de la réglementation étatique des collectivités locales par l’État. Le rapport ne couvre que trois domaines politiques (l’éducation, la santé et les soins et la protection de l’environnement). Dans les trois domaines combinés, les activités des collectivités locales ont été réglementées en 2015 par 22 lois différentes du Parlement complétées par 102 directives gouvernementales. En outre, 29 manuels ont été publiés pour guider le personnel local dans l’exercice de ses fonctions quotidiennes[54].

 

 KS a cité plusieurs exemples dans la loi sur l’éducation, la loi sur les services de santé et de soins, la loi sur la protection de l’enfance, etc. Depuis 2017, une spécialisation en médecine générale est exigée pour les médecins nouvellement nommés dans les services municipaux de santé et de soins et, depuis 2018, de nouvelles exigences en matière de compétences s’appliquent aux médecins urgentistes. Depuis 2014, de nouvelles compétences sont exigées pour l’enseignement de certaines matières (norvégien, mathématiques, anglais et sami) dans l’enseignement élémentaire. Depuis 2018, la norme d’encadrement pédagogique a été renforcée (par voie réglementaire) dans les écoles maternelles, passant d’un maximum de 18 enfants âgés de plus de trois ans par responsable de l’éducation à un maximum de 14 enfants. Pour les enfants de moins de trois ans, il doit y avoir un maximum de sept enfants par responsable de l’éducation, contre neuf actuellement.

 Les rapporteurs considèrent que la protection des droits des citoyens est une tâche importante et inévitable du secteur public. Cependant, cela ne peut pas impliquer automatiquement une réglementation détaillée et dense, qui ne laisse pas de marge discrétionnaire aux autorités locales et se traduit également par un niveau de contrôle invasif.

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 4, paragraphe 4, est en partie respecté en Norvège.

Article 4.5
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

En cas de délégation des pouvoirs par une autorité centrale ou régionale, les collectivités locales doivent jouir, autant qu'il est possible, de la liberté d'adapter leur exercice aux conditions locales.


 L’article 4, paragraphe 5, relatif aux responsabilités déléguées, dispose que les collectivités locales doivent jouir, autant qu’il est possible, de la liberté d’adapter leur exercice aux conditions locales. Dans bon nombre d’États européens, la délégation de pouvoirs entre les différents niveaux de gouvernement constitue souvent une tradition ancienne. Le gouvernement central tire parti du réseau territorial constitué par les collectivités locales et régionales, lesquelles sont plus proches des citoyens, connaissent bien la situation sur le terrain, épousent les particularismes locaux et permettent des économies d’échelle. Dans cet esprit, les organismes et fournisseurs de services locaux s’acquittent fréquemment de tâches déléguées au nom d’autorités supérieures (le plus souvent l’État) [55].

 

 Tantau cours de la visite que lors de la procédure de consultation, les interlocuteurs n’ont mentionné aucun problème concernant la délégation de compétences, qui semble satisfaire aux exigences de cet article dans la pratique.

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 4, paragraphe 5, est respecté en Norvège.

Article 4.6
Portée de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, autant qu'il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décision pour toutes les questions qui les concernent directement.

 


 L’article 4, paragraphe 6, de la Charte dispose que « les collectivités locales doivent être consultées, autant qu’il est possible, en temps utile et de façon appropriée, au cours des processus de planification et de décision pour toutes les questions qui les concernent directement ».

 

 La consultation est un principe clé de la Charte. La Charte s’abstient de définir ou de prescrire les formes de la consultation ainsi que de réglementer en substance le processus de consultation. Cette disposition ayant pour fonction principale de définir l’approche générale et le cadre des consultations, on peut conclure que la consultation dépend essentiellement de trois conditions fondamentales : a) les collectivités locales devraient pouvoir obtenir des informations complètes sur les décisions et les politiques qui les concernent directement et ces informations devraient être disponibles au stade initial du processus décisionnel ; b) les collectivités locales devraient avoir la possibilité d’exprimer leur opinion sur les décisions et les politiques avant que celles-ci ne deviennent des documents juridiquement contraignants ; c) les collectivités locales devraient avoir le temps et les moyens de préparer et soumettre pour examen des recommandations ou d’autres propositions[56].

 

 En Norvège, la consultation avec KS est la partie intégrale du système d’autonomie locale.

 

 Comme l’a souligné KS dans ses réponses écrites aux rapporteurs, le système de consultation entre le gouvernement et KS est un espace formel de dialogue et de collaboration sur les cadres et la réalisation des objectifs pour le secteur des collectivités locales. Les réunions impliquent des responsables de haut niveau politique des deux parties.

 

 Comme il a été indiqué plus haut, KS et le gouvernement disposent d’un système de consultation formalisé pour le dialogue et la coopération. Il inclut des réunions à haut niveau, des accords de coopération bilatéraux et la participation de KS à l’estimation des coûts. Les principales réunions comprennent : une réunion au printemps avant que le ministère des Collectivités locales, le ministère des Finances et KS ne se consultent sur le cadre budgétaire des communes pour l’année suivante ; une autre réunion avec tous les ministères concernés avant l’adoption du budget national révisé et du projet de loi annuel sur les collectivités locales ; et une autre série de réunions à l’automne avec les ministères concernés. Un guide de 30 pages présente les procédures applicables à ces réunions et à la participation de KS aux estimations de coûts, aux enquêtes parlementaires, etc[57].

 

 Le Parlement ne dispose pas de telles procédures. Toutefois, la délégation a été informée que lorsque les commissions organisent des auditions publiques, KS a normalement la possibilité d’être présent.

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 4, paragraphe 6, est respecté en Norvège.

Article 5
Protection des limites territoriales des collectivités locales - Article ratifié

Pour toute modification des limites territoriales locales, les collectivités locales concernées doivent être consultées préalablement, éventuellement par voie de référendum là où la loi le permet.


 Cet article pose une obligation de consultation des collectivités locales en cas de modification de leurs limites territoriales. Il est considéré, en tant qu’exigence de procédure obligatoire, qu’aucune modification des limites territoriales locales ne peut être adoptée sans consultation, laquelle doit intervenir en temps utile avant qu’une décision définitive soit prise sur la question. Par conséquent, toute modification de telles limites effectuée en l’absence de consultation de la collectivité locale concernée serait incompatible avec l’article 5[58].

 

 En Norvège, la loi sur les limites territoriales des collectivités locales[59] dispose entre autres que le Parlement décide de la fusion des comtés, tandis que le gouvernement décide de celle des communes. Aux termes de son article 9, « avant qu’une décision ne soit prise sur les modifications ou la définition des limites territoriales, les communes ou les autorités de comté concernées doivent avoir la possibilité de s’exprimer. S’il s’agit d’une fusion ou d’une scission, le conseil municipal ou le conseil de comté lui-même doit donner son avis ».

 

 En ce qui concerne les consultations avec les citoyens avant toute modification des frontières, l’article 10 dispose que « le conseil municipal doit recueillir l’avis des habitants sur les propositions de modification des limites territoriales. Cette consultation peut prendre la forme d’un référendum, d’un sondage d’opinion, d’un questionnaire ou d’une réunion, ou être conduite d’une autre manière. »

 

 Ainsi, le conseil municipal ou le conseil de comté peut décider lui-même de tenir des consultations et décider de leur forme. Au premier abord, la loi ne fait explicitement référence qu’aux conseils municipaux, ce qui soulève des doutes quant à la consultation de la population par les conseils de comté. Au cours de la procédure de consultation, le ministère des collectivités locales et du développement régional a toutefois précisé que, même si les conseils de comté ne sont pas mentionnés explicitement dans la loi, il est indiqué dans les travaux préparatoires que les conseils de comté peuvent également décider d'organiser des consultations et sous quelle forme.

 

 Enfin, le référendum apparaît comme un outil parmi d’autres, sur le même plan que les sondages d’opinion. La loi sur les collectivités locales dispose à l'article 12-2 que le conseil municipal ou le conseil de comté lui-même peut décider d'organiser des référendums consultatifs sur des propositions concernant les affaires de la municipalité ou de l'autorité de comté, respectivement. Il n’y a pas de procédures juridiques ni de lignes directrices. D’un point de vue comparatif, la Norvège a été identifiée parmi les États « faibles » en ce qui concerne les procédures de démocratie directe[60].

 

 Comme on l’a vu, le processus de fusion des communes et des comtés a été un aspect important de la réforme territoriale entreprise par le gouvernement norvégien depuis les élections de 2013. Le processus reposait principalement sur le volontariat et les incitations. Cependant, il s’avère qu’une situation quelque peu contraignante a nécessité de procéder à des fusions obligatoires de certaines communes et certains comtés[61]. Cinq comtés ont fait l’objet de fusions forcées : d’une part Østfold, Akershus et Buskerud dans le nouveau comté « Viken », d’autre part Troms et Finnmark dans le nouveau comté « Troms-Finnmark ». Si les habitants d’Østfold, d’Akershus et de Buskerud se sont opposés à l’absorption de leur comté au sein de Viken, l’opposition a été beaucoup plus forte dans le comté de Troms, et plus encore dans celui du Finnmark. L’administration du comté du Finnmark a refusé de participer aux négociations officielles sur la fusion et a adopté de multiples résolutions au parlement du comté s’opposant à la fusion. L’administration du Finnmark a également organisé un « référendum » sur la fusion en mai 2018[62].

 

 Le ministère des Collectivités locales et de la Modernisation a très clairement recommandé aux communes de choisir des enquêtes auprès des citoyens afin de répondre à cette exigence[63]. En outre, tandis que le ministère a confié à un organisme de sondage privé l’élaboration d’un modèle de questionnaire pour les sondages d’opinion locaux, aucun modèle ou document d’orientation sur les référendums n’a été proposé. Le ministère a affirmé que les sondages d’opinion donnent, par rapport aux référendums locaux, une image plus détaillée de l’opinion publique et donc une base plus nuancée pour la prise de décision. Cela étant, de nombreuses communes ont choisi les référendums comme instrument de consultation, au lieu ou en plus d’une enquête auprès des citoyens : 61 % des communes qui ont tenu un référendum avaient d’abord mené une enquête auprès des citoyens. Une étude sur 156 décisions positives de fusionner a fait apparaître que 81 décisions (52 %) ont été prises sans référendum[64].

 

 Les autorités locales ont pu formuler les questions et concevoir des bulletins de vote à leur guise. Par conséquent, les questions mises aux voix et les réponses possibles ont été formulées de manière très différente dans les 221 référendums.

 

 À la suite des référendums locaux sur les fusions municipales organisés en 2016, une enquête plus vaste sur les référendumslocaux a été menée. Il a été constaté que la grande majorité des référendums s’étaient déroulés de manière satisfaisante, mais que deux aspects en particulier avaient posé problème : la formulation des questions et des options sur les bulletins de vote et la qualité des procédures de dépouillement[65]. Au cours de la procédure de consultation, le ministère des collectivités locales et du développement régional a également souligné qu'après la vague de référendums locaux en 2016, il avait publié des orientations sur les référendums consultatifs locaux avec des recommandations sur la conduite des référendums par les municipalités et a suggéré d'utiliser la loi électorale comme base pour la conduite des référendums locaux dans la mesure du possible.

 

 Lors de la visite de suivi, le ministère des Collectivités locales et du Développement régional a indiqué à la délégation que le gouvernement préparait une proposition visant à modifier la loi sur les limites territoriales, afin de donner à ce ministère l’autorisation spéciale d’effectuer des consultations citoyennes, y compris des référendums, dans les cas l’initiative de la modification émanait du ministère[66]. Une fois la proposition approuvée par le Parlement, le gouvernement entamera l’organisation d’un référendum concernant la scission de la commune de Kristiansand (fusionnée par le gouvernement précédent avec Søgne et Songdalen).

 

 Les rapporteurs apprécient l’initiative du gouvernement ; cependant, ils encouragent les autorités norvégiennes à reconsidérer la question de la consultation des populations locales dans le cadre des modifications des limites territoriales des autorités locales.

 

 Ils considèrent par conséquent que les dispositions de l’article 5 ne sont pas pleinement respectées en Norvège.

Article 6.1
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Sans préjudice de dispositions plus générales créées par la loi, les collectivités locales doivent pouvoir définir elles mêmes les structures administratives internes dont elles entendent se doter, en vue de les adapter à leurs besoins spécifiques et afin de permettre une gestion efficace.


 L’article 6, paragraphe 1, de la Charte prévoit que les collectivités locales doivent pouvoir définir elles-mêmes les structures administratives internes dont elles entendent se doter : la capacité des collectivités locales à organiser leurs propres affaires est donc un élément de l’autonomie dont elles jouissent.

 

 En Norvège, les communes sont libres de définir leurs structures administratives, le statut de leur personnel et les modalités de leur formation et de leur rémunération. La commune ou le comté peut décider de certains aspects du processus électoral (par exemple, si les élections doivent se dérouler sur un ou deux jours ou, dans certaines limites, le nombre de sièges du conseil). Les communes et les autorités des comtés peuvent recruter leur propre personnel, décider de leur structure organisationnelle, fixer les salaires et créer des entités juridiques/entreprises. La révision de la législation sur les collectivités locales, en 1992 et les années suivantes, a sensiblement renforcé l’autonomie organisationnelle[67].

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que les dispositions de l’article 6, paragraphe 1, sont respectées en Norvège.

Article 6.2
Adéquation des structures et des moyens administratifs aux missions des collectivités locales - Article ratifié

Le statut du personnel des collectivités locales doit permettre un recrutement de qualité, fondé sur les principes du mérite et de la compétence; à cette fin, il doit réunir des conditions adéquates de formation, de rémunération et de perspectives de carrière.


 L’article 6, paragraphe 2, de la Charte porte sur le statut du personnel des collectivités locales, qui doit permettre un recrutement de qualité fondé sur les principes du mérite et de la compétence.La capacité des collectivités locales à recruter leur propre personnel et à définir sa rémunération est un indicateur important de leur autonomie organisationnelle et institutionnelle[68].

 

 Les communes et les comtés disposent d’une grande latitude concernant leurs employés, mais cette latitude est réduite du fait des exigences en matière de compétence et des normes de dotation en personnel, qui les empêchent par exemple de déplacer des ressources entre les entreprises et les secteurs. Lors des réunions, KS a noté que les règles de l’État en matière de droits et d’obligations, y compris les normes de dotation en personnel et les exigences de compétence, réduisaient l’autonomie. Les normes de dotation en personnel au niveau des services (et non à celui des communes) limitent la latitude des communes et la possibilité de cibler les ressources entre, par exemple, les diverses écoles de la commune.

 

 KS a également souligné que l’accès au personnel qualifié est de plus en plus un facteur limitant. Le manque de personnel et/ou d’expertise est l’un des principaux défis auxquels le secteur municipal norvégien est confronté, et il va le devenir plus encore à l’avenir, tant à court terme qu’à long terme.

 

 Lors des réunions avec les autorités locales, il a souvent été indiqué à la délégation que le manque de ressources humaines dû au plein emploi, en particulier dans les domaines de la santé et de la prise en charge des personnes âgées, devenait un véritable défi pour les communes et les comtés, risquant de compromettre le niveau des services sociaux offerts aux citoyens.

 

 En conclusion, les rapporteurs considèrent que l’article 6, paragraphe 2, de la Charte est respecté en Norvège.

Article 7.1
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Le statut des élus locaux doit assurer le libre exercice de leur mandat.


 L’article 7, paragraphe 1, vise à garantir que les citoyens peuvent librement exercer des mandats électifs et que l’accès à des mandats politiques ne leur est pas interdit sur la base de considérations financières ou matérielles. Nul ne doit être dissuadé de se porter candidat à une élection locale ; une fois élus, les conseillers locaux ne doivent pas être empêchés d’exercer efficacement leurs fonctions[69].

 

 En Norvège, les conseillers locaux sont élus pour un mandat de quatre ans et ne peuvent pas être révoqués. Les conseils sont censés siéger pendant toute la totalité de ces quatre années. Si le remplacement d’un membre s’avère nécessaire, il s’effectue au sein de la même liste électorale par la nomination du premier membre suppléant de la même liste dans l'ordre numérique où ils ont été élus suppléants.

 

 La législation norvégienne prévoit le libre exercice des fonctions des élus locaux.

 

 Lors de la visite de suivi, la délégation a été informée que les élus locaux sont de plus en plus la cible de discours de haine et d’agressions. Dans les réponses écrites aux rapporteurs, KS a souligné qu’une enquête de 2021 (C-REX) montre qu’un peu plus de la moitié de l’ensemble des responsables politiques locaux ont été exposés à au moins un incident désagréable au cours de leur mandat politique, tels que des menaces, des discours de haine ou des faits de harcèlement. Les jeunes responsables politiques en font davantage l’expérience que leurs aînés.

 

 Un quart environ des personnes qui ont été exposées à des incidents désagréables disent avoir envisagé de quitter la politique, tandis que 6 % ont effectivement décidé de le faire. Les incidents ont des conséquences majeures pour un grand nombre des personnes concernées, que ce soit sous la forme d’auto-restriction ou d’autocensure, ou parce qu’elles s’abstiennent d’agir ou de s’exprimer sur un cas ou dans un domaine spécifique. Pour beaucoup (une personne sur quatre), cela a également entraîné une réduction des activités sociales ; la même proportion indique une utilisation réduite des médias sociaux et, pour certains également, une sécurité personnelle réduite.

 

 Une étude réalisée en 2020 montre que le système juridique ne traite que très peu d’affaires concernant des discours de haine ou des menaces à l’encontre d’élus locaux. Ils ne bénéficient pas non plus d’une protection juridique particulière en tant qu’élus locaux[70].

 

 Le ministère a élaboré des conseils à l’intention des responsables politiques et des candidats sur la manière de se préparer face à de telles expériences et sur l’attitude à adopter[71].

 

 Les rapporteurs considèrent que l’article 7, paragraphe 1, de la Charte est respecté en Norvège.

Article 7.3
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Les fonctions et activités incompatibles avec le mandat d'élu local ne peuvent être fixées que par la loi ou par des principes juridiques fondamentaux.


 L’article 7, paragraphe 3, concerne la compatibilité entre l’exercice d’un mandat électif local et d’autres activités, publiques ou privées. Il établit que les « fonctions » et « activités » qui ne peuvent pas être rendues compatibles avec l’exercice d’un mandat local une fois que le candidat a été élu ne peuvent être fixées que par la loi ou par des principes juridiques fondamentaux.

 

 En Norvège, les incompatibilités sont déterminées par plusieurs dispositions juridiques, dans le chapitre 7 de la loi sur les collectivités locales. Aucun problème n’a été signalé à ce sujet lors de la visite de suivi.

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 7, paragraphe 3, est respecté en Norvège.

Article 7.2
Conditions de l'exercice des responsabilités au niveau local - Article ratifié

Il doit permettre la compensation financière adéquate des frais entraînés par l'exercice du mandat ainsi que, le cas échéant, la compensation financière des gains perdus ou une rémunération du travail accompli et une couverture sociale correspondante.


 L’article 7, paragraphe 2, concerne l’octroi aux élus d’une compensation financière adéquate. Il vise à garantir, conjointement avec le paragraphe 1, que les élus locaux reçoivent une « compensation financière adéquate » et à éviter que le statut des élus locaux ne dissuade, ne limite voire n’exclue les candidatures potentielles en raison de considérations financières.

 

 En Norvège, tous les conseils municipaux et les conseils de comté doivent réglementer la rémunération. Toute personne qui occupe un poste de confiance au niveau de la commune ou du comté a droit à une indemnité de transport, de repas et d’hébergement pour les déplacements liés à son poste. Le conseil municipal ou le conseil de comté réglemente lui-même cette indemnisation.

 

 La loi sur les collectivités locales dispose que les élus reçoivent une rémunération pour leur travail. Plusieurs de ces dispositions concernent les élus dont le poste de confiance est l’occupation principale, par exemple le maire. Le conseil municipal et le conseil de comté adoptent des règlements qui déterminent le montant perçus par les différents élus. Ceux-ci bénéficient également du remboursement de leurs frais de transport, de repas et d’hébergement, ainsi que d’une compensation pour toute perte de revenu couverte. En outre, les communes et les comtés veillent à ce que les élus bénéficient de prestations sociales.

 

 Les rapporteursconsidèrent que l’article 7, paragraphe 2, est respecté en Norvège.

Article 8.1
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif sur les collectivités locales ne peut être exercé que selon les formes et dans les cas prévus par la Constitution ou par la loi.


 L’article 8 de la Charte concerne le contrôle des collectivités locales. Aux termes de son paragraphe 1, tout contrôle administratif sur les activités des collectivités locales doit être exercé selon les formes et dans les cas prévus par la Constitution ou par la loi. La Charte pose ici un principe important dans le domaine du contrôle administratif interinstitutionnel des collectivités locales : toute forme de contrôle doit être prévue par la Constitution ou par la loi. En d’autres termes, elle introduit le principe de légalité dans le contrôle des collectivités locales[72].

 

 Conformément aux exigences de la Charte, en Norvège, les règles régissant le contrôle des autorités locales et les pouvoirs des autorités centrales concernées sont déterminés par la législation, dans la partie VIII de la loi sur les collectivités locales.

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 8, paragraphe 1, de la Charte est respecté en Norvège.

Article 8.2
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Tout contrôle administratif des actes des collectivités locales ne doit normalement viser qu’à assurer le respect de la légalité et des principes constitutionnels. Le contrôle administratif peut, toutefois, comprendre un contrôle de l’opportunité exercé par des autorités de niveau supérieur en ce qui concerne les tâches dont l’exécution est déléguée aux collectivités locales.


 Aux termes de l’article 8, paragraphe 2, de la Charte, le contrôle des actes des collectivités locales ne doit normalement viser qu’à assurer le respect de la loi et des principes constitutionnels. Le contrôle d’opportunité peut toutefois être utilisé dans le cas de tâches déléguées.

 

 En Norvège, sur le plan formel, depuis 2001 le contrôle porte uniquement sur la légalité des décisions municipales et de la prestation de services par les communes. Au cours de la procédure de consultation, le ministère des collectivités locales et du développement régional a souligné que les tâches des municipalités et des autorités des comtés sont rarement déléguées. La plupart du temps, elles sont prescrites par des lois spéciales et l'État n'a pas le pouvoir général de réviser et d'annuler les décisions individuelles prises par les municipalités et les comtés. Le ministère a également ajouté qu'il avait récemment proposé des amendements à plusieurs lois spéciales afin d'éliminer la plupart des cas restants où les tâches et les responsabilités des municipalités et des autorités de comté sont basées sur la délégation.

 

 En outre, comme indiqué ci-dessus, la nouvelle loi sur les collectivités locales, en 2018, a renforcé les droits des communes et des conseils de comté dans le cadre du contrôle de l’État, notamment pour le droit de recours contre les décisions et une ordonnance de communication d’informations.

 

 Il convient de noter que, conformément au chapitre VI de la loi sur l'administration publique, les organes de l'État norvégien peuvent agir en tant qu'instances d'appel pour les décisions individuelles prises par les municipalités ou les autorités des comtés. L’article 34, paragraphe 2, de la loi sur l’administration publique a également été modifié. Lorsqu’un organe de l’État est l’instance de recours contre une décision prise par une commune ou une autorité de comté, cette instance attache désormais une grande importance aux intérêts de l’autonomie locale lorsqu’elle examine des questions relevant de la discrétion des collectivités locales. Auparavant, elle leur attachait uniquement « de l’importance ». En outre, l’instance de recours a désormais l’obligation de décrire comment elle a évalué les intérêts de l’autonomie locale dans sa décision. KS considère cet amendement comme positif, même si, dans l'ensemble, elle n'est pas favorable à l'existence d'une disposition dans la législation norvégienne qui autorise l'État à contrôler la liberté d'appréciation des municipalités.

 

 L’obligation de justifier le pouvoir d’objection a également été renforcée dans la loi sur l’aménagement du territoire et la construction, de sorte que les objections doivent être justifiées dans la politique adoptée et qu’un intérêt national ou régional important soit effectivement affecté.

 

 Malgré ces changements importants apportés à la législation, dans la pratique le contrôle en Norvège reste extrêmement détaillé et étendu ; des chercheurs ont affirmé que le concept de légalité avait été étendu en inscrivant dans la législation des expressions telles que « l’obligation pour les communes de fournir des services adéquats/appropriés/satisfaisants... etc.», qui laissent l’évaluation des services locaux aux normes évolutives des professionnels[73].

 

 KS a souligné, lors de la réunion avec la délégation et dans ses réponses écrites, qu’il existe un état d’esprit assez répandu et en partie une culture, tant au niveau politique qu’administratif, selon lesquels les communes ne sont qu’un organe de mise en œuvre des tâches souhaitées par l’État, et qu’il n’est donc pas véritablement considéré que les communes sont des sujets juridiques indépendants dotés de leurs propres dirigeants élus et d’un mandat distinct également des résidents de la commune. Cette vision est à l’origine de plusieurs cas où le gouverneur du comté a empiété sur le pouvoir discrétionnaire de la commune. KS regrette que le droit norvégien permette encore à l'État d'annuler des décisions municipales sur la base d'une évaluation de l'opportunité.

 

 Au cours de la procédure de consultation, le ministère a fait valoir que, dans ces cas, le gouverneur a agi dans des affaires individuelles en tant qu'organe d'appel, alors que le droit de faire appel de décisions individuelles représente une garantie juridique pour les individus, en tant qu'autre valeur fondamentale.  À cet égard, les rapporteurs sont d'avis que la possibilité pour l'État d'annuler des décisions municipales individuelles, lorsque les municipalités ont fait un choix entre deux options légales, semble problématique en termes de risques qu'elle peut poser pour l'autonomie locale.

 

 Bien qu’il existe habituellement une relation juste et collaborative entre le gouverneur du comté et les autorités locales, comme cela a été souligné lors de la réunion avec le gouverneur du comté de Nordland, la notion même d’« intérêt national » reste vague. Cette « zone grise » est parfois à l’origine de tensions, comme dans le cas des projets de développement local ayant un impact sur l’élevage de rennes, lequel est considéré en Norvège comme un intérêt national.

 

 Par conséquent, les rapporteurs estiment que l’article 8, paragraphe 2, de la Charte n’est que partiellement respecté en Norvège.

Article 8.3
Contrôle administratif des actes des collectivités locales - Article ratifié

Le contrôle administratif des collectivités locales doit être exercé dans le respect d’une proportionnalité entre l’ampleur de l’intervention de l’autorité de contrôle et l’importance des intérêts qu’elle entend préserver.


 L’article 8, paragraphe 3, porte sur la manière dont le contrôle s’exerce en pratique et requiert que le principe de proportionnalité soit respecté. En vertu de ce principe, l’organe régional ou national ne doit intervenir que dans la mesure de ce qui est nécessaire, en tenant compte de l’importance de l’intérêt public en jeu ou de la gravité de la violation de la loi supposée avoir été commise par l’autorité locale[74].

 

 En Norvège, comme indiqué ci-dessus, l’État peut contrôler que les municipalités et les conseils de comté s’acquittent des tâches qui leur sont imposées.

 

 KS a souligné qu’il existe un déséquilibre fondamental des pouvoirs, dans certains cas importants, dans le contrôle individuel de communes par le gouverneur du comté. Celui-ci consacre des ressources considérables au contrôle, tandis que les communes ne disposent pas de ressources similaires face à l’autorité de contrôle. En outre, la commune n’a guère l’habitude de poser des questions critiques aux autorités de contrôle, qui disposent ainsi d’un pouvoir de définition.

 

 Malgré les nouvelles dispositions de la loi sur les collectivités locales relatives à la promotion et la protection de l’autonomie locale, KS considère que le manque de compréhension de l’autonomie et des règles régissant les relations entre les autorités nationales et locales continue d’avoir un impact sur le comportement de l’État vis-à-vis des communes et des conseils de comté. Lorsque l’intérêt national est en jeu, il l’emporte encore semble-t-il automatiquement sur l’autonomie, bien que selon les principes inscrits dans la loi l’intérêt national doive être mis en balance avec l’intérêt de l’autonomie, en particulier dans le droit individuel et dans le cas individuel.

 

 Par conséquent, les rapporteurs estiment que l’article 8, paragraphe 3, de la Charte est partiellement respecté en Norvège.

Article 9.8
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Afin de financer leurs dépenses d'investissement, les collectivités locales doivent avoir accès, conformément à la loi, au marché national des capitaux.


 L’article 9, paragraphe 8, concerne l’accès des collectivités locales au marché national des capitaux afin de financer leurs dépenses d’investissement. L’accès au marché national des capitaux est important pour que les collectivités locales puissent financer les projets d’investissement nécessaires pour le développement du territoire local, du fait que le plus souvent le niveau de leur ressources propres « ordinaires » ne leur permet pas de couvrir tous les projets et programmes adoptés par les collectivités locales pour répondre aux besoins locaux. Cependant, comme d’autres droits inscrits dans la Charte, celui-ci n’est pas absolu et doit être concilié avec la politique générale relative aux dépenses et à l’endettement du secteur public. C’est pourquoi la Charte indique que l’accès doit se faire « conformément à la loi ». De plus, du fait de la crise économique récente, de nombreux pays ont instauré des mesures d’austérité destinées à apporter une réponse efficace aux déficits publics. Aussi la question de l’accès au marché national des capitaux doit-elle être analysée dans le cadre de la politique budgétaire nationale et de la gestion de la dette publique[81].

 

 En Norvège, les autorités locales peuvent contracter des emprunts et la législation établit certaines exigences en matière de responsabilité. Les articles 14-14 à 14-17 de la loi sur les collectivités locales régissent les fins auxquelles les communes sont autorisées à contracter des prêts. Les emprunts ne peuvent financer que des investissements dans des bâtiments, des installations et des actifs ayant une valeur durable. Lorsqu’une commune décide de contracter un emprunt, la décision doit préciser les modalités de son remboursement.

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 9, paragraphe 8, est respecté en Norvège.

Article 9.7
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L'octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur propre domaine de compétence.


 L’article 9, paragraphe 7, de la Charte dispose que « dans la mesure du possible, les subventions accordées aux collectivités locales ne doivent pas être destinées au financement de projets spécifiques. L’octroi de subventions ne doit pas porter atteinte à la liberté fondamentale de la politique des collectivités locales dans leur domaine de compétence propre ».

 

 Bien que la plupart des dotations nationales soient inconditionnelles (non réservées), il existe également en Norvège des dotations destinées à des projets spécifiques. Cependant, les collectivités locales peuvent pleinement exercer leur liberté politique dans la limite de la finalité de ces dotations. Aucun problème n’a été signalé à ce sujet lors de la visite de suivi.

 

 Pour ces raisons, les rapporteurs considèrent que l’article 9, paragraphe 7, est respecté en Norvège.

Article 9.6
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales doivent être consultées, d'une manière appropriée, sur les modalités de l'attribution à celles ci des ressources redistribuées.


 L’article 9, paragraphe 6, de la Charte renvoie à un principe général de consultation, tel qu’énoncé à l’article 4.6. Dans ce cas, la consultation est requise concernant la manière dont les ressources redistribuées sont allouées aux collectivités locales par les autres niveaux d’autorité. Aux termes de l’article 9.6, la consultation n’est pas seulement une procédure obligatoire devant être menée en temps utile avant l’adoption d’une décision finale : elle doit en outre porter non seulement sur la décision elle-même mais aussi sur la manière dont celle-ci est prise et sur les critères utilisés pour ce faire[80].

 

 La consultation fait une partie intégrante du système d’autonomie locale en Norvège, comme indiqué ci-dessus.

 

 Des consultations sont régulièrement organisées entre le gouvernement et le secteur municipal au sujet des finances des autorités locales dans le budget de l’État. KS rencontre le gouvernement au nom du secteur municipal. L’objectif principal du système de consultation est de parvenir à un accord sur les revenus des collectivités locales. Un autre objectif du système est de réduire l’utilisation d’outils de gestion puissants de l’État en établissant un accord sur les priorités en lien avec les ressources des autorités locales. Le cadre de consultation a contribué à l’amélioration des relations entre KS et l’État, ainsi qu’à une compréhension commune des besoins du secteur local.

 

 Les rapporteurs considèrent que l’article 9, paragraphe 6, est respecté en Norvège.

Article 9.5
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

La protection des collectivités locales financièrement plus faibles appelle la mise en place de procédures de péréquation financière ou des mesures équivalentes destinées à corriger les effets de la répartition inégale des sources potentielles de financement ainsi que des charges qui leur incombent. De telles procédures ou mesures ne doivent pas réduire la liberté d'option des collectivités locales dans leur propre domaine de responsabilité.


 L’article 9, paragraphe 5, concerne la situation financière des communes désavantagées financièrement du fait qu’elles se trouvent dans des régions économiquement ou géographiquement défavorisées (régions en transition, de montagne ou insulaires), ou simplement parce qu’elles sont trop petites pour obtenir les ressources nécessaires pour exécuter leurs tâches.

 

 L’égalité des services offerts à tous, quelle que soit leur commune de résidence, est une exigence fondamentale dans la société norvégienne. Le système de recettes des communes garantit ce principe au moyen de deux programmes de redistribution qui sont entièrement financés par les communes elles-mêmes.

 

 Par le biais de la péréquation fiscale, les communes ayant des recettes fiscales élevées provenant de leurs revenus propres et de leur patrimoine doivent transférer une partie de leurs recettes aux communes ayant de faibles recettes fiscales.

 

 Dans le cadre de la péréquation des dépenses, chaque commune calcule ses besoins en fonction de sa structure démographique, tant du point de vue de la composition par âge que de certaines caractéristiques socio-économiques. En outre, la géographie de la commune est également prise en compte. Les communes dont les besoins par habitant sont supérieurs à la moyenne nationale reçoivent un complément à leur subvention-cadre. Celui-ci est intégralement financé au moyen d’une réduction correspondante de la subvention-cadre accordée aux communes dont les besoins sont inférieurs à la moyenne nationale.

 

 Comme le soulignent les réponses écrites de KS aux rapporteurs, le mécanisme de péréquation est transparent mais peut être perçu comme compliqué. Il fonctionne efficacement et il n’est donc pas nécessaire de recourir à des fonds discrétionnaires pour compenser les situations qui ne sont pas prises en compte par la partie fixe du système de recettes.

 

 KS a également noté qu’à intervalles réguliers un comité d’experts est mis en place, comprenant des représentants des communes/conseils de comté, de l’État et des milieux universitaires, en vue d’un examen complet du système de recettes. En outre, il convient de souligner que la partie du système qui garantit l’égalité des services, la péréquation des dépenses, est un mécanisme qui fait l’objet de discussions et d’une évaluation économique ainsi que, dans une très faible mesure, d’évaluations et de priorités politiques. En outre, il a joué un rôle important et a contribué à la grande légitimité du système de recettes.

 

 Les rapporteurs considèrent que l’article 9, paragraphe 5, est respecté en Norvège.

Article 9.3
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Une partie au moins des ressources financières des collectivités locales doit provenir de redevances et d’impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi.


 L’article 9, paragraphe 3, requiert qu’une partie au moins des ressources financières des collectivités locales provienne de redevances et d’impôts locaux dont elles ont le pouvoir de fixer le taux, dans les limites de la loi. La Charte ne précise pas que les ressources propres d’une collectivité locale doivent comporter une proportion uniforme d’impôts locaux, mais elle requiert qu’une partie « au moins » de ces ressources provienne de redevances et d’impôts locaux. Cette partie doit être suffisamment importante pour garantir aux collectivités locales une indépendance financière aussi grande que possible.

 

 En Norvège, la fiscalité représente 36,2 % des recettes des collectivités infranationales d’après les données de l’OCDE[78]. L’impôt sur le revenu est la principale source de recettes fiscales. En 2020, le taux national était de 22 %, avec des parts en points de pourcentage de 11,10 pour les communes et de 2,45 pour les comtés. Les communes perçoivent également un impôt sur la fortune de 0,7 % (pour les montants supérieurs à 1,5 million NOK). Ces taux maximaux sont fixés chaque année par le Parlement. Les autorités locales peuvent en principe choisir un taux inférieur, mais cela n’est pratiquement jamais le cas car le gouvernement réduit alors les subventions d’un montant équivalent. La raison en est que la péréquation financière (voir ci-dessous) dépend des recettes fiscales réelles. Les communes peuvent également prélever des taxes locales sur les biens et les ressources naturelles[79].

 

 Lors de la réunion avec la délégation et dans ses réponses écrites, KS a souligné que les communes et les conseils de comté ont des possibilités limitées de moduler leurs recettes propres par le biais de la fiscalité. Les communes n’ont qu’une faible influence et les autorités de comté n’en ont pratiquement aucune. Les communes peuvent moduler leurs recettes propres par le biais de l’impôt foncier, mais le cadre de cette possibilité a été réduit au cours des dernières années. L’impôt foncier est la seule forme de financement dont chaque commune a le contrôle total et qui n’a pas de conséquences sur les autres parties des transferts aux communes. Des restrictions ont été introduites à deux reprises sur la capacité des communes à percevoir la taxe foncière sur les logements et les biens de loisirs. À partir de 2020, le taux maximal d’imposition a été ramené de 7 à 5 %, et en 2021 il a été réduit de 5 à 4 %. Des restrictions du droit de percevoir l’impôt foncier sur d’autres objets ont également été adoptées. On peut donc constater que la marge de manœuvre des communes dans leur rôle d’autorité fiscale locale est relativement réduite.

 

 Les rapporteurs considèrent que l’article 9, paragraphe 3, est respecté en Norvège.

Article 9.2
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les ressources financières des collectivités locales doivent être proportionnées aux compétences prévues par la Constitution ou la loi.


 Un autre principe fondamental, énoncé à l’article 9, paragraphe 2, requiert que les collectivités locales disposent de ressources financières suffisantes proportionnées aux compétences qui leur sont confiées par la loi. Ce paragraphe énonce le principe de « proportionnalité » des ressources financières des collectivités locales, selon lequel les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être suffisantes et proportionnées à leurs tâches et fonctions. À cette fin, tout transfert de compétences ou de tâches doit s’appuyer sur un calcul minutieux des coûts réels de la prestation des services qui devront être assumés par les collectivités locales. Les coûts des tâches obligatoires et déléguées peuvent inclure divers facteurs (comme la structure socioéconomique de la population), afin de réaliser des estimations plus précises et d’éviter les décisions politiques arbitraires[77].

 

 À l’heure actuelle, tous les interlocuteurs s’accordent à dire que les ressources sont suffisantes, même si des questions se posent concernant la pérennité du système actuel de protection sociale, face au vieillissement de la population. Lors des réunions, il a été souligné que certains défis existent dans le domaine social spécialisé, mais que le système de financement norvégien fonctionne bien à l’heure actuelle, permettant aux communes et aux comtés de fournir une gamme égale de services à leurs citoyens.

 

 Les rapporteurs considèrent que l’article 9, paragraphe 2, est respecté en Norvège.

Article 9.1
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont droit, dans le cadre de la politique économique nationale, à des ressources propres suffisantes dont elles peuvent disposer librement dans l’exercice de leurs compétences.


 L’article 9, paragraphe 1, de la Charte établit deux principes fondamentaux dans le domaine des finances. Premièrement, les collectivités locales doivent disposer de ressources financières propres ; le droit à des ressources « suffisantes » n’est pas absolu mais doit s’exercer « dans le cadre de la politique économique nationale ». Deuxièmement, les collectivités locales doivent être libres de décider de la manière dont elles dépensent ces ressources[75]. Cette liberté prend la forme de diverses décisions concernant les dépenses, la plus importante étant l’adoption d’un budget annuel. Toute limite ou restriction imposée aux collectivités locales par des autorités supérieures devrait être précisée et justifiée et viser à garantir la stabilité macroéconomique et une bonne gestion financière.

 

 Ce paragraphe est respecté en Norvège. Les ressources financières sont suffisantes, une part importante provient des impôts locaux et les communes peuvent décider de leur affectation. Les finances publiques sont solides, tant au niveau de l’administration centrale que du secteur municipal.

 

 D’après les informations fournies par le ministère des finances aux rapporteurs, les résultats nets d’exploitation du secteur local (communes et comtés) sont solides depuis de nombreuses années, et supérieurs à la recommandation formulée par le Comité des rapports statistiques pour les finances des comtés et des communes (TBU)[76]. Depuis plusieurs années, le secteur local connaît une croissance des recettes libres (recettes non réservées) plus forte que celle qui était prévue dans les budgets présentés. Cela s’explique principalement par des recettes fiscales plus élevées que prévu et une croissance plus faible que prévu des coûts liés aux retraites et à la démographie, ce qui a conduit à des résultats nets d’exploitation élevés dans le secteur local sur une longue période. Par conséquent, les collectivités locales ont pu augmenter leur épargne en fonds propres d’exploitation libres (fonds propres d’exploitation non réservés). Les communes et les comtés peuvent utiliser librement les fonds pour financer des dépenses de fonctionnement ou d’investissement. L’objectif n’est pas que les fonds augmentent au fil du temps.

 

 Lors des réunions et dans les réponses écrites aux rapporteurs, KS a estimé que, bien qu’il soit toujours possible de faire mieux, au vu de la situation dans son ensemble, le niveau de revenu est raisonnablement acceptable. Le secteur municipal a été indemnisé chaque année au cours des 10 à
20 dernières années pour l’augmentation des coûts résultant de l’évolution de la population, de la croissance des salaires et des prix et de la croissance des coûts des pensions au-delà de celle des salaires.

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 9, paragraphe 1, est respecté en Norvège.

Article 9.4
Les ressources financières des collectivités locales - Article ratifié

Les systèmes financiers sur lesquels reposent les ressources dont disposent les collectivités locales doivent être de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l'évolution réelle des coûts de l'exercice de leurs compétences.


 L’article 9, paragraphe 4, requiert que les ressources dont disposent les collectivités locales soient de nature suffisamment diversifiée et évolutive pour leur permettre de suivre, autant que possible dans la pratique, l’évolution (l’augmentation) réelle des coûts de l’exercice de leurs compétences.

 

 En Norvège, les recettes des communes peuvent provenir de différentes sources (impôts et redevances propres, transferts et autres sources). Les communes peuvent adapter leurs recettes propres aux circonstances : par exemple, si le produit de l’impôt local diminue pour des raisons économiques générales, une collectivité locale peut décider d’augmenter les droits et redevances payés par les usagers des services locaux (en particulier dans les zones urbaines) afin de compenser la baisse des recettes.

 

 Les rapporteurs considèrent que l’article 9, paragraphe 4, est respecté en Norvège.

Article 10.1
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales ont le droit, dans l'exercice de leurs compétences, de coopérer et, dans le cadre de la loi, de s'associer avec d'autres collectivités locales pour la réalisation de tâches d'intérêt commun.


 L’article 10 de la Charte porte sur la possibilité d’une coopération entre les collectivités locales et sur leur droit de s’associer, tant au niveau national qu’international.

 

 L’article 10, paragraphe 1, concerne les types de coopération visant la réalisation de tâches d’intérêt commun. Il requiert que les collectivités locales disposent d’un droit général de coopérer entre elles pour proposer les services locaux ou exercer leurs responsabilités. La coopération intercommunale (ou la coopération à d’autres niveaux d’autorité locale) est un outil fondamental pour les collectivités locales aux fins de la prestation des services, dans la mesure où nombre d’entre elles sont trop petites ou trop faibles (financièrement) pour assurer tous les services qu’elles sont censées assurer ou pour appliquer de véritables stratégies ou politiques locales. À ce droit général de coopérer avec d’autres collectivités locales s’ajoute le droit, plus spécifique, de s’associer avec d’autres collectivités locales, c’est-à-dire de créer des organisations distinctes. Bien que la Charte ne mentionne qu’un droit d’association, le droit spécifique de créer des structures institutionnelles communes, distinctes des collectivités locales qui les composent, peut prendre des formes diverses. 

 

 En Norvège, l’article 17 de la loi de 2018 sur les collectivités locales permet la coopération intercommunale et précise ses modalités. Les articles 18 à 20 réglementent trois de ces types de coopération. Deux ou plusieurs communes ou autorités de comté peuvent créer ensemble un conseil politique intercommunal[82], qui peut traiter de questions qui dépassent les limites territoriales de la commune ou du comté. La décision de créer un tel conseil appartient aux conseils municipaux et aux conseils de comté eux-mêmes. Un conseil politique intercommunal ne peut être autorisé à prendre des décisions individuelles. Toutefois, le conseil peut être autorisé à prendre de telles décisions concernant les affaires internes dans le cadre de la coopération et à gérer des dispositifs de subventions.

 

 Deux ou plusieurs communes ou autorités de comté peuvent établir ensemble une communauté d’exercice pour l’accomplissement de tâches communes. La décision de créer une telle communauté d’exercice appartient aux conseils municipaux et aux conseils de comté eux-mêmes.

 

 La loi sur les collectivités locales prévoit également une coopération avec une commune hôte, ce qui signifie qu’une commune peut confier l’exécution de tâches statutaires à une autre commune (appelée commune hôte). La commune hôte est responsable de la prestation du service conformément à l’accord conclu par les deux communes. Les sociétés anonymes régies par la loi sur les intercommunales constituent une autre forme de coopération intercommunale. Il s’agit d’une forme de coopération courante, en particulier dans le cas d’activités commerciales municipales.

 

 Ce type de coopération intercommunale et interrégionale est très répandu en Norvège. Chaque commune participe à au moins un accord de coopération et la plupart d’entre elles sont membres de plusieurs accords de coopération. Les accords de coopération sont particulièrement fréquents dans le domaine des services d’utilité publique tels que la fourniture d’électricité, l’approvisionnement en eau, l’assainissement et les transports publics. D’autres domaines de coopération sont notamment l’audit, les urgences médicales, les services d’urgence, les services éducatifs et psychologiques et l’aide sociale à l’enfance[83].

 

 Les communes ont largement accès à la collaboration pour la réalisation des tâches statutaires et non statutaires. Il existe une vaste coopération intercommunale en Norvège. Toutes les communes du pays sont impliquées dans une ou plusieurs collaborations. C’est dans les domaines suivants que la collaboration est la plus importante : l’audit, les centres de crise, les services d’incendie, les urgences, la protection de l’enfance et les tâches informatiques. Dans ces domaines, le degré de coopération varie d’environ 50 % à 73 % des communes[84].

 

 Par conséquent, les rapporteurs estiment que l’article 10, paragraphe 1, de la Charte est pleinement respecté en Norvège.

Article 10.2
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Le droit des collectivités locales d'adhérer à une association pour la protection et la promotion de leurs intérêts communs et celui d'adhérer à une association internationale de collectivités locales doivent être reconnus dans chaque Etat.


 Ce paragraphe de la Charte reconnaît clairement et énonce un autre droit des collectivités locales, à savoir celui d’adhérer : (a) à une association nationale pour la protection et la promotion de leurs intérêts communs et (b) à une association internationale de collectivités locales.

 

 Les « associations » évoquées dans le paragraphe 2 sont différentes de celles dont il est question dans le paragraphe 1. Celles-ci sont constituées en vue de la mise en œuvre de services, de programmes et de projets locaux et sont des instruments destinés à l’exercice de tâches et responsabilités. À l’inverse, les associations évoquées dans l’article 10.2 ont pour vocation de promouvoir des intérêts communs. Elles jouent un rôle fondamental dans la représentation et la défense des droits, pouvoirs et intérêts des collectivités locales et mènent de nombreuses activités au nom de toutes ces collectivités (et pas seulement en faveur de leurs membres)[85].

 

 En Norvège, l’Association norvégienne des pouvoirs locaux (KS) est née en 1972 de la fusion de l’Union des villes norvégiennes et de l’Association norvégienne des communes rurales[86]. KS représente la totalité des communes et des comtés ainsi que quelque 500 entreprises publiques en tant qu’organisation d’intérêts et d’employeurs. Elle emploie environ 260 personnes à son siège à Oslo, dans ses bureaux régionaux dans toute la Norvège et à son bureau de représentation à Bruxelles.  Toutes les communes et tous les conseils de comté en sont membres.

 

Dans le dernier budget, 75 % des revenus proviennent des cotisations des membres et 25 %, d’autres sources, notamment la vente de solutions numériques et l’aide juridique aux membres. KS possède également plusieurs entreprises qui fournissent des services à ses membres et à d’autres organes, notamment des services de conseil, d’édition, de formation et de location de biens, ainsi que la publication d’une revue hebdomadaire[87].

 

 KS est le plus grand employeur public de Norvège. Toutes les communes et tous les conseils de comté (à l’exception d’Oslo) ont autorisé KS à négocier et à conclure des accords avec les organisations de travailleurs sur les salaires et d’autres conditions. Au total, KS emploie environ 440 000 personnes.

 

 Les rapporteurs estiment que l’article 10, paragraphe 2, de la Charte est pleinement respecté en Norvège.

Article 10.3
Le droit d'association des collectivités locales - Article ratifié

Les collectivités locales peuvent, dans des conditions éventuellement prévues par la loi, coopérer avec les collectivités d'autres Etats.


 L’article 10, paragraphe 3, concerne la coopération des collectivités territoriales avec leurs homologues d’autres États. Le droit de participer à la coopération transfrontalière est également protégé.

 

 La Norvège possède une longue tradition de coopération transfrontalière. Elle a ratifié, le
12 août 1980, la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (STE n° 106). La Convention-cadre est entrée en vigueur le 22 décembre 1981.
Le 18 octobre 2010, la Norvège a ratifié le Protocole additionnel à la Convention-cadre européenne sur la coopération transfrontalière des collectivités ou autorités territoriales (STE n° 159), qui est entré en vigueur le 19 janvier 2011.

 

 Le programme Interreg de l’UE vise à renforcer la coopération transfrontalière. Les projets qui favorisent le développement régional, l’échange de connaissances et la croissance économique durable reçoivent un soutien financier de la Norvège par le biais de plusieurs programmes Interreg.

 

 Plusieurs comtés norvégiens sont également membres d’organisations internationales, dont les plus importantes sont la Conférence des régions périphériques maritimes (CRPM) et la Coopération infrarégionale des États de la mer Baltique (BSSSC).

 

 Les rapporteurs considèrent que l’article 10, paragraphe 3, de la Charte est pleinement respecté en Norvège.

Article 11
Protection légale de l'autonomie locale - Article ratifié

Les collectivités locales doivent disposer d'un droit de recours juridictionnel afin d'assurer le libre exercice de leurs compétences et le respect des principes d'autonomie locale qui sont consacrés dans la Constitution ou la législation interne.


 L’article 11 de la Charte concerne le droit à un recours juridictionnel effectif en vue de garantir le respect de l’autonomie locale. Cet article souligne que les collectivités locales doivent disposer du droit d’invoquer et de défendre les principes de l’autonomie locale devant les tribunaux, en particulier dans le cadre de procédures judiciaires dans lesquelles leurs droits et compétences sont contestés ou restreints ou lorsque ces droits sont menacés par des niveaux d’autorité publique supérieurs (centraux ou régionaux). Par « recours juridictionnel », on entend l’accès d’une collectivité locale soit à un tribunal dûment constitué, soit à un organe légal équivalent et indépendant[88].

 

 En Norvège, comme indiqué ci-dessus, l’article 1-4 bis de la loi relative à la médiation et à la procédure dans les litiges civils (loi sur les litiges) est entré en vigueur en 2018. Il indique explicitement que les communes et les comtés peuvent, dans certains cas, intenter une action contre l’État au sujet de la validité d’une décision d’un organe de l’État. Une telle décision peut par exemple être prise lorsqu’un organe de l’État annule ou modifie une décision municipale, que ce soit ou non à la suite d’un recours, lorsqu’il impose des obligations à la commune à la suite d’un audit ou lorsqu’il partage des droits ou des obligations entre des communes ou des autorités de comté.

 

 Si la commune ou l’autorité du comté est en désaccord avec la décision des organes de l’État, elle peut désormais porter cette décision devant les tribunaux. Si les tribunaux concluent que la décision de l’État n’est pas valide, les communes peuvent également présenter une demande d’indemnisation. Il existe des garanties pour protéger les particuliers et leurs droits à certains services essentiels dans les cas où il y a un litige entre la commune et l’État au sujet de la décision rendue dans l’affaire les concernant. Il existe des exceptions au droit d’intenter une action en justice dans les affaires de protection de l’enfance lorsque l’État est l’instance de recours.

 

 Depuis l’entrée en vigueur de cette disposition, quelques affaires opposant des communes à l’État ont été portées devant les tribunaux. Elles portaient toutefois sur des cas et des thèmes qui ne relèvent pas du champ d’application de l’article 1-4 bis.

 

 La délégation a été informée que la Cour suprême, le 6 juin 2023[89], a statué sur l’affaire introduite par la commune de Beiarn, portant entre autres aspects sur le statut juridique de la commune. La Cour suprême a considéré que la règle énoncée à l’article 1-4 bis ne précise pas de manière exhaustive la compétence de la commune pour intenter un procès, mais que les communes peuvent également avoir compétence pour intenter un procès à l’État dans d’autres cas où les conditions générales d’intérêt juridique sont remplies[90].

 

 Toutefois, KS a noté que, malgré ce nouveau recours judiciaire, les communes ne sont pas bien protégées contre le Parlement, par exemple lorsque, comme cela arrive souvent, le Parlement adopte une législation détaillée.

 

 Comme l’a souligné la Cour suprême dans ses réponses écrites, dans les affaires portées devant les tribunaux, les juridictions – dont la Cour suprême en dernière instance – ont le pouvoir et l’obligation, en vertu de l’article 89 de la Constitution, de vérifier si les dispositions législatives et les décisions administratives sont conformes à la Constitution. Toutefois, la Norvège ne dispose pas d’un système de contrôle constitutionnel abstrait et il existe une exigence générale de « pertinence » avant qu’une affaire puisse être entendue par un tribunal. Ainsi, la constitutionnalité d’une loi ou d’une mesure n’est examinée que si la question se pose dans le cadre d’un cas concret.

 

 Par conséquent, les rapporteurs considèrent que l’article 11 est respecté en Norvège.

ADHESION

au Conseil de l’Europe

RATIFICATION

de la Charte européenne de l’autonomie locale

CONSTITUTION | LEGISLATION NATIONALE

Aucune réforme constitutionnelle ou législative visant à la reconnaissance de l’autonomie locale n’a abouti à ce jour.



30Disposition(s) ratifiée(s)
0Disposition(s) avec réserve(s)
0 Disposition(s) non ratifiée(s)
26Disposition(s) conforme(s)
4Articles partiellement conformes
0Article non conforme